1. La montre, héritage posthume de Gabrielle Chanel
Gabrielle Chanel décède en 1971. Elle laisse derrière elle un héritage fait de haute couture, parfums, cosmétiques, joaillerie, maroquinerie. Mais pas de montres : « Coco » était née en un temps (1883) où la montre ne se portait pas au poignet, traversant deux Guerres Mondiales, avant de voir sa mécanique disparaître au profit d’une technologie disruptive (le quartz). Qui plus est, Karl Lagerfeld est nommé Directeur Artistique en 1983 et imprime immédiatement une griffe très couture, ADN de Chanel. Il faudra donc attendre quatre ans de plus (1987) pour que Chanel dévoile sa première collection de montres. Son nom ? Première ! Elle est toujours en catalogue.
2. Une entité aussi méconnue qu’essentielle : Paraffection
Une rue déserte, quelques hangars dans une zone peu aguichante de Paris. Et pourtant, c’est un écrin d’exception au cœur de la Ville Lumière. Son nom : Paraffection. Inconnue du grand public, créée en 1997, filiale de Chanel, elle regroupe tous les métiers d’arts sur lesquels reposent ses créations. Une initiative doublement louable, pour deux raisons. D’abord, parce qu’en les rachetant et en les regroupant, Chanel met à l’abri (de la banqueroute, de financiers) ces fragiles ateliers peu armés face au capitalisme. Ensuite, parce que Chanel leur laisse entière liberté pour continuer à travailler pour des marques extérieures, stimulant leur créativité. Un cas d’école.
3. Vous avez dit J12 ?
Son nom est presque entré dans le langage courant. La J12 est la montre iconique de Chanel. Mais d’où vient son nom ? Jacques Helleu, entré chez Chanel en 1965, l’explique dans l’ouvrage consacré à la pièce : « J’allais voir s’entraîner des bateaux sur le bassin de Hyères. Leur nom de code (des classes J de la Coupe de l’America de l’époque, rachetés aux Etats-Unis pour l’entraînement des équipiers) était des… J12. Le concept est resté dans ma mémoire, mais je ne peux pas exclure, pour les codes de cette « J12 » le souvenir du dernier bateau de Giovanni Agnelli. L’ « Avvocato » avait joué le noir, de la coque au mât, en passant par les voiles et l’annexe. Noir symbole de force et d’énergie ». Raison aussi pour laquelle la J12 s’exprime presque exclusivement en noir ou en blanc.
4. Inévitable Vendôme
Le 18 novembre 1997, l’hôtel particulier du 18 place Vendôme est inauguré. Pour l’ouverture de ce nouvel écrin dédié aux collections de joaillerie et d’horlogerie, la collection de Haute Joaillerie 18 Place Vendôme est présentée. Mais c’est aussi la géométrie de la place Vendôme qui inspirera une célèbre montre Chanel présentée presque 20 ans plus tard : la Boy-Friend, dont la boîte en reprend les contours.
5. Casser les codes
Aujourd’hui, la montre unisexe a le vent en poupe, favorisée par l’essor de la montre vintage qui a remis les diamètres modérés sur le devant de la scène. Pourtant, cela fait 20 ans que Chanel la pratique. En 2000, la J12 est déjà unisexe, en céramique noire. La Boy-Friend, lancée en 2015, l’est aussi, notamment dans ses versions Moyen et Grand modèle. Une anticipation souvent oubliée.
6. Une montre de plongée...signée Chanel !
Beaucoup l’ignorent, mais la J12 s’est aussi illustrée...comme montre de plongée ! La J12 Marine effectuait ainsi, en 2010, un retour aux sources qui lui donnèrent son nom. Une pièce particulièrement bien pensée qui n’a malheureusement pas connu le succès qu’elle méritait. Le nouveau Millenium Watch Book, à paraître dans les prochaines semaines mais déjà en pré commande, réparera cette injustice !
