Histoire d’une liaison

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Histoire d’une liaison - Bracelets de montres
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Trop souvent négligés, les bracelets sont pourtant indissociables des montres qu’ils soutiennent. Tour d’horizon d’un siècle d’évolutions techniques, esthétiques et pratiques.
Comme on s’en doute, les bracelets des montres sont apparus en même temps que les montres du même nom. Celui de la Santos de Cartier, l’une des premières montres-bracelets contemporaines dans l’esthétique et le monde de construction, était fabriqué dans un cuir de porc et simplement cousu. Mais beaucoup de montres des premiers temps étaient montées sur des bracelets formés d’une simple lanière de cuir à laquelle était intégrée une structure métallique souple à rabattre sur l’anse fil soudée à la carrure. Ne restait ensuite plus qu’à coller le petit rabat de cuir pour avoir un lien parfaitement assujetti à la boîte.

Dans certains cas, les deux brins du bracelet étaient associés à un morceau de cuir à placer sous la montre pour éviter à la peau d’entrer directement en contact avec le métal de l’instrument. Ainsi, les boîtiers des montres en argent ne noircissaient pas et les garde-temps réalisés avec des métaux nickelés n’irritaient pas la peau. Avec la généralisation des boîtiers en « staybrite », à partir des années 1925-30, ces petits morceaux de cuir ont progressivement disparu,, allégeant d’autant l’esthétique des modèles.

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Mais les bracelets ont aussi cette capacité d’être multiples. Pour ces dames, ils furent des liens de cordelettes, de fils gainés de cuir, des assemblages étonnants de tissus et soies. Pour les hommes, ce furent des languettes en cuir de porc ou de veau le plus souvent, en peau de lézard ou en alligator, parfois. Un temps, les marques se sont passionnées pour les liens en maille milanaise, une sorte de tissage souple fait d’un fil de métal. L’idée était dans l’air de garantir une certaine durabilité à ce lien, voilà pourquoi, durant les « fifties », le bracelet métallique s’est lentement généralisé car il permettait de faire l’économie d’un bracelet taillé dans un matériau dont l’usure « programmée » imposait, déjà à l’époque, d’en changer régulièrement.

Bracelets-machine-nom-marques Camille Fournet
Toutes les grandes maisons ont proposé des modèles dotés de bracelets métalliques. Ceux souples et dotés de maillons inspirés de ceux proposés par certaines maisons spécialisées dans la montre de sport étanche se partageaient le marché avec des tours de bras perforés et rigides. Ceux-ci ont eu leur heure de gloire en même temps que ceux que les consommateurs adaptaient sur leurs montres de ville et dont la particularité, en plus d’être particulièrement laids, était d’être extensibles avec cette faculté étonnante d’épiler les poignets en coinçant les poils et duvets entre leurs maillons. Et le plus étonnant tient au fait que ces horreurs ont eu une durée de vie très longue : des années 50 à l’aube du renouveau horloger dans les années 90. Par chance, ils n’ont jamais vraiment reparus… et ont cédé leur place, après la crise à des bracelets, pour la majorité en cuir. Réalisés avec plus de soin et selon un mode opératoire qui s’est progressivement amélioré, ces liens ont gagné en présentation.

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Si les bracelets en métal n’ont pas disparu, loin s’en faut, on notera l’explosion de ce que l’on appelle les bracelets en matériaux synthétiques. On pense aux sangles toilées de type « Nato » qui existaient déjà de longue date. Mais la vraie révolution en matière de lien horloger est venue des bracelets en caoutchouc vulcanisés. Hublot s’en est fait une spécialité dans les années 80. Avant, il y avait bien des bracelets synthétiques, comme ceux lancés pour les montres de plongée des sixties ou des seventies. Mais la matière noire et souvent striée de façon à donner l’impression d’être en toile, était en général une sorte de néoprène ou de plastique semi souple qui, dans le temps, à fort mal vieilli, ces matériaux supportant mal les UV et les températures trop élevées ou trop basses.

Corum-bracelet-caoutchouc
Cela nous amène à parler d’entretien des bracelets. Les bracelets anciens en métal sont sensibles aux frottements et les propriétaires de montres d’époque noteront que souvent leur bracelet à un jeu certain. Difficile de faire autrement que d’admettre faire avec. Les axes usés ont pris du jeu après 40 ans en moyenne d’un porter quotidien. C’est un beau score. Il n’y a pas de solution miracle, sinon en changer… Mais dans certains cas, la pièce perd en valeur car le lien est indiscutablement associé à l’image du modèle, comme c’est le cas avec le chrono Daytona de Rolex. Pour les autres, ceux en cuir, ceux dont on sait que leur durée de vie est limitée à deux ou trois ans, il faudra faire très attention en les utilisant pour améliorer leur longévité et éviter, par exemple, de trop les exposer à de trop fortes lumières (soleil l’été) ou de les laisser trop longtemps à l’humidité (sudation, air saturé d’humidité, projections d’eau)… CQFD…