Enquête : développement durable, l’atypique cas IWC

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Sustainable Development And The Unusual Case Of IWC - IWC Schaffhausen
Depuis plus de 10 ans, IWC progresse en relative discrétion en matière de Développement Durable. Ses résultats semblent sans équivalents dans l’industrie. Un leader encore trop isolé ? WordTempus mène l’enquête.

En janvier 2006, nous consacrions un article au développement durable en horlogerie. Le thème n’était pas tabou...mais presque. En ce temps, avoir une ruche ou utiliser du papier recyclé pour ses catalogues faisait de soi un pionnier de l’écologie. Sans compter, il y a 15 ans, que l’immense majorité des marques ne souhaitait pas répondre à nos questions – probablement faute de se les être posées.

En 2021, la donne a heureusement changé. LVMH, Richemont et le Swatch Group étant des groupes cotés, il y a obligation de consacrer une section de leur rapport annuel au Développement Durable. Toutefois, en termes de marque (et non de groupe), le cas d’IWC est véritablement à part.

Enquête :  développement durable, l’atypique cas IWC

En 2006, la manufacture de Schaffhausen était déjà aux avant-postes. Elle subventionnait à hauteur de 80% ses salariés qui prenaient les transports en commun, accordait une prime à l’acquisition de véhicules peu polluants, et contribuait même à la pose d’installation d’énergies renouvelables (type panneaux solaires) au domicile de son personnel.

Aux sources du développement durable

Pendant 15 ans (2002 – 2017), George Kern fut l’une des chevilles ouvrières de cette stratégie. Christoph Grainger-Herr, actuel CEO, poursuit et amplifie la démarche. Et les résultats sont là, toujours loin, très loin devant ce qui se fait en d’autres maisons horlogères.

Enquête :  développement durable, l’atypique cas IWC

La marque emploie actuellement 554 personnes à son siège de Schaffhausen, 232 au sein de la manufacture à proprement parler et 557 dans ses boutiques et filiales dans le monde, soit un total de 1343 salariés. Actuellement, IWC affiche un réseau de 170 boutiques en propre et 900 points de vente externes – sans compter les points de vente éphémères, une vingtaine en 2019.

Ces chiffres n’ont pas qu’une valeur statistique. La manufacture entend que toutes ses boutiques en propre, en 2022, soient pourvues à 100% d’énergie verte. Au siège, cela passe par les installations de la marque (panneaux solaires et énergies renouvelables). IWC a même son propre arrêt de bus, synchronisés avec les heures de roulement de son personnel.

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2020, année charnière

En 2017, IWC s’est imposée une feuille de route ambitieuse de trois ans en matière de Développement Durable – lequel inclut également quelques variables sociétales, comme la parité. La marque s’est donnée pour objectif d’être de nouveau certifiée par le RJC (Responsible Jewellery Council), de réduire ses émissions de gaz de 10 %, ses emballages de 30 %, ou encore de doubler la proportion de femmes à des postes de direction.

On trouve également le souhait d’atteindre la parité hommes – femmes dans la distribution des formations, ou encore de réduire l’absentéisme de 10 % grâce à une promotion active du bien-être. Enfin, IWC comptait doubler le nombre d’heures dédiées à des projets de volontariat – sur le temps de travail des salariés qui souhaitent s’y adonner.

« Nous avons atteint la totalité de ces objectifs, à l’exception de celui doublant le nombre de femmes à des postes de direction », indique la marque, qui s’appuie sur un comité RSE (Responsabilité Sociétale et Environnementale) de 10 personnes, dont une à plein temps.

Enquête :  développement durable, l’atypique cas IWC

2022, à marche forcée

Sur cette lancée, la marque poursuit donc de nouveaux objectifs. Le premier reste naturellement de parvenir à doubler cette proportion de femmes dans des postes de direction. Elle se donne également pour objectif d’avoir une infrastructure informatique plus vertueuse – un défi à destination des centres de données très énergivores mais également des habitudes bien ancrées dans l’industrie du luxe d’avoir toujours les gadgets dernier cri, notamment les smartphones, à rebours des recommandations exigeant d’avoir un cycle de vie le plus long possible de ses équipements.

En termes environnementaux, IWC ne sélectionne que les produits labellisés FSC (Forest Stewardship Council, appliqué aux forêts gérées durablement). En terme sociétaux, la manufacture se donne de nouveaux objectifs. Le premier est de parvenir à certifier une parité salariale complète. Le second, de maintenir sa place dans le classement « Great Place to Work ». Actuellement, IWC est la première manufacture horlogère dans ce classement mais également la seule. Selon nos informations, différentes marques auraient tenté d’accéder à ce classement convoité mais n’y sont pas parvenues.

Enquête :  développement durable, l’atypique cas IWC

La délicate question de l’approvisionnement

Reste les matières premières et leur approvisionnement responsable. La manufacture entend donc que la tête totalité de son or soit recyclé, mais également 70 % de son acier. Elle travaille pour cela en collaboration européenne avec Responsible Steel qui, comme le RJC ou le GRI (qui certifie les rapports RSE) permettent d’authentifier la démarche durable des entreprises qui y font appel.

Et les partenaires et prestataires ?

Pour être totalement vertueux, l’entreprise devrait également pouvoir compter sur un réseau de partenaires et prestataires dans la même dynamique sociétale et environnementale. Il n’existe actuellement pas véritablement de moyens contraignants de les engager dans une telle voie, si ce n’est le poids symbolique d’être « donneur d’ordres ».

IWC garde néanmoins cet objectif à long terme, celui d’être le moteur d’un écosystème horloger global responsable et éthique. L’efficacité de la marque de Schaffhausen pourra, on l’espère, engendrer un tel mouvement vertueux même envers les sous-traitants indépendants : ils forment encore ce vaste ensemble industriel qui échappe, lui, à toute publicité ou certification.

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