Le spiral est le petit ressort qui régule la marche de la montre. En coordination avec le balancier et l'échappement, c'est lui qui fait que le mouvement bat à la bonne vitesse. Extraordinairement fin, léger, fragile et déterminant, il est aussi crucial que discret. Ce que l'on sait peu est qu'il est le produit de plusieurs siècles de progrès. Que d'innombrables marques et horlogers ont tenté de lui donner la forme et la composition les plus stables. Le tout afin que l'immuable séquence que l'on attend de lui, s'enrouler, se dérouler sans cesse, soit la plus stable possible, quelles que soient les conditions.
Deux manières de façonner le spiral dominent les débats. La première est le spiral plat, configuration où il est enroulé comme une spirale dite d’Archimède. Il est utilisé dans les cas où il faut économiser de la hauteur ou les moyens car il est le moins épais et le plus simple à mettre en forme.
La seconde, plus stable et efficace, se nomme spiral à courbe terminale Phillips. Il tire son nom d'Edouard Phillips, mathématicien français qui s'est penché sur l'horlogerie dans les années 1860. Il a formalisé ce que Breguet avait découvert avant lui. En changeant la forme de la fin du ressort, en la faisant repasser par dessus le reste de l'enroulement, on améliore sa stabilité. A 95%, ce spiral est cependant plat alors que d'autres mises en volume ont existé. Certaines étaient alambiquées, d’autres simplement trop complexes à mettre en place. Elles ont des bénéfices en termes de chronométrie, mais souvent au détriment du coût. Il existe une seule marque qui pratique encore plusieurs de ces exceptions : Jaeger-LeCoultre.
Aucune autre marque ne propose autant de formes de spiraux. Plat et à courbe terminale Phillips, bien sûr. Mais la marque en a également fait un ressort boudin, officiellement connu sous le nom de spiral cylindrique. Cet enroulement en forme de tube sert dans plusieurs tourbillons dont le Duomètre à Sphérotourbillon, où il oscille autour de son long axe vertical.
Lors du lancement du Gyrotourbillon 3, la marque a présenté un spiral sphérique. Façonné à la main en forme de boule, il accompagne naturellement les positions à 360° de la cage de tourbillon de cette montre superlative. Enfin, pour le Gyrotourbillon 4 (officiellement nommé Reverso Tribute Gyrotourbillon) Jaeger-LeCoultre a présenté un spiral hémisphérique : prestigieux, exclusif, mais aussi moins haut que le sphérique. Il est donc adapté à cette montre dont l'une des raisons d'être est d'affiner un tourbillon tridimensionnel.
Jaeger-LeCoultre maîtrise de nombreux métiers, mais on ne savait pas que le façonnage du spiral en faisait partie. Art oublié, délégué à un fabricant spécialisé et massif (Nivarox Far, filiale du Swatch Group), le spiral est revenu au cœur des enjeux horlogers à la faveur de questions d'approvisionnement. On a alors redécouvert son importance, la manière dont il a été négligé alors qu'il s'agit d'un morceau d'histoire, d'un savoir-faire très spécial. Jaeger-LeCoultre a retrouvé les gestes et les a pérennisés en coopération avec A. Lange &Söhne, une marque qui utilise sa propre production de spiraux depuis des années. C'en est au point que son expertise a été mise à profit par le groupe Richemont, propriétaire de la marque. Elle a demandé à la marque du Sentier d'assister dans la création d'une unité de fabrication de spiraux au sein de ValFleurier, la grande manufacture de composants et de mouvements interne du groupe. On ne fait pas plus stratégique et sensible comme sujet.