7. 35 ans de Chanel Horlogerie...et 75 ans de Chatelain
Il y a bientôt 30 ans, en 1993, Chanel acquiert G&F Châtelain SA à La Chaux-de-Fonds (appelée aujourd’hui Manufacture Chanel). Il n’y a donc que six ans entre la première montre Chanel et l’avènement de sa manufacture. Une rapidité qui témoigne de la confiance que Chanel mettait déjà en son horlogerie. Chatelain s’est spécialisé en boîtes, bracelets et sertissage, depuis complété d’un atelier de céramique. Comme pour Paraffection, Chanel a laissé à Chatelain la possibilité de travailler pour d’autres maisons afin de nourrir sa créativité.
8. Une seconde entité manufacture : Kenissi
Qu’est-ce qui relie Tudor, Breitling et Chanel ? La réponse réside dans ce nom, Kenissi. En grec, il signifie ‘en mouvement’. L’entité est née à l’initiative de Tudor en 2010, rejointe en 2016 par Breitling et deux ans plus tard, en 2018, par Chanel. Ces trois marques portent ainsi une manufacture décentralisée, ouverte comme l’aime Chanel, spécialisée dans les mouvements de haute précision. Le premier calibre Chanel issu de cette collaboration est le 12.1, qui équipe la nouvelle J12 automatique.
9. L’empreinte Marino
En 2003, Chanel expose pour la première fois son horlogerie à Baselworld, alors plus grand salon horloger au monde. Le stand est d’une imposante sobriété, déployé dans d’immenses volumes et uniquement habillé de noir et de blanc. En réalité, ce stand n’est pas un acte isolé : il est l’œuvre de l’architecte newyorkais Peter Marino, qui signera l’année suivante la boutique Chanel de Ginza, puis celle de Tokyo, rénovée en 2017, mais aussi quantité d’autres boutiques, comme à Istanbul, Chicago, Hong Kong, Los Angeles, Nanjing, New York, Miami, Osaka, Seoul, Singapore, etc. Chanel et Marino, deux noms indissociables.
10. Un studio dédié
En 2013, Chanel décide d’offrir une certaine indépendance créative à ses montres, en créant son propre Studio de Création Horlogerie. La direction en est confiée à Arnaud Chastaing. L’homme aura passé les dix années précédentes chez Cartier, exactement au même poste, mais plus spécifiquement en charge des montres de joaillerie et haute joaillerie. « Il n’y avait qu’une Maison qui pouvait me faire quitter ce poste, et c’était Chanel », déclarait l’intéressé en 2019.
11. GPHG : une longue route finalement couronnée de succès
Chanel a plusieurs fois participé au Grand Prix de l’Horlogerie de Genève (GPHG). La première tentative remonte à 2005, avec la J12 Tourbillon ainsi que J12 Superleggera. Aucune des deux ne passera les nominations. Chanel retente l’année suivante avec une J12 Haute Joaillerie...sans plus de succès. Même chose de 2007 à 2012, année où la marque obtint enfin le prix de la montre féminine pour son somptueux Tourbillon Camélia. Dès lors, les choses s’accélèrent, avec des prix en 2013 (Métiers d’Art), 2016 (Montre Joaillière), suivi d’un improbable triplé Montre Féminines en 2017, 2018 et 2019 ! Trois victoires, trois ans de suite, dans la même catégorie, est sans précédent au GPHG.
12. Le lion, totem horloger
Toutes les montres à calibre manufacture, comme le Calibre 1 sorti en 2016 sur la Monsieur, sont ornées d’un sceau à tête de lion. C’est l’animal fétiche de Gabrielle Chanel, qui déclarait : « Je suis lion et comme lui je sors mes griffes pour éviter que l’on me fasse mal (…) mais croyez-moi, je souffre plus de griffer que d’être griffée. » Sa tombe est ornée de cinq têtes de lion et les collections qui portent son nom sont toujours très nombreuses : Sous Le Signe Du Lion, Constellation Du Lion, etc.
