Interview de Laurent Dordet

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Interview with Laurent Dordet - Hermès
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Notre rédacteur en chef s’est entretenu avec le nouveau CEO de La Montre Hermès, seulement quelques heures avant le Grand Prix d’Horlogerie de Genève, à propos de la collaboration avec Apple Watch, des métiers d’art et de ses projets de développement de la marque.

Parlez-nous de votre carrière chez Hermès ?
Je suis arrivé il y a presque 20 ans au département finances, mais après cinq ans on m’a demandé de changer et je me suis retrouvé devant un métier à tisser et j’ai commencé à découvrir les tissus. J’ai déménagé à Lyon où j’ai travaillé dans une entreprise qui fournissait Hermès et d’autres maisons de mode en tissus. J’ai aussi eu l’opportunité de connaître des gens passionnés par leur travail (ce qui est beaucoup moins commun dans la finance !), qui arrivaient le matin fiers de ce qu’ils allaient produire durant la journée. J’ai énormément apprécié cette expérience.

En 2007, le groupe a acheté une tannerie pour les précieuses peaux d’animaux et nous avons dû développer tout un réseau de fermes et d’éleveurs capables de fournir des peaux au groupe Hermès et à d’autres marques horlogères. Cela a aussi duré cinq ans et après cela je suis arrivé au cœur même de la marque : la maroquinerie. J’étais responsable du développement, du renouvellement et de la promotion des collections, y compris leur vente aux magasins. C’est très semblable à ce que l’on attend de moi aujourd’hui alors que je travaille au sein d’un autre des 14 métiers que l’on trouve au sein de la maison Hermès.

Comment se sont déroulés les six premiers mois ?
C’était intense ! J’ai l’habitude de recommencer à zéro tous les cinq ans et d’apprendre une toute nouvelle profession, et je trouve cela très intéressant d’un point de vue personnel. Il y a beaucoup à apprendre, mais les mêmes principes de base s’appliquent dans tout le groupe. Hermès veut être un artisan de l’excellence et un créateur.

Slim d'Hermès QP

Dites-nous en davantage sur votre implication dans le projet Apple Watch
J’étais dans la division maroquinerie, alors j’étais impliqué dans ce projet. Nous avions déjà développé des articles pour les appareils Apple, mais en l’occurrence le groupe a eu l’idée de ce projet à double marque, ce qui était original pour deux enseignes qui ne font normalement pas de co-marquage. Les montres seront vendues par ce que l’on appelle « distribution miroir », à savoir dans environ 20 magasins Hermès et 20 Apple Stores, généralement dans les mêmes villes. Dans notre magasin genevois, par exemple, vous trouverez du personnel de vente Apple pour vendre la montre, parce que c’est un produit différent de ce que nous vendons habituellement.

Dans quelle direction va aller la collection horlogère pour Baselworld 2016 ?
Nous essaierons de parler de nos collections plutôt que de montres individuelles. Nous avons beaucoup de projets pour 2016 et 2017. Il y aura des évolutions dans la collection Slim et dans la collecion Faubourg pour dames. Nous allons investir dans la collection féminine, qui a été quelque peu négligée ces dernières années. Après tout, c’est notre principale clientèle. Nous allons également beaucoup travailler sur nos boutiques, où nous réalisons les trois quarts de nos ventes. Il y a des choses à faire, notamment sur la façon dont nous servons nos clients masculins dans les boutiques.

Puisque vous avez travaillé directement dans les métiers artistiques, avez-vous des idées précises sur comment les développer dans les collections horlogères d’Hermès ?
Nous apportons une force unique de créativité grâce au mélange des différents artisanats que nous avons au sein de notre maison. Nous avons vu du cristal St-Louis utilisé pour un cadran de montre et je crois que si nous parvenons à continuer à prendre du plaisir en explorant ces nouvelles pistes, alors nous le ferons. Nous y songeons déjà et, comme vous le dites, le fait d’avoir côtoyé ces différents métiers artistiques me permet d’en apprécier le potentiel. Pendant les 20 dernières années, tous les trois ou quatre ans environ, 20 personnes, habituellement les artisans et artisanes mais parfois aussi les directeurs artistiques, sont envoyées à l’étranger sans objectif précis mais dans le but d’interagir avec d’autres artisans locaux. Parfois des choses magiques en découlent.

Hermès Arceau Millefiori Multicoloured

Avez-vous des projets particuliers pour le développement de La Montre Hermès?
Avant tout, nous devons relancer la croissance. A court terme, je crois que cela sera plus facile pour les collections féminines, et nous avancerons pas à pas pour les collections masculines. Cette année nous avons augmenté nos ventes dans nos propres boutiques, mais les choses sont beaucoup plus difficiles dans la partie des ventes provenant du réseau de distribution sur lequel nous avons beaucoup moins de contrôle.

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