L'accélération

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The Acceleration - Montblanc
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Après une étape de consolidation et de définition de ses gammes et objectifs, Montblanc accélère. La politique produit de la manufacture au flocon semble désormais bien tracée

La plupart des manufactures construisent leur route par itérations successives, sur le fondement de leur patrimoine, de leur histoire : développement de nouvelles gammes, extensions des usines, ouverture de boutiques, etc. Un chemin classique, progressif, maîtrisé. 

Rien ne saurait être plus éloigné de la route dessinée par Montblanc. Pour une première raison évidente : c’est, à l’origine, une marque spécialisée dans l’écriture. Non des moindres, si ce n’est la plus réputée au monde. 

Deuxième raison : Montblanc est une maison allemande, née à Hambourg en 1906. Elle n’a pas l’histoire ni le vécu helvétique, qui s’étire depuis la révocation de l’Édit de Nantes et qui a permis l’essor d’une horlogerie suisse, jusqu’au rôle central de Genève, devenue capitale mondiale de l’horlogerie par son commerce, ses instances, ses manufactures locales, sans même mentionner son Poinçon, son Grand Prix, etc. 

Enfin, troisième raison : les capacités manufacturières de Montblanc sont récentes, avec l’acquisition de Minerva en 2007. En réalité, bon nombre de « manufactures » suisses, même parmi les plus prestigieuses, ne le sont devenues que par acquisition d’actifs externes. Mais très peu l’affichent comme tel. En réalité, pour s’en réclamer aussi ouvertement, il ne faut pas être natif de l’horlogerie. Ainsi du joailler italien Bulgari qui n’a jamais caché son entrée en Haute Horlogerie par la (grande) porte, celle du rachat de Gérald Genta et de Daniel Roth en 2000. Ou de Montblanc par le rachat de Minerva en 2007. 

Quatre faces pour atteindre le sommet de la chronométrie

C’est en comprenant ces trois traits distinctifs (une marque d’écriture, berlinoise, très récente manufacture) que l’on comprend la trajectoire horlogère de Montblanc. Et pourquoi sa politique produit connaît une telle accélération aujourd’hui : ce n’est que depuis peu qu’elle peut s’individualiser. 

Du flocon à l'encreur

En effet, il y a encore 25 ans, l’horlogerie découlait de l’écriture. La marque horlogère Montblanc est née en 1997. L’objectif était alors de commercialiser des montres en complément des stylos et de la maroquinerie. Montblanc Montres SA est créée cette année et s’offre villégiature dans un somptueux manoir au Locle, édifié en 1906, comme la date de sa propre fondation. 

La première collection a un nom tout trouvé : Meisterstück. La deuxième aussi : Star, à l’image du flocon en forme d’étoile, emblème de la marque. Une fois que le public masculin est conquis, sort la Star Lady, suivie d’une Profile Lady qui fit long feu. Ces deux bases solides, Montblanc s’attaque à la montre sportive. Ce sera la Timewalker, très moderne et affutée qui, elle non plus, n’existe plus. Pourquoi ? 

Difficile à dire mais un (heureux) évènement n’y est peut-être pas étranger : la sortie, en 2008, du chronographe Rieussec. Le mouvement est manufacture, le cadran doté d’une personnalité aussi remarquable qu’unique. L’histoire derrière la pièce (invention du premier chrono-graphe par Nicolas Rieussec en 1822, un marqueur à encre des temps écoulés) est solide et convaincante. La pièce rencontre un fort succès (et continue en ce sens) mais ancre surtout Montblanc dans un univers qui va s’imposer à elle, celui de la Haute Horlogerie contemporaine, créative, et qui repose sur des fondamentaux historiques. Le marqueur est posé, la Haute Horlogerie Montblanc est posée, à l’époque portée par le brillant Alexander Schmiedt (nommé il y a 18 mois à la tête de Vacheron Constantin Amériques). 

Quatre faces pour atteindre le sommet de la chronométrie

Des choix assumés 

Mais la sortie du Rieussec n’est pas un acte isolé : elle est liée au rachat de Minerva à l’automne 2006 par Richemont, propriétaire de Montblanc. On comprend ainsi le tournant décisif des années 2006 à 2008. Les planètes sont désormais alignées, avec une manufacture intégrée, un patrimoine historique, et déjà une première pièce de Haute Horlogerie, le Rieussec, qui s’est imposé. 

Si la collection Montblanc Villeret 1858 voit le jour au même moment (2007), ce n’est en rien un hasard, mais la volonté de renforcer le trait de la Haute Horlogerie avec une vigueur assumée. La collection existe toujours, appuyée par une ligne « Heritage » dont le patronyme traduit la même intention. 

Aujourd’hui, plus personne ne discute ni ne dispute la légitimité de cette trajectoire. Certes, pour l’affirmer, il a fallu faire des choix, comme sacrifier la Timewalker ou ralentir le développement de pièces disruptives comme l’ExoTourbillon, les heures mystérieuse, ou des projets fous comme la Metamorphosis. Des choix difficiles mais nécessaires à la bonne clarté – et donc lisibilité – de la Haute Horlogerie Montblanc. Certains puristes vont jusqu’à demander la suppression des actuelles montres connectées de la marque, la collection Summit, ce dont chacun restera juge. 

Horizons alpins

Et demain ? Le nouveau dirigeant de l’horlogerie, Laurent Lecamp, reprend l’intégralité de cette trajectoire. Et compte naturellement la faire évoluer. Deux directions se dessinent. D’abord, le renforcement évident, attendu, du segment de la Haute Horlogerie vintage, inspiration Minerva. Ensuite, l’ouverture progressive vers l’univers de la tool watch. Le segment est très convoité, notamment dans l’esprit aéro, plongée, et surtout celui de la course auto. Mais Montblanc a une carte unique à jouer : celle de l’univers de la montagne, en lien évident avec son propre nom. 

L'accélération

La ligne Iced Sea ouvre cette voie, comme l’on ouvre une voie alpine. Une série limitée de 23 pièces verra le jour à Watches and Wonders Genève 2023, éditée en collaboration avec The Fine Watch Club. Une occasion unique à suivre de près sur laquelle nous reviendrons très prochainement.

Découvrez en avant-première la collaboration Montblanc x Fine Watch Club

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