Prendre des risques et repousser les limites

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Taking risks and pushing limits  - Bulgari
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Lors de la première LVMH Watch Week à Dubaï, Antoine Pin parle de stratégie avec WorldTempus et révèle la ressource la plus précieuse de la marque.

Le directeur de la division horlogerie de Bulgari, Antoine Pin, a rejoint la société en automne 2019, apportant avec lui son immense expérience pour peser sur la future direction de l’une des marques aujourd’hui les plus enthousiasmantes de l’horlogerie moderne. Lors de la première LVMH Watch Week à Dubaï (une ville également à l’orée d’une année passionnante puisqu’elle accueillera l’Expo universelle 2020), il a partagé avec WorldTempus ses visions profondément stratégiques sur les forces fondamentales de la marque et ce qu’il leur réserve.

C’est la première fois que Bulgari participe à un tel événement – organisé sur un marché régional, tôt dans l’année, exclusif au groupe LVMH – quel en est à votre avis le plus gros avantage ?
Pour moi c’est une façon très efficace de travailler. Nous avons la possibilité de nous rencontrer dans cet environnement très privilégié, nous pouvons nous voir en tête à tête, nous pouvons en tirer le maximum. Comme nous sommes très concentrés sur le produit, un événement comme celui-ci nous permet de ne plus être contraints par le cycle annuel des affaires. Je vais vous donner un exemple. J’aime être en mesure de lancer des produits en janvier ou février, cela fait sens de présenter quelque chose comme une montre-bijou intéressante en janvier, à temps pour le Nouvel An chinois. Mais en amont, cela signifie que la production doit être terminée en novembre, voire en octobre, afin d’être prête pour le lancement. Par conséquent, janvier n’est pas le premier mois de l’année, ça ne l’est plus. C’est le dernier mois du cycle précédent. En termes de production, cela nous permet de penser de cette façon. Nous pouvons opérer sur des cycles de production d’une durée de 18 mois ou même de 24 mois et disposer de notre propre événement nous permet de présenter les choses quand nous le voulons, lorsque nous sommes prêts, lorsque cela nous convient.

Prendre des risques et repousser les limites

Vous avez mentionné votre capacité à vous adresser aux marchés à différents moments, en fonction de ce qui convient à leur calendrier, le Nouvel An chinois par exemple. Donc Bulgari, grâce à son identité très forte, doit avoir des relations différentes avec chaque marché. La façon dont Bulgari est perçu et interagit avec ses clients en Australie par exemple n’est pas la même qu’en Chine ou à Dubaï. Pouvez-vous nous en dire plus sur les avantages de cette approche comparée à une expérience plus homogène ?
Je crois que votre question fait référence à la façon dont nous sommes fortement connectés à nos marchés, à nos clients, et à comment cela est un élément moteur pour nous. En même temps il faut assurer une certaine continuité à notre image et à notre niveau de service. Et c’est là que se situe le plus grand défi pour nous. Il y a une certaine contradiction entre la proximité avec chaque marché et le niveau de direction globale imposée. Mais la continuité fera partie de l’héritage de la marque, ce qui est un processus à long terme. Cela signifie que vous pouvez avoir des stratégies locales spécifiques tout en conservant une vision globale. C’est là que le concept « glocal » (combinaison de « local » et « global ») prend tout son sens. Avant, lorsque j’étais basé sur un marché au lieu d’être au siège, j’estimais que mon travail était de m’assurer de montrer le bon profil de la marque. Je crois encore que c’est le cas. Nous pouvons parler de la marque de la même façon que nous parlons des gens en tant qu’individus. La même personne peut avoir plusieurs profils différents. Vous ne me parlez pas de la même façon que vous parlez à votre famille ou à votre équipe. Et c’est complètement normal. Bulgari est toujours la même marque, mais avec des profils différents lorsque nous nous adressons à des publics différents.

C’est comme regarder les différentes facettes d’un bijou, une façon appropriée de parler d’une marque joaillière.
Oui, et c’est exactement l’équilibre que nous souhaitons atteindre. C’est le rôle de chaque responsable de marché que nous avons chez Bulgari. L’élément clé c’est qu’ils soient d’excellents communicateurs, capables de faire passer le message de la marque dans des situations différentes, des langues différentes, à la fois littéralement et métaphoriquement.

Vous avez fait allusion à vos expériences passées avant de rejoindre Bulgari et je voulais vous demander quel est, selon vous, l’aspect essentiel de votre poste précédent qui vous permettra de mener à bien votre future stratégie pour Bulgari ?
Je suis désolé, je suis conscient que cela semble vraiment évident, mais pour moi c’est la faculté de revenir à l’essentiel. C’est l’élément le plus important dans tout ce que nous faisons, ce qui paraît simple, mais en réalité ne l’est peut-être pas tant que ça. L’essentiel pour moi se résume à cela. Il y a la production, c’est-à-dire nos produits, et cela remonte aux personnes qui sont en charge de notre développement et de notre fabrication. Nous voulons les inspirer, leur donner l’espace de prendre des risques et d’oser, de prendre l’initiative et d’être créatifs. C’est que qui apporte de la passion à la marque. Nous avons de la chance d’avoir un CEO (Jean-Christophe Babin) qui nous donne la possibilité de faire tout cela.

Je suis heureuse que vous parliez des gens de Bulgari parce que nous savons, bien sûr, que vous avez chez vous un talent extraordinaire, Fabrizio Buonamassa, qui s’occupe de tous les produits créatifs de la marque. La chose la plus importante qu’une marque peut faire c’est de savoir comment et quand soutenir les gens qui tirent le meilleur parti de leurs produits.
Exactement. Et cela va des gens à la manufacture jusqu’à ceux qui font une différence en notre faveur dans les boutiques. Comment leur donne-t-on les outils et le soutien nécessaires pour tirer le meilleur de ce qui est finalement fourni au client ? Les produits et l’expérience. Finalement ce sont des gens qui travaillent pour nous. Donc il est important de garder cela en tête tout le temps : prenons-nous réellement des risques ? Des risques calculés, naturellement, nous restons une entreprise après tout. Sommes-nous assez audacieux, repoussons-nous les limites suffisamment loin, faisons-nous assez d’efforts nous-mêmes pour créer de l’enthousiasme chez nos clients ? C’est la notion centrale du luxe.

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