Parfois, il est nécessaire de ramener notre passion des montres à leur juste niveau. Certes, beaucoup aiment les grandes complications, les designs innovants ou les prouesses techniques. Nous sommes naturellement attirés par ce qui brille, par l’unique ou le sensationnel.
En visitant un salon automobile, la foule s’amoncelle devant les stands des marques les plus prestigieuses, se bousculant pour avoir une petite chance de s’asseoir sur des sièges en cuir Connolly ou pour tenir, ne serait-ce que quelques secondes, le volant d’un bolide de 1000 chevaux.
Pourquoi ? Pour rêver. Car toute passion est nourrie de rêve. Mais une fois que la passion est là, elle crée aussi une potentielle frustration. Combien d’entre nous aurons réellement l’opportunité de transformer le rêve en réalité ? Probablement très peu.
La passion horlogère est en tout point similaire. Les super-montres inatteignables trustent les podiums et font la une des revues horlogères. Elles sont belles, elles sont compliquées et elles sont – très – chères. Si on en parle beaucoup, on ne les voit que très rarement aux poignets de nos voisins, de nos amis ou de nos collègues. Elles vivent leur propre vie, quelque part dans le monde, mais peut-être pas dans le « vrai » monde.
Vous avez reconnu ici ces montres qui se targuent d’appartenir à la Haute Horlogerie. Cette façon de catégoriser les montres m’a toujours amené à me poser une question dérangeante : s’il existe une Haute Horlogerie, il y a forcément une Basse Horlogerie…
Et c’est justement notre propos d’aujourd‘hui.
L’industrie horlogère est souvent vue au travers du prisme déformant de la Haute Horlogerie et des montres inaccessibles.
Mais une fois les salons terminés, une fois ces pièces retournées dans leur coffre-fort, nous restons « seuls » avec nos poignets et les montres que nous pouvons nous offrir. C’est à ce moment précis que l’horlogerie devient réelle et tangible. Maintenant que le rêve – devrais-je dire le fantasme – est passé, vient le temps de nous intéresser aux montres accessibles, ces pièces que nous porterons dans notre vie de tous les jours et que nous aimerons parce qu’elles sont vraies.
Le temps est donc venu de faire face à une dure réalité : la montre reste un objet futile et la grande majorité de la planète n’en a rien à faire. Pour beaucoup, la montre doit être jolie et donner l’heure. C’est tout.
Mais pour nous, elle doit être un peu plus. Elle doit nous faire vibrer, elle doit nous aider à vivre notre passion et ne peut être « banale ». Pourtant, elle ne sera peut-être jamais une pièce de Haute Horlogerie. Elle n’aura ni tourbillon, ni grande sonnerie. Mais elle sera tout de même séduisante et accessible.
Je suis un grand partisan de cette horlogerie simple, facile, mais cependant exigeante. S’il est – à mon sens – facile de développer une montre exceptionnelle pour un prix exceptionnellement haut, il est bien plus dur de combiner innovation technique et valeur raisonnable. Certains regarderont cette équation avec dédain. Et c’est une erreur parce que c’est justement là que notre passion devient « humaine ».
Ce sont ces montres simples – mais jamais banales – qui entretiennent la passion. Ce sont elles qui nous éduquent et nous font souvent vivre nos premières émotions horlogères. Ce sont encore ces pièces qui participent à notre vie et construisent notre expérience horlogère. Finalement, elles sont le pilier de l’horlogerie « normale », celle que nous vivons partout et qui nous rassemble.
Il est temps de remercier ces marques qui nous offrent cette occasion unique de transformer le rêve en réalité. C’est pour cela que la Baume & Mercier Clifton Baumatic mérite notre attention et notre respect.
Pourquoi Baume & Mercier ?
Il y a presque 15 ans, pour mes 40 ans, ma femme m’a offert une Baume & Mercier Hampton Spirit, jolie pièce au design classique, solide et intemporel.
Après tout ce temps, la montre reste toujours aussi séduisante et facile à porter. Non seulement elle a passé les années sans encombre – ni panne – mais elle n’a pas vieilli ! Simple, raisonnable sans jamais sacrifier à la facilité ou à la banalité, voilà la grande force de Baume & Mercier, marque née en 1830 à Genève.
Si Baume & Mercier s’est d’abord fait connaître pour ses pièces féminines et ses montres à complications, elle a lentement fait évoluer son style. Son logo – la lettre grecque Phi – symbolise l’équilibre et c’est justement la recherche constante de la marque : équilibre entre innovation et classicisme, équilibre entre simplicité et sophistication ou équilibre entre style intemporel et capacité à s’adapter aux différentes époques.
Aujourd’hui, Baume & Mercier propose cinq collections qui couvrent un large spectre. La marque genevoise continue à célébrer l’horlogerie classique en proposant des montres simples, bien faites, mais jamais ennuyeuses. Elle ose sortir de certains sentiers battus avec des sportives colorées et tente même de sortir certaines grandes complications de leur tour d’ivoire !
La Baume & Mercier Clifton Baumatic Chronomètre : l’équilibriste
Durant le SIHH 2019, Baume & Mercier a proposé une nouvelle version de la Clifton Baumatic.
