London Horology Forum

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London Horology Forum - Editorial
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La Dubai Watch Week ouvre une nouvelle fois la voie à la formation et aux échanges horlogers.

Après l'édition 2017 de la Dubai Watch Week, la famille Seddiqi a pris la décision de faire de son exposition culturelle et de son forum éducatif un événement bisannuel, mais a néanmoins tenu à conserver l’élan de sa formule largement acclamée en 2018. C’est ainsi qu’a été mis sur pied le Horology Forum à Londres, en association avec la maison de vente aux enchères Christie’s. Avec un format plus compact consistant en des débats en groupe et d’intéressantes présentations (le tout en anglais), les membres de l’écosystème horloger- des horlogers aux CEO des marques, en passant par les collectionneurs et les journalistes - ont à nouveau eu l’occasion de participer à un forum indépendant dont le manque se fait cruellement sentir au sein de l’industrie horlogère, comme l’ont prouvé les nombreux sujets débattus et les questions soulevées lors des discussions.

Organisé sur deux jours, le Forum a débuté par un débat intitulé “The Battle of the Soothsayers” (“La Bataille des Devins”) sur le thème de l’avenir de l’industrie horlogère. La présence d’Aldis Hodge, un designer autodidacte de 32 ans au portofolio riche de plusieurs designs de montres de haut calibre (que vous pourrez reconnaître dans le rôle de MC Ren dans le film «Straight Outta Compton» de 2015) a fait souffler un vent de fraîcheur sur les débats. Voici quelqu’un qui s’est formé tout seul à l’horlogerie, qui possède une image et un charisme qui parlent à une tranche de la population qu’aucun autre acteur de l’industrie horlogère ne peut espérer atteindre, et qui s’exprime par-dessus le marché avec une éloquence à faire rougir les journalistes et orateurs les plus talentueux. Je serais très déçu de ne pas le voir exposer au SIHH ou à Baselworld ces prochaines années.

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Le débat “Cultural Clout – The iBuyer Cult” («Influence culturelle – le culte du e-client») m'a provoqué une crise d'identité. Avec pour objet de discussion le rôle de l’acheteur en ligne dans l’industrie horlogère d’aujourd’hui, le débat a immanquablement glissé vers les aspects de la vente en ligne et des « influenceurs » - un terme qui, comme celui de « blogueurs », est devenu péjoratif dans la bouche de nombreux acteurs de l’industrie horlogère. Heureusement, je ne me considère ni comme l’un ni comme l’autre, mais je me suis demandé si les étiquettes «éditorialiste» et «advertorialiste» évoquées pendant la discussion pouvaient m’être collées.

Le Forum a mis l’accent sur les contributeurs britanniques à l'industrie horlogère, avec des horlogers expatriés comme que Peter Speake-Marin et Stephen Forsey, des designers comme Fiona Krüger ou des talents indépendants comme Roger Smith et des nouveaux venus comme Rebecca Struthers et Richard Stenning de chez Charles Frodsham. “The British Watch Industry – Colonizing Greenwich Meridian” (“L’industrie horlogère britannique – la colonisation du Méridien de Greenwich”) a décrypté la manière dont l’horlogerie s’est développée dans le pays malgré un manque chronique d’enseignement et de formation.

«When David Clocks Goliath» s’est judicieusement inspiré de cette thématique pour aborder le contexte plus large des petites marques indépendantes vis-à-vis des grands groupes. Outre l’évocation des avantages (pas de pression boursière, plus de liberté) et des inconvénients (manque de budget, difficultés de communication et de sensibilisation) évidents, des points intéressants ont été soulevés, tels la législation Swiss Made qui représente un risque pour les entreprises innovantes comme HYT (son CEO Grégory Dourde participait au débat) qui compte sur des composants de haute technologie venant de la côte ouest des États-Unis.

George Daniels s'est vu attribuer à juste titre une place de choix dans le Forum dans le cadre d’un débat consacré à son héritage et à celui de Gérald Genta et abordé sous les perspectives différentes d’un horloger et d’un designer. Un certain nombre d’anecdotes de personnes ayant travaillé en étroite collaboration avec les deux personnalités (notamment Roger Smith, qui fut l’apprenti de George Daniels) ont jeté un nouvel éclairage sur ces figures légendaires.

En clôture des discussions, la Dubai Watch Week a mis la barre haut et montré une fois de plus la voie à suivre à tous les organisateurs d’événements et d’expositions liés à l’horlogerie. Lors d’un court débat de 30 minutes intitulé «British Roast», le public a eu carte blanche pour poser toutes les questions qu’il souhaitait à un panel à 100% britannique. Prenant les organisateurs au mot, le public a soumis Stephen Forsey notamment à quelques questions ardues. S’il avait le choix, quel fromage l’horloger utiliserait-il pour fabriquer une montre, est celle que j’ai préférée. Cet exemple parmi d’autres a fait beaucoup rire et apporté une touche d'humour dans cette industrie qui en a bien besoin. Comble de l’ironie, c'est Edouard Meylan, CEO de H. Moser & Cie. (première marque à avoir produit une montre en «fromage») qui, plus tôt dans la journée, avait déploré le manque d'humour dans l’horlogerie.

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La Dubai Watch Week a encore une fois prouvé qu’elle devrait servir d’exemple pour tous les événements horlogers. Mais jugez-en par vous-mêmes. Tous les débats sont disponibles sur la page Facebook de la Dubai Watch Week.