Guilloché

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The art of engine turning - Breguet
Découvrez en détail le guillochage chez Breguet dans cet article reprise du Quai de l'Horloge No. 1.

Le cerveau gauche. Le cerveau droit. Raisonnable et fonctionnel ou artistique et émotionnel ? À quelle fréquence l’esprit classifie-t-il des objets ou des motifs dans un compartiment ou dans un autre ? Systématiquement. Voilà pourquoi personne, absolument personne n’écrit de poésie sur les breaks familiaux ou ne prévoit des décorations florales lors d’un exercice d’une unité de combat.

Guilloché

Motifs illustrés ci-dessus: Grain d'orge (cadran principal); panier alterné (tour d'heures intérieur); soleil radiant (petites secondes); liséré (bordure du tour d'heures); panier (phase de lune); filet (bordure des cartouches).

Cependant, s’il doit y avoir une exception pour confirmer la règle, le guillochage en serait un parfait exemple. En établissant comme postulat qu’un cadran de montre est une toile sur laquelle l’horloger peint, existe-t-il une expression plus raffinée, élégante et rayonnante de l’art horloger qu’un délicat guillochage ? De rapides investigations historiques suffisent à affirmer que des préoccupations esthétiques animaient certainement  Abraham- Louis Breguet, premier horloger à recourir à cette technique, lorsqu’il commença à faire figurer des motifs guillochés sur le cadran de ses montres. Pourtant, il serait erroné de donner l’enquête pour conclue à ce point, car elle ne rendrait pas pleinement justice aux motivations de Breguet à l’instant de choisir ce procédé. En effet, une minutieuse étude de sa vie et de son œuvre démontre que Breguet a toujours professé sa conviction relative à la primauté de la fonction dans chaque aspect de la fabrication d’une montre. Pour Breguet, le guillochage était à la fois beau et fonctionnel.

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Motif illustré ci-dessus: vagues (cadran principal)

La gravure ornementale est une technique artistique déjà connue dans l’Antiquité grecque. Il est difficile de déterminer à quel moment précis apparurent les instruments qui permirent de les réaliser de manière mécanique. Selon certains, ce fut un ingénieur français du nom de Guillot qui développa un tour pour graver des motifs sur le métal. D’autres sources considèrent en revanche que le guillochage fut inventé par l’Allemand Hans Schwanhardt. Quelle qu’en soit l’origine, il semble bien que Breguet, quant à lui, découvrit le guillochage lors d’un voyage à Londres où cet art ornemental était notamment utilisé pour décorer des pièces de mobilier.

Guilloché

Motif illustré ci-dessus: flinqué alterné (cadran principal)

Inspiré par ses observations londoniennes, Breguet, revenu à Paris, procéda à des expériences pour appliquer cette technique sur ses cadrans. Il ne fait aucun doute qu’il décela les importants avantages fonctionnels apportés par ce type de gravure. Premièrement, la disposition d’un dé- cor finement guilloché sous les aiguilles accroissait dans une large mesure leur visibilité et, de ce fait, la lisibilité des indications affichées par la montre. À cette époque, le style baroque exerçait une domination absolue sur la forme des aiguilles. Sans conteste, les grandes aiguilles baroques richement travaillées se seraient détachées naturellement sur tout arrière-plan. Le guillochage ouvrit la voie à la confection d’aiguilles plus délicates et plus esthétiques. La présence d’une fine structure contrastée au-dessous d’elles favorisa l’apparition des aiguilles « pomme » en acier bleui, devenues des classiques et désormais universellement connues dans le langage horloger sous le nom d’aiguilles Breguet.

 

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Motifs illustrés ci-dessus: clou de Paris (cadran principal), liseré (bordure du tour d'heures), filet (bordure des cartouches)

Les premières expériences de Breguet mirent en lumière un second objectif pratique. En modifiant le dessin de la gravure sur la surface du cadran, Breguet s’avisa qu’il pouvait délimiter, mettre en évidence et déterminer différentes zones, à l’intérieur desquelles disposer des complications et des indications particulières. Depuis le début ou presque, la variation des motifs représenta une constante de l’utilisation du guillochage par Breguet, car chacun de ses cadrans pouvait intégrer de multiples dessins pour distinguer les divers espaces.

  

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 Motifs illustrés ci-dessus: panier circulaire (cadran principal), liseré (bordure du tour d'heures)

 

Les mêmes ambitions artistiques et fonctionnelles qui avaient conduit Breguet à adopter le guillochage pour les montres qui quittaient il y a deux siècles son atelier situé au 39 du quai de l’Horloge demeurent présentes de nos jours. Deux aspects, cependant, ont connu une évolution  au  cours des deux cents dernières années. En premier lieu, Breguet ne dorait pas ses cadrans guillochés. Confectionnée en or ou en argent – Breguet utilisait les deux – une pièce arborait la couleur originelle du métal précieux. Aujourd’hui, les cadrans des montres Breguet sont réalisés en or massif ou en nacre, pour certains modèles féminins. Les exemplaires en or sont désormais délicatement argentés, une opération qui n’était pas effectuée à l’époque de Breguet, afin d’accroître encore leur profondeur visuelle. En second lieu, tout en employant le même type de tour à guillocher, entièrement mû et piloté manuellement comme autrefois, de nouveaux motifs ont enrichi le répertoire pour offrir une diversité esthétique inconnue jusqu’alors dans cette ampleur. 

 

 

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 Motifs illustrés ci-dessus: flinqué alterné (intérieur du tour d'heures), drapé moiré (cadran princpal), filet (bordure des cartouches)

Imaginez que les photographies qui illustrent cet article représentent des tableaux exposés lors d’une rétrospective artistique. À chaque fois que vous tournez une page, vous découvrez des aspects inédits de la galerie des guillochages de Breguet.

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