Grande année pour l’espace, mais quid des montres de l’espace?

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A big year for space, but what about space watches? - Editorial
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Les deux premiers jours de 2019, deux exploits historiques ont planté le décor d’une année qui s’annonce riche en événements liés à l’espace. Pourtant, l’âge d’or des relations entre horlogerie et espace pourrait bien être sur le point de se terminer.

Quel bonheur de voir une explosion d’activités galactiques marquer le début de l’année au cours de laquelle nous célébrons le 50e anniversaire des premiers pas de l’Homme sur la lune! Le 1er janvier, la sonde New Horizons de la NASA s’est approchée de l’objet le plus éloigné de notre système solaire jamais visité par un vaisseau spatial, et a envoyé sur Terre des images de l’Ultima Thule qui ont parcouru quatre milliards de kilomètres à travers la galaxie. Le lendemain, à 10h26, heure de Pékin, la mission chinoise Chang’E-4 a effectué le premier alunissage sur la face cachée de la lune.

Les deux événements montrent à quel point l'exploration spatiale a évolué au cours des cinquante dernières années. Ils soulignent également les difficultés que les marques horlogères rencontrent désormais pour en tirer profit au niveau commercial. Omega bénéficie d’une position inégalée grâce à sa Speedmaster, que la NASA avait choisi comme Montre Officielle et qui, depuis, lors accompagne les astronautes dans l’espace. Mais les deux missions de la semaine passée étaient inhabitées et les photos renvoyées sur Terre ne montraient pas des astronautes tenant fièrement des drapeaux et arborant au poignet des montres à remontage manuel, mais un objet en forme de bonhomme de neige de la taille de Washington, DC, et un paysage lunaire désertique.

Grande année pour l’espace, mais quid des montres de l’espace?

Grande année pour l’espace, mais quid des montres de l’espace?

Partenaire du Programme d’Exploration Lunaire Chinois (CLEP), TAG Heuer célébrera le succès de la mission Chang’E-4 avec ses ambassadeurs chinois de la marque et les représentants du CLEP au Musée Chinois des Sciences et de la Technologie dans le courant de la semaine. La marque est partenaire de la mission depuis 2016 et a présenté l'année dernière deux montres CLEP à Baselworld: une édition limitée à 100 chronographes de la Carrera Calibre Heuer 01 et une Aquaracer  Calibre 5 avec disque de lune à 9 heures. Comme le partenariat lui-même, ces montres s'adressent plutôt au marché chinois, limitant la clientèle potentielle à 1,3 milliard de personnes seulement.

Pourtant, d’autres opportunités existent pour les marques horlogères souhaitant tirer profit du boom de l'espace de 2019. L’Organisation Indienne pour la Recherche Spatiale ne planifie pas moins de 32 missions en 2019, dont une première tentative d’alunissage motorisé avec la mission Chandrayaan-2, prévue pour le début de l’année. En l’absence de Chronométreur Officiel ou de Montre Officielle, la deuxième marque horlogère suisse la plus ancienne pourrait-elle enflammer le patriotisme de ses propriétaires indiens (le groupe Tata) et les persuader de faire équipe avec cette mission ? Favre-Leuba possède en tous cas déjà le hashtag idéal: #conqueringfrontiers.

Si de telles opportunités n’ont pas encore été saisies, l’explication est probablement à rechercher dans la façon dont de plus en plus de ces missions sont financées. Le Google Lunar XPRIZE a offert un prix de 30 millions de dollars à la première équipe non gouvernementale qui déposera un rover sur la lune et renverra une vidéo haute définition. Les missions lunaires sont ainsi passées du secteur public au secteur privé. Bien que Google ait finalement abandonné le parrainage de ce prix, la société israélienne SpaceIL, financée par des fonds privés, envisage de lancer en février la première mission lunaire non gouvernementale avec une fusée SpaceX Falcon 9. Ne serait-ce pas l’occasion idéale pour Itay Noy de faire connaître l'horlogerie indépendante d'Israël ?

De plus en plus de sociétés privées telles que SpaceX sont responsables des transports de fret de ces missions. Ces entreprises très rentables (la valorisation de SpaceX est supérieure à celle des exportations horlogères annuelles de la Suisse) ont également acquis une expérience précieuse qui leur permet de planifier leurs propres missions spatiales habitées. L'année dernière, SpaceX a confirmé avoir vendu un vol autour de la lune au milliardaire japonais Yusaku Maezawa. Mais, compte tenu de la taille de la société et de l’égo de son fondateur, il reste peu de place (ou de besoin) pour un sponsor.

Les premiers êtres humains à avoir survolé la face cachée de la lune l'ont fait par nécessité plutôt que par choix il y a près d'un demi-siècle. Pour l’équipage d’Apollo 13, c’était leur seul espoir de revenir sur Terre en toute sécurité. Suite à une panne technique à bord, ils durent couper l'alimentation de presque tous les équipements, sauf les plus essentiels, et furent donc obligés de compter sur une Omega Speedmaster pour chronométrer les 14 secondes d’allumage du moteur nécessaires pour poursuivre leur trajectoire. Le fait que la modeste Moon Watch fasse toujours partie de la collection de base d’Omega cinquante ans plus tard témoigne de l'attrait que cette montre et ces histoires légendaires continuent d'exercer. Le deuxième équipage à effectuer ce voyage autour de la lune portera-t-il des Speedies par nostalgie? Il faudra attendre au moins jusqu’en 2023 pour le savoir.