En 2018, la marque genevoise avait surpris le Salon genevois avec une montre animée par le Baumatic BM13-1975A, un nouveau calibre manufacture, offrant cinq jours de réserve de marche, une protection antimagnétique, le tout dans une boîte de 40 mm aux rondeurs séduisantes. Certains modèles avaient également une certification chronométrique, attestant de la qualité du mouvement. En 2019, c’est une version dotée d’un cadran bleu fumé qui vient se rajouter à la collection Baumatic. Si j’étais déjà séduit par les versions précédentes, je dois avouer que la Clifton Baumatic bleue se bat dans une autre catégorie.
En effet, le bleu dégradé offre une palette plus importante si vous souhaitez jouer avec votre montre. Son look est moins classique que les cadrans blancs et noirs et met en valeur les autres aspects de la montre, son boîtier arrondi, mais aussi les fins détails de son cadran.
Justement, un des plus intéressants éléments du cadran se trouve dans les lignes horizontales et verticales qui viennent le décorer. Ce design différencie les versions chronomètres des autres et donne une vraie « gueule » à la Clifton. Je ne sais pas par quelle magie ces lignes changent le jeu. Grâce à elles, les longs index semblent encore plus présents et le cadran prend soudainement plus de relief. Le tout est bien sûr renforcé par le gradient du bleu et notamment par la façon dont l’extérieur bleu presque noir permet aux chiffres indiquant les secondes de se distinguer.
Hormis ces détails fondamentaux, la Clifton Baumatic Chronomètre nous offre une date et un fond saphir vissé qui permet de jeter un coup d’œil aux finitions plus qu’honnêtes du BM13-1975A.
Notre version 2019 vient en deux déclinaisons, une montée sur un bracelet en alligator et l’autre sur un bracelet acier.
Voici donc une bien belle montre, facile à porter, qui allie élégance et possibilité de changer de style en fonction des goûts. Elle est dotée de charme, d’excellence technique et d’un vrai look. C’est l’exemple idéal d’une pièce qui met en avant la simplicité avant l’arrogance et qui met la belle horlogerie à la portée du plus grand nombre.
Qu’en pense l’avocat du diable ?
Pour lui, il n’y a rien de pire que de permettre à la passion de devenir raisonnable. La Baumatic est une montre trop humaine et trop sympathique pour qu’elle plaise à notre avocat du diable.
Mais plus sérieusement, même née avec autant de qualités, on peut tout de même lui faire quelques petits reproches, pas bien graves :
D’abord, la taille. Au cours du SIHH 2019, Baume & Mercier a aussi proposé une version en or rouge, dotée d’un boîtier de 39 mm. J’aurais aimé voir cette taille sur notre version bleue. Les lignes du cadran et la couleur bleue donnent un style plus vintage à la Clifton et une taille de 39 mm serait peut-être plus appropriée.
Ensuite, le bracelet. Le bracelet en alligator semble être une figure imposée pour les montres classiques et c’est une erreur. Je m’imagine cette Clifton Baumatic Chronomètre sur un bracelet plus simple, en veau velours gold ou marron. Cela aurait encore plus de style !
Comment porter cette Baume & Mercier Clifton Baumatic Chronomètre avec style et simplicité ?
Tout est dit. La Clifton Baumatic Chronomètre n’a pas besoin d’excès et de sophistication. Il lui faut du joli, du classique et du bien fait. On peut la porter aussi bien de manière habillée ou décontractée. Mon choix préféré reste la seconde façon, plus adaptée à l’ambiance – et au temps – de la Californie !
Commençons par enlever le bracelet.
Comme celui-ci est proposé avec un dispositif de changement rapide, il faudra vous procurer de nouvelles pompes de 20 mm. Après, à vous de faire jouer votre créativité : pour ma part, je trouve mon bonheur chez Bulang & Sons. Leur choix de bracelets est particulièrement riche et original. Pour la Clifton Baumatic Chronomètre, ce sera soit un bracelet gris en cuir « usé » (Rugged), un NATO en cuir Piombo gris, ou un veau velours couleur sable (Light Brown Suede). Avec cette palette de couleurs, vous pourrez donner à votre Clifton un style plus baroudeur ou mettre encore plus en avant son cadran grâce au contraste procuré par la couleur sable.
Après quoi, ne sur-jouez pas trop.
Au lieu du classique blazer, optons cette fois-ci pour un blouson. Je m’imagine bien la Clifton Baumatic bleue sur un bracelet NATO portée avec un blouson Baracuta G9 Harrington vert olive de chez J.Crew. Le célèbre blouson anglais fut porté aussi bien par le héros du D-Day, Lord Lovat, que par Frank Sinatra.
Sous le blouson, le tee-shirt. Là encore faisons simple et efficace avec un modèle de chez Uniqlo, plutôt à col en « V ». Ensuite, enfilons une paire de chino Venezia de la marque italienne Slowear/Incotex.
Pour terminer, une écharpe légère de Zadig&Voltaire et une paire de sneakers Dome de chez Buscemi viendront compléter un style décontracté parfaitement en phase avec la simplicité de la Baume & Mercier Clifton Baumatic.
Pour finir, pas besoin de partir au volant d’un bolide rugissant. Il suffira de partir flâner dans les rues de votre ville préférée, en laissant le temps s’écouler simplement … C’est ça le vrai luxe.
