Interview de Thierry Stern, 2ème partie

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Interview with Thierry Stern, part 2 - Patek Philippe
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Dans cette deuxième partie de l'interview, Thierry Stern parle de l’avenir et de la nouvelle manufacture… et se rend compte qu’il a oublié de s’y réserver un espace pour son bureau !

Vous avez beaucoup investi dans vos grandes expositions itinérantes aux quatre coins du monde. Pour quelle raison ?
Je pense que se reposer sur ses lauriers est une grosse erreur. On ne peut pas se contenter de ses clients actuels ; il faut sortir et aller en chercher de nouveaux. Quand on a des produits comme les nôtres, il est important de les montrer. Nous avons tant à dire et à montrer que ces expositions étaient tout à fait justifiées. Cette organisation à si large échelle nous a permis d’accueillir nos clients existants mais aussi une génération plus jeune et désireuse d’apprendre. Ce fut un gros investissement qui nous a pris deux ans de préparation, y compris du temps pour choisir les lieux adéquats, qui sont primordiaux. Mais ce fut un énorme succès. Et il reste des retombées résiduelles dans les pays où les expositions ont été organisées ; des gens ont découvert un monde qu’ils ne connaissaient pas.

Pour l’avenir, vous avez aussi un très important projet, votre nouvelle manufacture. Quand sera-t-elle opérationnelle ?
Elle devrait être terminée en septembre 2018, ou disons plutôt pour la fin de l’année, car on sait qu’il y a souvent des retards. C’est un très grand bâtiment de plus de 100’000m2, qu'il était important de mettre en oeuvre. Il s'est avéré plus facile et moins cher de le faire en une étape, car nous parlons quand même d’un investissement de 500 millions de francs suisses. Le bâtiment est autofinancé, ce qui est très important. Si nous l’avions réalisé en deux étapes, il nous aurait coûté deux fois plus cher. Malheureusement, et c’est semble-t-il une tradition chez Patek Philippe, chaque fois que nous construisons une nouvelle usine, il y a une crise ! Certains trouvent peut-être qu’elle est trop grande, mais je me souviens qu’un jour, en 1996, mon père m’avait emmené sur le site actuel de Plan-les-Ouates en me disant qu’on y serait encore dans trente ans. Quatre ans plus tard, on avait déjà déménagé la production des boîtiers.

Patek Philippe new building  Plan-les-Ouates

Cela signifie donc que comme vos montres, des parties de la nouvelle usine seront transmises à la future generation?
Exactement. J’envisage sérieusement de fermer certaines parties car nous autres humains avons horreur du vide, et si je les laisse ouvertes, des gens vont les occuper. Le nouvel espace va nous permette de rapatrier l’unité de production des boîtiers dans le même bâtiment, ce qui nous fera gagner beaucoup de temps perdu aujourd’hui en déplacements entre les deux sites. Même s’il ne s’agit que de 5 à 7 minutes de trajet, ce n’est pas efficace.
Dans un second temps, nous allons aussi ramener la production des composants de mouvements sous le même toit, toujours par souci d'efficacité. La troisième phase concernera le service à la clientèle, primordial, car il s’agit d’une des clés de la crédibilité de Patek Philippe. Nous sommes la seule marque capable de réparer n’importe quelle montre fabriquée chez nous depuis 1839, et cela vous donne une idée des stocks et des machines nécessaires pour cela. Nous devons aussi former nos horlogers et ceux travaillant dans les services après-vente Patek Philippe partout dans le monde. Tout cela nécessite de l’espace.
L’étape finale est la recherche, car il ne faut pas oublier que nous travaillons aussi énormément sur le développement de mouvements. Nous avons de nombreux projets dans ce domaine et nous avons besoin d’équipements high-tech. Et bien sûr, il nous faut aussi un restaurant d’entreprise pour que tous nos employés qui travaillent dur toute la journée disposent d’un endroit pour manger et se relaxer à midi. Par contre, ce que j’ai oublié dans tout ça, c’est de me réserver un espace pour mon bureau !

Quelle croissance attendez-vous pour Patek Philippe ?
Nous enregistrons une croissance régulière de 1 à 2% par année, mais ce n’est pas mon objectif premier. Ma priorité est la qualité, et à notre niveau de qualité, il n’est pas possible d’envisager de produire 100'000 montres par année, et de toute façon, ce n’est pas ce que je veux. Mon gros avantage est de ne pas avoir d’actionnaires sur le dos, et de pouvoir faire ce que bon me semble. J’aime ce que je fais et mon père m’y a bien préparé. Il est déjà passé par cinq crises et se souvient de certaines périodes où la moitié des détaillants ne venaient même pas à Baselworld. Cette année au moins, ils sont tous venus !

Patek Philippe Baselworld

 

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