Des talents qui forcent le respect

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Talents that command respect - Bovet 1822
En novembre dernier, Bovet a ouvert pendant une semaine les portes du Château de Môtiers aux collectionneurs, clients et journalistes pour un « Masterclass » en horlogerie, peinture et gravure. Une expérience édifiante.

Acheté en 2006 par Pascal Raffy, propriétaire de Bovet 1822, le Château de Môtiers domine depuis son éperon rocheux les douces dénivellations du paysage du Val-de-Travers. C’est dans une aile de cet ensemble architectural du XIVème siècle, entièrement restauré, que sont logés les ateliers d’emboîtage et de décoration, ainsi que les services administratifs de la Maison. Nous allons y passer une journée complète, au premier étage, à découvrir les activités d’horlogerie, de peinture miniature et de gravure de Bovet 1822.

Des talents qui forcent le respect

Horlogerie

L’atelier d’horlogerie du Château de Môtiers accueille des horlogers pour l’emboîtage, le réglage et le contrôle des mouvements de haute horlogerie logés dans les garde-temps Bovet. Ces mouvements sont conçus et développés à la Manufacture Dimier 1738 de Tramelan (canton de Berne), acquise en 2006 par Bovet, à une soixantaine de kilomètres du village du Val-de-Travers.

Des talents qui forcent le respect

Le Masterclass débute par un exercice d’horlogerie en deux étapes. La première consiste à visser quatre minuscules vis de tailles différentes dans les trous correspondant sur une platine.  Un énoncé des plus simples, mais une réalisation qui peut vite virer au cauchemar. A commencer par la prise en main de la brucelle, et surtout, la saisie de chaque vis, idéalement dans le sens le plus adapté pour pouvoir la poser à la verticale dans le pas de vis. Patience, détermination et calme sont de mise. Mais ne suffisent pas toujours. L’étape 1 s’achève au mieux quand toutes les vis sont posées, au pire, faute de combattantes, quand elles ont toutes disparu de l’établi, pincées trop fort par la brucelle et catapultées Dieu sait où.  L’étape 2 est plus intéressante. Schéma à l’appui, l’élève horloger doit dévisser le pont de rouage d’un mouvement afin de libérer les 4 roues du système de remontage, puis remonter le tout. Exercice presque réussi, mais on ressort de cette expérience d’une dizaine de minutes avec l’impression d’avoir les yeux qui nous sortent de la tête et la main tétanisée à force de scruter à travers la loupe de l’horloger et d’essayer de saisir les minuscules composants.

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Peinture miniature

L’exercice de peinture s’annonce comme le plus ludique et devrait nous faire remonter dans notre propre estime. Après tout, on a tous tenu un pinceau entre nos doigts, mélangé des couleurs et colorié une forme (ici un papillon) en essayant de ne pas dépasser les contours du modèle, même si la dernière expérience remonte à l’école enfantine. Bien sûr, personne n’a la prétention de rivaliser avec les créations du maître-peintre, mais tous les élèves s’appliquent pour réaliser le plus beau papillon, sentant le défi à portée de pinceau.  Le maître-peintre nous a préalablement montré son catalogue des créations. Des dizaines de peintures d’une incroyable précision dans leurs détails, exécutées à la perfection avec des teintes des plus harmonieuses, d’innombrables portraits commandés par les clients, individuels ou de famille, une splendide tête de tigre… 

Des talents qui forcent le respect

Chez Bovet, la peinture miniature se fait principalement sur des cadrans en nacre et selon la technique de la laque polie, qui a toutes les qualités de la laque de Chine, permet une excellente définition des détails et offre une résistance aux chocs supérieure à celle de l’émail. « J’utilise des laques de dernière génération, fabriquées en Suisse », explique le peintre. « Elles sont biodégradables et ont subi de nombreux tests de résistance. Un des avantages de cette laque est de cuire dans un four traditionnel, à une température comprise entre 90° et 140° ». Voilà pour le côté technique. La qualité artistique des réalisations du peintre s’est quant à elle nourrie de son expérience de 25 ans dans la peinture miniature et de son talent de dessinateur et de coloriste. Nos papillons attestent du chemin à parcourir pour atteindre son niveau.

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Gravure

La gravure est présente chez Bovet depuis les tout premiers garde-temps d’Edouard Bovet, au début du XIXème siècle. Le fondateur de la Maison donnera notamment à la gravure des mouvements une nouvelle impulsion, faite de détails subtils, et innovera en l’exécutant sur toutes les surfaces possibles des composants pour créer un nouvel effet tri-dimensionnel. Aujourd’hui, tous les mouvements des garde-temps Bovet sont gravés à la main. Mais les trois artisans graveurs de Bovet exercent leur art également sur les cadrans, boîtiers, réhauts, lunettes, carrures et bélières. Formé à une école de gravure, le jeune artisan du Château de Môtiers qui nous servira de professeur (photo en haut de page) a également suivi une formation artistique pour apprendre le dessin et la peinture. En effet, à côté des motifs traditionnels « fleurisanne » et « bris de verre » fréquemment utilisés sur les garde-temps Bovet, le graveur doit également être capable de réaliser n’importe quelle gravure souhaitée par un client pour personnaliser sa pièce, qu’il s’agisse d’un simple nom, d’un portrait ou d’un motif décoratif plus élaboré. Burin (fabriqué par ses soins), petit marteau et compas sont ses outils indispensables. Ce dernier révèle le respect de la tradition artisanale chère à Bovet : « Lorsque vous devez décorer la carrure d’un boîtier de 24 gravures « fleurisannes », le compas est indispensable pour les disposer à intervalles réguliers, car aucun repère marqué sur le boîtier n’est autorisé », souligne le graveur.

Des talents qui forcent le respect

L’exercice de gravure a laissé plus d’un élève du jour dubitatif et hésitant. Au contraire d’un pinceau, tenir un burin entre ses doigts et l’appliquer sur une surface n’est pas intuitif. Les dessins ne sont pas évidents, graver un simple cercle tient de l’exploit et les dérapages incontrôlés dus à une mauvaise position ou force inadaptée appliquée sur le burin dessinent des rayures peu esthétiques. Quant à l’utilisation du petit marteau sur l’extrémité du manche du burin pour creuser de petits motifs, encore faut-il avoir l’adresse requise pour ne pas frapper à côté lorsque vous avez les yeux rivés dans le microscope et que vous ne voyez pas vos mains. Au terme d’une expérience moins que concluante, on contemple sans comprendre le boîtier en or décoré de volutes fleurisannes déposé à côté de nous. Mais comment font-ils ?

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