Entrez dans la troisième dimension

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3D
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Elle n'a rien de fantastique au sens cinématographique. Ceci n'est ni la quatrième dimension, ni la cinquième, mais simplement celle de la profondeur de champ. Et ce monde est déjà extraordinaire

C'est beau, un mouvement, vous ne trouvez pas? Toutes ces formes, ces courbes, ces structures. Elles sont comme un tableau. Mais s'il n'existe pas de hiérarchie entre peinture et sculpture dans le monde de l'art, aucune n'étant supérieure à l'autre, le parallèle ne tient pas pour l’horlogerie. Un mouvement est plus beau quand il a de la profondeur. Je ne veux pas parler ici de quelques millimètres de décroché. Ni d'effets de lumière, pourtant délectables, à la surface d'un pont. Non. Je veux parler de profondeur. De gouffres. D'anfractuosités. D'un monde où hauteur, largeur et longueur sont sur un pied d'égalité. Où ils créent une aspiration du regard vers le centre, vers le fond, vers l'autre côté même, à travers le fond...c'est à dire jusqu’à la peau.

La mise en profondeur d'un calibre suppose que l'on mette de côté le cadran. On peut en garder de petits bouts, de petits cercles, une minuterie, une petite seconde, mais il faudra alors les préférer transparents. Discrets. Quand on va au théâtre, on n'a pas envie d'avoir une tête devant soi. On veut voir la scène. Eh bien l'horlogerie est un spectacle. Elle se met en situation. Crée des lieux hypothétiques où la platitude n'a pas droit de cité. Elle provoque l'élargissement des perspectives. Dans ce monde-là, la montre ne donne pas l'heure, mais le tournis. Elle n'indique pas la date, mais l'ailleurs. Bref, il n'y a pas de meilleur moyen pour se perdre que les entrailles d'un calibre travaillé jusqu'au fond.

Reste la question des moyens, car sans facture l'intention n'est rien. De là, deux options. La plus évidente, le squelettage. Il suppose d'emblée la disparition du cadran et c'est une bonne chose de faite. Après, tout est question d'ambition. Quelques percements façon bricolage à la maison ? Ou un bouleversement urbanistique ? Une platine ajourée timidement? Ou une redéfinition des principes structurels? On préférera ici la dentelle, celle qui ouvre assez les surfaces pour libérer l'accès à celles qui, sous-jacentes, n'attendent que d'être admirées.

La seconde option, et elle est plus rare, c'est la création d'un appendice vertical d'indication. La pose d'une tourelle, dotée d'aiguilles sous une forme ou une autre. Elle communique avec une base dissimulée et monopolise le regard. La manière dont les calibres à heures vagabondes d'Urwerk sont agencés en est un exemple emblématique, par sa longévité, par sa diversité et par les modalités esthétiques que la marque y injecte avec un sens du renouvellement consommé.

Urwerk UR-120 © David Chokron/WorldTempus
Urwerk UR-120 © David Chokron/WorldTempus

Les calibres de la grande famille des Astronomia, chez Jacob & Co., en est une autre, qui montre une infinie variété d’environnements. La base qui sépare le satellite de ses soubassements est souvent sertie. Le calibre peut être entrelacé de créatures mythiques sous forme de sculptures peintes. Et les complications portées par les bras du satellite vont de la fleur à l'astronaute en passant par la totalité du répertoire des pierres précieuses.

Jacob & Co. Astronomia Revolution © David Chokron/WorldTempus
Jacob & Co. Astronomia Revolution © David Chokron/WorldTempus

La liste ne serait pas complète ici sans citer Trilobe. La marque s'appuie sur un calibre plein et solide. Mais à l'occasion de la création d'Une Folle Journée, elle s'est élevée vers de nouvelles perspectives. D'abord, il a fallu séparer distinctement les trois anneaux d'indication qui font sa spécificité. Ensuite, chacun a été logé à une altitude différente. Ajoutons à tout cela un excentrage naturel et la Une Folle Journée prend des airs d'instrument de mesure astronomique antique, un astrolabe mystérieux.

Trilobe Une Folle Journée © David Chokron/WorldTempus
Trilobe Une Folle Journée © David Chokron/WorldTempus

Toute création volumétrique horlogère trône sous un grand verre saphir bombé. Une oeuvre d'art a besoin d'un cadre... mais aussi d'un verre. Pour être discret et souligner ce qu'il protège, il doit l’accompagner dans sa courbe. Et prendre la forme d’un dôme...en 3D donc.