Le Japon, là où le soleil horloger se lève encore et encore…

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En regardant vers l’Est, les yeux des horlogers semblent aimantés vers la Chine et sa région administrative spéciale Hong Kong. C’est toutefois oublier un peu vite le Japon, quatrième marché d’exportation à très forte culture horlogère

Cette année, Patek Philippe a jeté son dévolu sur le Japon pour son exposition thématique intitulée Watch Art Tokyo 2023. Un événement organisé en juin sur deux semaines qui a attiré pas moins de 60’000 visiteurs venus s’imprégner de l’univers de la marque, orchestré sur 2’500 m2. Autant dire que la Maison a placé la barre très haut avec cette exposition, la plus importante jamais organisée par Patek Philippe, accompagnée par le lancement de six séries limitées, dont deux premières mondiales techniques, et d’une riche collection de pièces de haut artisanat. Si la Maison genevoise, présente au Japon depuis plus de 150 ans, n’a pas lésiné sur les moyens à l’occasion de ce Watch Art Tokyo, c’est que « ce marché est très important pour nous, notamment en raison d’une exigence de qualité très élevée », notait Thierry Stern, président de Patek Philippe. En d’autres termes, le client japonais est de ceux dont il faut « savoir gagner le respect » !

© Watch Art Tokyo 2023
© Watch Art Tokyo 2023

Soutien économique

Mais ce qui est vrai pour Patek Philippe l’est également pour l’ensemble du secteur horloger helvétique. Et pour cause, le Japon et ses 125 millions d’habitants occupent la fort enviable quatrième place des marchés d’exportation de la branche, derrière les États-Unis, la Chine et Hong Kong. Or il s’agit là d’un pays largement passé sous silence lorsque l’on parle des gardiens du temps helvétiques. En évoquant l’indispensable moteur asiatique de la croissance horlogère, c’est d’abord et avant tout vers le dragon chinois que les yeux se tournent immanquablement, sans oublier Hong Kong, sa région administrative spéciale qui revient clairement sur le devant de la scène. Mais du Japon, fort peu de traces.

© Watch Art Tokyo 2023
© Watch Art Tokyo 2023

Le pays est pourtant de ceux qui comptent, d’autant qu’avec la culture horlogère qui est la sienne et son niveau de développement économique, il affiche une constance en rien comparable aux soubresauts de son voisin chinois. Sur les 10 premiers mois de l’année, les horlogers suisses ont ainsi enregistré une croissance de leurs expéditions vers le Japon de 5,5 % par rapport à la même période de 2022, ou encore de 25,9 % comparativement à 2021. De son côté, la Chine est en hausse de 9 % cette année mais en baisse de 5 % sur deux ans. Certes, tout n’est pas rose au pays du Soleil levant, notamment au niveau de son endettement qui atteint 260 % du PIB ou de sa démographie vieillissante. Il est toutefois à relever que l’économie du pays est probablement la seule parmi les pays développés à encore bénéficier d’une politique monétaire ultra-accommodante, assortie d’un plan de relance massif, qui vient d’être annoncé par le gouvernement, à hauteur de 100 milliards d’euros visant à alléger le poids de l’inflation et la chute du yen sur le pouvoir d’achat.

Un marché mature

Dans ces conditions, le client japonais est très certainement de ceux qui valent la peine d’être courtisés. Mais en tenant compte de ses particularités ! Selon une étude Agility Research & Strategy, il apparaît clairement que les clients de l’Archipel ont des comportements souvent radicalement différents de ceux de leurs voisins. Pour commencer, le Japon est un pays de « department stores » avec une faible proportion d’achats effectués en ligne. En témoigne le récent centre commercial haut de gamme Ginza Six à Tokyo qui accueille près de 250 enseignes, restaurants et autres activités de loisirs. Ou encore la place occupée par Tokyo en tête de liste des destinations mondiales pour le shopping du luxe selon les données 2023 du voyagiste sur mesure Lartisien. De plus, les Japonais acquièrent des produits de luxe d’abord et avant tout pour leur qualité et par conviction personnelle. Rien à voir avec un quelconque statut social et encore moins avec les conseils « avisés » des influenceurs. L’expérience client y est en revanche hautement privilégiée, souvent sous forme d’un véritable rituel.

Ginza Six, the most historical commercial district of Tokyo © Ginza Six
Ginza Six, le quartier commercial le plus historique de Tokyo © Ginza Six

La culture horlogère des Japonais y est certainement pour quelque chose. On ne saurait oublier que Seiko est un horloger dont les origines remontent à 1881 et que Grand Seiko est en train de se faire une place respectée au niveau international. On ne saurait davantage passer sous silence les horlogers créateurs japonais comme Hajime Asaoka ou Masahiro Kikuno, tous deux membres de l’Académie horlogère des créateurs indépendants (AHCI), qui attestent d’une maturité remarquable du marché. Inutile de prolonger la liste des Maisons nipponnes qui font clairement partie du paysage international. Le Japon est un site de production horlogère à même de stimuler la concurrence comme il le fit en 1969 à l’aube de la technologie du quartz. Aux Maisons horlogère du Vieux continent de relever le gant ! 

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