La sortie inaugurale de l'Académie du Grand Prix d'Horlogerie de Genève (GPHG) survient dans une période extraordinaire. N'importe quelle autre année, nous aurions déjà derrière nous les plus grandes foires horlogères de l'année. Nous aurions eu l'occasion de voir les nouveaux garde-temps de l'année, de les manipuler, de les passer au poignet, de partager nos impressions de vive voix avec nos collègues de l'industrie horlogère.
Le nouveau processus impliquant l'Académie GPHG consiste pour ses membres à soumettre des candidatures pour les différentes catégories de la compétition via une plateforme en ligne sécurisée. Auparavant, il incombait aux maisons horlogères d’inscrire leurs propres montres, un système simple, mais qui avait aussi ses inconvénients : il bénéficiait aux marques indépendantes qui avaient tout à gagner en termes de visibilité et de victoire potentielle, alors que plusieurs montres qui auraient mérité d’être candidates étaient exclues de la compétition simplement parce que les marques concernées avaient choisi de ne pas y participer.
La sélection de montres de la part des quelque 300 membres de l'Académie n'apporte pas seulement de la diversité parmi les nominées, mais offre également aux horlogers un aperçu précieux des créations qui rencontrent un écho favorable auprès du public. Bien sûr, ils ont toujours été au courant des ventes et entendu les commentaires des détaillants et de la presse lors des présentations aux salons, mais soyons réalistes : tous les commentaires énoncés dans une petite pièce, en présence des représentants de la marque, ne seront pas d'une totale franchise. En tant que membre du jury du GPHG au cours des trois dernières éditions, j'attendais avec impatience le nouveau système de l'Académie et les avantages qu’il apporterait.
Cette année, cependant, les lancements de nouveautés sont moins nombreux. Certaines marques très importantes n'ont pas présenté du tout de nouvelles collections cette année – certains lauréats des éditions précédentes, comme Chopard, Audemars Piguet ou Tudor, ont été relativement discrets en termes de nouveautés. Et peu des nouvelles montres dévoilées ont pu être vues en chair et en os.
Jusqu’à présent, l'édition 2020 du GPHG a été confrontée à un système non testé et à une période sans précédent. Comment nous, la première Académie, allons-nous faire face à cette situation ?
Voici mon point de vue, plein d’optimisme. Tout nouveau système connaît toujours des problème la première année. Qui peut s’attendre à ce qu’un nouveau système fonctionne parfaitement dès le départ. D'une certaine manière, c’est déjà un exploit que l'Académie GPHG soit inaugurée une année où il y a moins de sorties de nouvelles montres. La célèbre devise du fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, "Move fast and break things" ("Avancez vite, cassez les codes") pourrait jouer en faveur de tous, de sorte que tous les problèmes du nouveau système GPHG soient résolus avant même que l’horlogerie ne reprenne vraiment vie (croisons les doigts !) l'année prochaine.
J'ai également profité de l'occasion pour inviter tous les membres de l'Académie à se joindre à moi pour une discussion en vidéoconférence, afin de parler des montres candidates et de sensibiliser les gens à des montres auxquelles ils n’avaient peut-être pas pensé. Les années précédentes, les discussions franches et autres débats d’idée avaient toujours été encouragés, même si chaque membre du jury avait au final le droit de voter à bulletin secret. Cette année, malgré tous ses problèmes et difficultés, nous avons au moins tous appris à nous familiariser avec les logiciels de vidéoconférence. Lors de mes trois participations au jury du GPHG, la seule fois où j’ai eu la chance d’échanger avec un groupe de mes collègues a été lors du vote final. Comme tant d'autres choses en 2020, cela a désormais changé. Faisons en sorte que ce changement compte.
