La consécration de la montre sport : Partie 1

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En vingt ans, la montre sport chic est passée du statut de registre majeur à celui de catégorie reine*

S’il est une catégorie qui a profité du boom horloger des années 2000, c’est bien la montre sport de luxe. Proposée à des tarifs allant de l’entrée du haut de gamme horloger à ses sommets, elle est décontractée, résistante, montée sur des bracelets confortables et solides, aux couleurs et aux designs sobres. Elle est de toutes les circonstances, la polyvalence incarnée, sans pour autant négliger ces éléments fondamentaux que sont le style et l’unicité. Elle a aggloméré la quasi-totalité des déterminants structurels qui ont façonné l’horlogerie contemporaine : hausse des prix, augmentation de la variété des couleurs et matériaux, fusion des registres, effacement de la frontière des genres, engouement pour les complications… Aucun autre type n’a connu une croissance aussi forte, un intérêt aussi intense, un renouvellement aussi profond.

La consécration de la montre sport

En profitant du décloisonnement progressif des styles et des catégories, ces garde-temps ont réussi à déborder de leur définition d’origine. En s’emparant de tous les matériaux disponibles, du plus précieux au plus technique, ils ont étendu leur territoire. Et à la faveur de grands mouvements de mode qui n’ont cessé de dé-formaliser le vêtement, ils sont devenus portables en toute occasion. On imagine à peine aujourd’hui les cris d’orfraie poussés par les puristes de tous bords lorsque pour la première fois, un shooting de mode a mis en scène un homme en smoking, une montre de plongée au poignet, signifiant que ces registres étaient enfin devenus compatibles.

La consécration de la montre sport

 

Généalogie

À la fin de la décennie 2010, le phénomène est devenu tellement fort que la montre de luxe en acier, et en particulier montée sur un bracelet en acier, est devenue l’objet horloger le plus désirable qui soit, donnant lieu à une spéculation sur une dizaine de modèles, répartis entre Rolex, Patek Philippe, Audemars Piguet et Richard Mille, et qui frise l’absurde.

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L’évolution qui a mené à ce paroxysme historique remonte à la fin des années 1990. Quelques marques portaient alors déjà en germe ce succès qui a éclipsé bien d’autres compartiments de l’offre de montres haut de gamme. Certains la font remonter aux années 1970, pendant lesquelles Patek Philippe et Audemars Piguet ont lancé l’un la Nautilus, l’autre la Royal Oak. Il s’agit en fait d’un anachronisme, puisque ces montres ont tardé à connaître le succès qu’on leur connaît aujourd’hui et que, d’autre part, la montre de sport luxe trouve ses racines ailleurs : dans la montre militaire des années 1920, puis les premières montres dédiées aux loisirs (équitation en particulier) dans les années 1930, puis les montres de pilote des années 1940.

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En empruntant à ces trois genres la solidité, de grands diamètres, une simplicité dans l’approche horlogère qui est synonyme de durabilité, la montre sport chic a su s’imposer dès la fin des années 1950 en se destinant au pilote automobile. Puis dans les années 1970, effectivement, Nautilus et Royal Oak avaient bouleversé les codes du luxe en étant proposées à des tarifs supérieurs à ceux de montres en or aux prestations équivalentes.

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Étape suivante, les années 1980, où la grande mode des montres bicolores à bracelet métallique, au premier rang desquelles il faut citer l’immense succès des Rolex Datejust pour homme comme pour dame et des Classic Wave d’Ebel, avait fait entrer la catégorie dans une nouvelle ère. Dernière pièce de ce puzzle historique, l’utilisation croissante, et dans des montres de plus en plus coûteuses, de bracelets en plastique noble a commencé à faire tomber les préjugés sur ce matériau, qui a joué un rôle essentiel dans la décennie 2000. Dans ce contexte, les apports des premières générations de Hublot d’une part et de TechnoMarine de l’autre ont été décision.

Stars

La majorité des modèles que l’on qualifie, parfois un peu vite, d’icônes appartient à cette catégorie, et pour une raison assez simple : une proportion importante des montres qui ont du succès aujourd’hui sont des créations anciennes, qui ont connu des actualisations successives ou des résurrections glorieuses. Bien implantées dans l’imaginaire commun, déjà validées par la durée, elles traversent le temps d’autant plus facilement qu’elles sont faciles à porter en toutes circonstances et se situent au-dessus des aléas de la mode. C’est ainsi le cas de la Submariner de Rolex, la Carrera de TAG Heuer, l’Overseas de Vacheron Constantin, les Speedmaster Professional d’Omega, les Mille Miglia de Chopard, la Santos de Cartier, les Polo de Piaget, l’Octo de Bulgari ou encore l’esthétique Panerai.

La consécration de la montre sport

La définition contemporaine de la montre sport luxe est le fruit d’une sous-segmentation, comme bon nombre d’autres tendances de l’horlogerie actuelle. En se sophistiquant, en puisant son inspiration dans tous les domaines possibles et les registres techniques, elle s’est scindée en plusieurs catégories qui ont chacune leur vie propre. Il y a tout d’abord la montre de sport vintage, avec des designs clairement datés, puis la montre ultra technique, massive et aux fonctionnalités avancées.

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Puis, un peu par défaut, un peu en creux, la montre sport luxe est ce qu’il reste, c’est-à-dire la part du lion. Elle n’est donc pas une démonstration de puissance virile, abritée dans un boîtier en titane ou en carbone de 48 mm de diamètre capable de résister aux grandes profondeurs. Cela exclut donc certaines montres de plongée, mais laisse en particulier la porte ouverte aux montres d’inspiration sous-marine, parmi lesquelles la Black Bay de Tudor est l’une des réussites les plus parlantes de la seconde décennie de ce siècle. dans une nouvelle ère. Dernière pièce de ce puzzle historique, l’utilisation croissante, et dans des montres de plus en plus coûteuses, de bracelets en plastique noble a commencé à faire tomber les préjugés sur ce matériau, qui a joué un rôle essentiel dans la décennie 2000. Dans ce contexte, les apports des premières générations de Hublot d’une part et de TechnoMarine de l’autre ont été décision.

*À l’occasion du 20ème anniversaire de GMT Magazine et de WorldTempus, nous nous sommes lancés dans le projet ambitieux de résumer les 20 dernières années en horlogerie dans The Millennium Watch Book, un grand et beau livre magnifiquement illustré. Cet article en est un extrait. The Millennium Watch Book est disponible sur www.the-watch-book.com, en français et en anglais, avec une remise de 10% en utilisant le code WT2021.

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