Haute fréquence, basse fréquence, quelle importance ?

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Haute fréquence, basse fréquence, quelle importance ? - Technique
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La vitesse d’oscillation du balancier détermine largement la personnalité d’une montre, en particulier quand elle est extrême. A quoi sert la haute fréquence ? Et pourquoi existe-t-il encore des montres lentes, très lentes ?

Produire une montre de grande précision est une démarche qui s’envisage de dizaines de manières. Parmi elles, l’augmentation de la fréquence du mouvement a connu ses plus belles heures ces dernières années. Longtemps cantonnée à un maximum de 5 Hz, elle couvre désormais une gamme bien plus large. 6 Hz avec Audemars Piguet, 8 Hz chez Chopard et même 10 Hz chez Breguet. Les fréquences encore plus élevées (50, 500 et même 1000 Hz chez TAG Heuer) ne concernent que des fonctions annexes du mouvement, en l’occurrence le chronographe qui, par nature, passe le plus clair de son temps inactif. Mais si la recherche d’horizons nouveaux s’est concentrée sur les grandes vitesses, d’autres marques choisissent l’option inverse. Souvent plus petites, plus expérimentales, elles optent pour des mouvements lents, à 2,5 Hz et même dans un cas extrême, à 1 Hz. Comment une chose et son contraire peuvent-elles amener à un résultat similaire ? Il suffit de choisir entre la statistique et la puissance.
 

Breguet Classique Chronométrie 7727, 10 Hz

 

A quoi sert d’aller deux fois plus vite si c’est pour avoir trois fois plus de problèmes?

L’avantage des montres à haute fréquence repose sur un calcul statistique. Un choc qui dérange une oscillation du balancier a moins d’incidence que s’il en dérange deux. Doubler la fréquence du mouvement revient à diviser par deux son exposition aux perturbations. En contrepartie, cette haute fréquence nécessite des développements techniques extrêmement complexes. Certaines pièces du mouvement tournent à une vitesse qui génère des problèmes importants, en particulier de friction. A quoi sert d’aller deux fois plus vite si c’est pour avoir trois fois plus de problèmes. Mais heureusement, les technologies issues du silicium, autolubrifié et léger, ont repoussé les barrières de vitesse. Au point qu’il n’est plus réellement question d’aller plus vite que 10 Hz.
 

Chopard 8HF

 

Mais pour aller vite, le balancier doit être petit. S’il est petit, il a peu d’inertie. Et donc il est comme un fétu de paille face aux perturbations. Individuellement, elles ont moins d’impact certes, mais le mouvement en subit plus. L’option inverse prend alors tout son sens. En allant très lentement, le balancier peut être plus grand, plus lourd, plus endurant aux petits chocs. Il permet également des réglages plus fins. Cette option renvoie aux grandes heures des horloges de grande précision, aux régulateurs du début du 20e siècle, munis de longs pendules, lourds, stables et redoutablement précis. Mais la démarche est contre-intuitive. Notre monde privilégie la performance supérieure, l’intensité et la nouveauté. Une solution plus lente restera nécessairement marginale. La morale de l’histoire est cependant édifiante. Partis en même temps, le lièvre et la tortue n’ont pas traîné en chemin et sont arrivés à peu près en même temps. L’horlogerie est décidément pleine de surprises.
 

Antoine Martin Slow Runner