Les influenceurs sont-ils en voie de disparition ?

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Influencers: An Endangered Species? - Influencers
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Les influenceurs sont-ils toujours influents ? Plus que la réponse, c’est déjà la question qui dérange

« Influenceur, c’est devenu un métier ». Thiébaut Bentz (Maurice Lacroix), n’y va pas par quatre chemins. L’homme connaît suffisamment bien le métier pour avoir décidé...qu’il n’y ferait pas appel. « Je ne suis pas certain que ce business model, qui fut autrefois très profitable, perdure. Les consommateurs sont aujourd’hui en recherche d’authenticité. Les « posts sponsorisés » ne le permettent pas ». Maurice Lacroix a donc fait le choix d’amis proches de la marque, sous contrat, mais pour qui le placement produit est naturel, non systématique, et où la participation à des événements et rencontres reste prédominante. En résumé : moins de mots, moins de virtuel. Plus d’émotions, plus de vie. 

Les influenceurs sont-ils  en voie de disparition ?

Une réalité séculaire

Pourtant, difficile de prédire la fin de ce phénix commercial. Que l’on l’appelle ambassadeur, sponsor, ami de la marque ou influenceur, il s’agit peu ou prou du même objet contractuel qui renaît perpétuellement de ses cendres : utiliser la notoriété d’un(e) autre pour promouvoir la sienne. Hans Wildorf (Rolex) le faisait déjà en 1927, en arrimant une Oyster au poignet d’une nageuse traversant la Manche. 

À ces premiers temps de la « réclame » ont suivi ceux de l’affichage (au poignet, sur le court, sur la coque ou les ailes), avant que n’arrive le temps du « post ». D’abord sur un blog, puis sur Facebook, puis sur Instagram – la liste sera aussi longue que de potentielles « applis » s’inviteront sur la page d’accueil de nos futurs smartphones – et accessoirement dans notre poche, notre esprit, sur le canapé, dans la voiture voire sur l’oreiller pour les plus « accros ». Jusqu’à saturation ? 

Moins quanti, plus quali

« Le marché de l’influence a gagné en maturité », estime Marine Lemonnier (289 Consulting). « Aujourd’hui, les véritables influenceurs sont davantage des leaders d’opinion. Ils rassemblent des qualités d’expertise et de sincérité qui correspondent mieux aux attentes des consommateurs. On recherche moins le volume que la valeur ». 

Le regard des experts sur Only Watch 2019

Cette approche correspond effectivement à la clientèle horlogère. Le « post lifestyle », autrefois tarifé des milliers de francs ou dollars pour des « taux d’engagement » garantis, n’a plus cours. Objectif : partager une émotion ou une information – si possible les deux. Le temps perdu à « scroller » sur de belles photos pour gagner du « like » ne répond plus à la demande d’authenticité des amateurs d’horlogerie. Le client final doit repartir de la « zone d’influence » avec un apport net, émotionnel ou informationnel. Une véritable valeur ajoutée. 

Trouver le point d’équilibre

« L’idéal reste de combiner différentes variables », nuance Jorge Guerreiro, chargé de cours en marketing d’influence, lui-même l’un des premiers acteurs de l’influence en ligne, depuis plus de 10 ans. « Un influenceur de volume contribue à la notoriété de la marque. Un influenceur de niche, plus pointu, à son image de marque, voire idéalement à la vente. De même, il est toujours intéressant de combiner des univers différents pour élargir son audience : montre + automobile ou bateau + nature, par exemple. Croiser les univers, c’est associer des audiences qui ont des profils affinitaires forts »

Les influenceurs sont-ils  en voie de disparition ?

Au final, l’influenceur, pour survivre, doit aujourd’hui faire comme n’importe quelle profession : s’adapter. Sauf qu’il doit le faire extrêmement vite – au rythme des applis et des ventes horlogères. Or convertir une approche qui était 100% centrée sur le volume et le nombre de clics, vers une approche très experte et qualitative, relève de l’équilibrisme digital. « Raison pour laquelle un certain nombre de personnalités ont deux profils : l’un pour leur métier, l’autre pour leur personne, souvent plus intime et authentique », explique Jorge Guerreiro. En somme, passer de l’influenceur au prescripteur. 

Et qu’est-ce qu’un prescripteur ? Littéralement, celui qui « écrit en avant », du latin « pre scribere ». Écrire en avance, être expert, s’adresser à un public qualifié : l’influenceur devenu prescripteur aspire-t-il à devenir...journaliste ? 

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