Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

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A Gem of Swiss Watch Retail (Pt 2) - A l'Emeraude
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A l'occasion du 110ème anniversaire d'A l'Emeraude, son directeur, Derek Cremers, examine le rôle clé du détaillant lausannois dans le soutien à l'horlogerie moderne indépendante.

Fondée à Lausanne le 24 décembre 1909, A l'Emeraude est synonyme de haute horlogerie dans la région. Dès le début, leurs liens étroits avec les marques les plus prestigieuses de l'industrie leur ont permis de contribuer au façonnage du paysage commercial et culturel de l'horlogerie en Suisse. 

Depuis 2004, l'influence horlogère d'A l'Emeraude a pris une dimension supplémentaire. Depuis l'acquisition d'A l'Emeraude il y a 15 ans, la famille Cremers a promu l'horlogerie indépendante moderne dans ses relations étroites avec sa clientèle exclusive. 

Actuellement, A l'Emeraude est l'un des rares détaillants en Suisse pour des marques telles que F.P. Journe et le seul distributeur suisse pour De Bethune et Voutilainen. Directeur d'A l'Emeraude, Derek Cremers se livre à WorldTempus au sujet de l'horlogerie artisanale indépendante.

Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

Quand nous pensons à l'horlogerie indépendante, les premiers marchés qui nous viennent à l'esprit sont l'Asie et peut-être l'Amérique du Nord. Le constat général est que les marques indépendantes ne sont pas aussi fortes en Europe. Pouvez-vous nous en dire plus sur le choix d'A l'Emeraude de soutenir de telles marques ? 

Nous nous concentrons sur des marques indépendantes et artisanales parce que nous estimons qu'il est de notre responsabilité de soutenir et de faire connaître ces artisans et ce qu'ils font. Nous avons la chance de compter parmi nos clients des collectionneurs étonnants et c'est toujours un plaisir de pouvoir leur faire découvrir de nouvelles choses. Depuis le tout début, nous avons voulu soutenir les indépendants. Par exemple, François-Paul Journe est notre ami depuis 2001.

Lorsque mon frère Patrick était chez Les Ambassadeurs à Genève, il a été l'un des premiers à soutenir François-Paul. Vous pouvez imaginer comment c'était à l'époque—François-Paul apportant les toutes premières montres Tourbillon Souverain à la boutique sur son vélo ! Chez A l'Emeraude, nous avons continué à développer nos relations et nos affaires avec ces artisans horlogers et nous sommes sûrs de pouvoir continuer à en faire toujours plus avec eux.

 

Selon vous, quel est l'avantage d'une marque indépendante, du point de vue d'un client ?

Eh bien, je dirais d'abord qu'un client peut rencontrer l'horloger dont le nom est sur le cadran. Ce qui est également très intéressant avec ces marques est qu’on peut avoir un haut niveau de personnalisation. Je pense qu'aujourd'hui, de plus en plus, le client veut vraiment avoir quelque chose d'unique. 

Bien sûr, on peut avoir des pièces vraiment spéciales de marques comme Patek Philippe et Rolex. Avec les marques artisanales et indépendantes, cependant, c'est différent. On peut aller leur rendre visite. On peut rencontrer en personne Kari Voutilainen, François-Paul Journe, Denis Flageollet et Romain Gauthier. 

Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

De plus, ce qui est fantastique chez certains de ces horlogers, c'est la façon dont ils font presque tout eux-mêmes. Quelqu'un comme Kari Voutilainen peut même fabriquer ses propres cadrans à Comblémine, sa fabrique de cadrans, comme le fait F.P. Journe avec les Cadraniers. Pour voir le chemin parcouru par ces marques aujourd'hui, leur succès basé sur une vision d'il y a des années, c'est tout simplement incroyable. Nous y croyons beaucoup, tout comme les collectionneurs. 

 

Pensez-vous que les innovations et la créativité de ces marques indépendantes sont aujourd'hui indispensables à la haute horlogerie mécanique ?

Bien sûr ! Les grandes marques seront toujours très importantes, mais nous avons aussi besoin des indépendants. Par exemple, Kari Voutilainen ne fabrique que 50 pièces par an ; il ne veut pas augmenter sa production alors qu'il pourrait avoir plus de succès ainsi. Et parce qu'il est heureux comme ça, il peut se concentrer sur des choses comme des montres à hautes complications et des pièces uniques, des choses qu'il a faites pour différents de nos clients. 

Nous avons une cliente qui est une grande fan des montres à tourbillon—elle en a une grande collection de presque toutes les marques. Après avoir acheté trois autres montres Voutilainen, elle lui a demandé de lui créer un tourbillon, ce qu'il a fait. C'est quelque chose de très spécial. La demande de nos clients est très forte, c'est pourquoi nous avons pu commencer à travailler avec les indépendants.

 

Il est très intéressant de constater que beaucoup de gens pensent que les marques indépendantes ne sont pas intéressantes pour le marché européen, mais votre expérience montre que ce n'est pas du tout le cas.

C'est aussi notre travail d'exposer nos clients à des marques indépendantes. Nous avons des clients qui s’adressent à nous pour nos marques les plus renommées—nous pouvons dire que certains d'entre eux sont des clients très importants de ces marques, ils sont donc très bien informés. Et pourtant, en même temps, ils ne connaissaient pas les marques indépendantes.

Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

Nous avons la chance d'avoir une équipe hautement qualifiée et passionnée par l'horlogerie en général. C'est essentiel parce qu'il faut des compétences et des connaissances spécifiques afin de présenter une montre réalisée par un horloger indépendant.

C'est ainsi que nous avons commencé à parler à nos clients de F.P. Journe, Voutilainen, Romain Gauthier et De Bethune, par exemple. Nous les avons amenés visiter ces marques. Ils ont vite compris ce dont il était question pour ces marques et c'est ainsi que tout a commencé pour eux.

 

Pourrait-on dire, cependant, que le public européen est peut-être plus réceptif au style classique de l'horlogerie ? Cela correspond aux montres de Kari Voutilainen, François-Paul Journe ou peut-être aux montres DB25 de De Bethune—alors que l'aspect avant-gardiste de la DB28 pourrait être un défi.

Je suis d'accord avec cela. On peut dire que préférer l'esthétique classique est un point de vue culturel. Je veux dire, la montre classique est intemporelle, c'est sûr, mais il est bon aussi d'avoir d'autres marques et d'autres montres qui adoptent un look plus futuriste. Non seulement elles sont plus modernes, mais elles sont aussi plus intéressantes. En termes de design, nous avons besoin de quelque chose de spécial et de différent ; je crois vraiment que nous en avons besoin dans notre industrie.

Un bijou de détaillant horloger suisse (partie 2)

Des événements récents comme la vente aux enchères Only Watch et le Grand Prix d'Horlogerie de Genève ont vraiment validé ce que les petites marques indépendantes font pour l'industrie.

Exactement ! C'est fantastique, et je suis très heureux que nous ayons ces marques indépendantes chez A l'Emeraude et que nous nous intéressions de près aux autres nouveaux venus—non seulement pour les représenter, mais aussi pour les soutenir d'autres manières.