La rengaine est toujours la même : « on a déjà presque tout inventé en horlogerie. Surtout pour les complications traditionnelles, comme le quantième perpétuel (QP) ». Sauf que, très régulièrement, de nouveaux talents l’améliorent, l’optimisent, le réinventent ! Comment ?
Moser : plus simple ? Impossible !
Une base intéressante a été posée par H. Moser & Cie. A tel point que le QP est devenu, et de loin, la véritable marque de fabrique de la manufacture – et accessoirement son plus grand succès. Pourtant, en termes de mouvement, il n’y a rien de révolutionnaire : tout le génie de H. Moser & Cie est d’avoir réalisé le QP le plus simple, le plus lisible, le plus intuitif qui soit. Le principe : une micro aiguille centrale qui utilise les 12 index comme indicateur des 12 mois. A 3h, la date. Le jour est omis, considérant que tout le monde sait, en règle générale, quel jour l’on est. Enfin, l’indicateur d’année bissextile, dont l’utilisation reste rarissime, est basculé côté fond. Ultra épuré, le QP signé Moser est un exemple de lisibilité.
Une place au théâtre chez Cartier
C’est à peu près dans le même temps (2014) que Cartier s’est saisi du dossier QP. Le nom de la pièce traduit sa singularité : Rotonde de Cartier Astrocalendaire. L’idée est de travailler sur l’affichage. La pièce est conçue comme un amphithéâtre. Tridimensionnel, disposé en étages et concentrique, l’affichage des fonctions du quantième perpétuel se déroule au fil de différents niveaux : le jour est indiqué sur le premier. Il est suivi du mois sur le second, lui-même surplombé par la date. De fins guichets se déplacent le long de ces gradins. La dernière fonction du quantième perpétuel est indiquée, quant à elle, par une aiguille située au dos de la montre, précisant la nature de l’année : bissextile ou non. Cette conception disruptive se règle intégralement par la couronne, en avance ou en recul, et est régulée par un tourbillon volant central. Effet garanti !
Jaeger-LeCoultre, en musique
En 2019, au SIHH, Jaeger-LeCoultre a démontré une fois encore sa maîtrise technique et esthétique avec une impressionnante Master Grande Tradition Gyrotourbillon Westminster Perpétuel. La pièce s’inscrit dans la lignée des tourbillons multi-axes dont la maison s’est faite une spécialité. Outre son QP, la pièce reproduit le carillon Westminster, célèbre mélodie des cloches de Big Ben dans la tour du Palais de Westminster à Londres. La Master Grande Tradition Gyrotourbillon Westminster Perpétuel combine quatre ensembles de timbres et marteaux pour jouer la sonnerie Westminster aux quarts d’heure lorsque la fonction répétition minutes est activée.
Tonnerre mécanique chez MB&F
Chez MB&F, les codes esthétiques sont différents. Sur la Legacy Machine Perpetual, on retrouve le grand pont suspendu de balancier, signature de la collection « LM ». Tout autour, dans des proportions modérées de boîtier (44 mm), le cadran affiche les jours, dates et mois dans un mode tricompax assez traditionnel (3h, 6h, 9h). Y sont intercalées les mentions de réserve de marche (à 5h) et d’année bissextile (à 7h) par aiguille rétrograde.
Si l’affichage est donc assez conventionnel, la mécanique ne l’est pas. Les mécanismes traditionnels de calendrier perpétuel prennent pour référence les mois de 31 jours et « suppriment » les quantièmes superflus pour ceux qui en comptent moins — ils passent en accéléré sur les dates inutiles au cours du changement de date. Avec la LM Perpetual, le système est inversé. Un « processeur mécanique » prend pour référence le mois de 28 jours, ajoutant les quantièmes nécessaires pour les autres. On obtient le nombre exact de jours pour chaque mois sans passer par un avancement rapide et sans devoir sauter des jours superflus. En 2016, la Legacy Machine Perpetual a gagné le Prix de la montre calendrier lors du GPHG (Grand Prix d’Horlogerie de Genève).
De Bethune, dans la Lune
La manufacture est restée fidèle à son inspiration lunaire, dont elle s’est faite une spécialité. La DB25 QP est le seul calendrier perpétuel manufacture doté d’une phase de lune sphérique. Elle trône à 12h, en titane et acier bleui. Outre cette innovation, la pièce est dotée d’un double barillet autorégulateur, d’un système triple pare-chute et d’un balancier en titane/platine.
Et vogue Breguet
Reste le versant « marine » des quantièmes perpétuels. Breguet en a livré une interprétation magistrale il y a deux ans, avec la Ref. 5887 « Marine Equation Marchante ». Le principe est celui d’un QP complété d’une équation du temps. Cette complication indique l’heure solaire juste, en décalage quasi permanent par rapport à notre temps standardisé, suivant des écarts allant de -14 à +16 minutes. La 5887 marque ces écarts par une seconde aiguille de minutes qui permet la lecture instantanée de l’heure solaire et de l’heure conventionnelle. Une création évidente et astucieuse qui apporte au QP ce brin de poésie qui lui manque parfois…
