Romain Gauthier, l'ivresse des sommets

Ce jeune homme de 33 ans a réussi un pari un peu fou: fonder sa propre marque.
Revolution #3 - Mars 2009
Mathilde BinetruyRéussite_325590_0


Il a réussi en quelques années ce que d'autres ne parviendront pas à achever en une vie. De l'audace à revendre, un talent à qui il ne laisse aucun repos, une équipe douée et solidaire, voilà les secrets de Romain Gauthier. En deux ans, le jeune homme s'est hissé dans les hautes sphères de l'horlogerie avec sa Collection Prestige équipée du calibre maison : le 2206hm. Prochaine étape? Une pièce tenue secrète qui devrait voir le jour fin 2009.

Romain Gauthier a beau se sentir intronisé manufacture à part entière, il n'en tient pas moins en laisse un risqué sentiment de parvenu. Depuis deux ans, ce jeune homme de 33 ans a pourtant réussi un pari un peu fou : fonder sa propre marque. Rien ne le prédestinait à ce destin d'entrepreneur, si ce n'est ancré loin dans ses entrailles l'envie de faire quelque chose de différent. “ Il y a des milliers de personnes dans le monde qui regrettent de ne pas avoir accompli leur rêve, confirme-t-il. Je ne voulais pas en être. ” Après un cursus scolaire à l'Ecole Technique de la Vallée, Romain Gauthier intègre en 1997 l'entreprise François Golay où il oeuvre en tant que décolleteur sur les machines à commande numérique. L'expérience a l'énorme avantage de le familiariser avec toutes les pièces horlogères qu'il réalise. En parallèle, il nourrit l'envie secrète de s'inscrire au cours du soir pour acquérir un MBA (Master of Business Administration). “ Quand j'ai pris la décision de souscrire un MBA, ce n'était pas une lubie, explique-t-il. C'est un diplôme que je convoitais depuis longtemps. ” Pendant deux ans, de 2000 à 2002, le jeune homme troque ses loisirs contre 9 heures de cours tous les samedis. Les dimanches sont consacrés aux applications de la veille. “ Aujourd'hui je peux le dire, confie-t-il, je n'avais que le samedi soir pour me reposer. ”

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Perplexe, son entourage le soutient pour autant avec assiduité. Et, peu à peu, le désir s'érige en projet. “ Mon MBA a été mû par le souhait de comprendre les mécanismes commerciaux mais j'avais en réalité deux choses enfouies au fond de moi, explique-t-il. D'une part je pensais à la profession de consultant en horlogerie et d'autre part, je songeais à développer un mouvement. ” La deuxième option sera la bonne. En 2005, il jette les fondements de sa société, en 2006 il investit un local et en 2007 Philippe Dufour lui offre un sésame pour la foire de Bâle. C'est la consécration. Telle qu'elle se raconte, la prospérité est pourtant bien éloignée du quotidien besogneux auquel Romain Gauthier a dû s'astreindre. Il n'a pas ménagé ses efforts pour sortir sa Collection Prestige. Réalisée en or gris, en or rose et en platine, la montre aux aiguilles décentrées met en valeur une innovante et confortable couronne de remontage logée sous la montre, qui permet de la remonter au poignet.

Cette pièce prestigieuse porte en elle toute l'histoire de son créateur. Elle aura nourrit son imaginaire de longues années avant d'avoir pu voir le jour. Waterloo semble pourtant derrière lui. A le voir évoluer au sein de son équipe d'une petite dizaine de personnes, Romain Gauthier donne l'impression d'avoir accompli le plus difficile. Sans chercher à tout prix l'innovation là où tant de grandes marques redoutent d'être taxées d'immobilisme, mais sans se complaire non plus dans ses réalisations précédentes, il travaille sans relâche par passion. Fin décembre, une nouvelle machine est venue étoffer son local dédié à la mécanique et qui ferait pâlir les plus grandes manufactures. Dans un nid d'aigle non loin de là, horlogers, marketing, locaux de réception assurent de concert la fonction de siège social. Il y reçoit ses hôtes, avec faconde, sans jamais se départir d'un enthousiasme contagieux. Et si sa prudence demeure intacte, son idéal de perfection créatrice aussi. Fin 2009, il présentera un nouveau projet qui fait déjà l'objet de désirs partagés : expectatifs pour ses clients, transgressifs pour la presse, attentifs en ce qui le concerne. Au terme d'une année économique qui a dispensé le miel et le sel aux quatre vents du luxe, il ne spécule pas sur la chance qui lui a fait une fois l'aumône de sa présence.

Les jeux sont faits, rien ne va plus !

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