Question – si ce n’est existentielle – mais très horlogère : savez-vous pourquoi les montres sont généralement rondes ? Nul besoin de résoudre la quadrature du cercle : il s’agit de la forme historique standard des instruments de mesure dotés de compteurs. D’autre part, cette forme convient particulièrement à la course circulaire des aiguilles – même si faire rentrer un rond dans un carré n’est finalement pas si compliqué pour les horlogers. D’autant que « montre de forme » ne rime pas forcément avec « mouvement de forme » (autre exercice, autres défis !).
Bousculer le rond établi
Les premières montres-bracelets (entre la fin du XIXe et le début du XXe) étaient rondes, tout comme leurs grandes sœurs, les montres de poche. Cependant, l’envie de fantaisie ou de variations élégantes, notamment de la part des joailliers, a rapidement donné naissance à des montres de toutes formes. En 1906, Cartier présente une montre-bracelet « tonneau » avec un boîtier cintré adapté au poignet.
Cinq ans plus tard, son modèle carré, la Santos, voit le jour. En 1967, la marque présente l’une des formes les plus osées de l’horlogerie, avec la Crash et ses allures de montre molle de Dali.
Des rectangles pour dompter les angles
Pas trop folle, mais aussi élégante qu’élancée, la montre rectangulaire s’impose durant les années Art Déco. Créé en 1931, le design de la Reverso de Jaeger-leCoultre perdure jusqu’à aujourd’hui.
Les modèles contemporains Alacria de Bucherer, ou Toccata Ladies de Raymond Weil, jouent, elles aussi, sur le raffinement du rectangle, cintré pour la première et tout en douceur géométrique pour la seconde.
Parmi les autres formes anguleuses célèbres de l’horlogerie : le carré de la Monaco de la TAG Heuer – la première montre de forme étanche en 1969 – ou encore les célébrissimes octogones de la Royal Oak d’Audemars Piguet ou de l’Octo de Gerald Genta.
Des arrondis pour adoucir la vie
Les horlogers imaginent volontiers de voluptueuses variations sur le thème des courbes, il faut l’avouer le plus souvent pour des poignets féminins. Breguet dessine ainsi sa Reine de Naples sur le principe de la forme de l’œuf, idéale pour une créativité maximale – comme, début 2021, des aiguilles rétractables formant en cœur et suivant l’ovale du cadran. Chez Bulgari, le visage de la Serpenti rappelle une (très luxueuse) tête de reptile. Avec la Cat’s Eye, Girard-Perregaux joue aussi de l’ovale, positionnée dans le sens de la largeur ou de la longueur, déclinée en plusieurs sertissages, guillochages et matériaux de cadrans, comme des nacres délicates ou des aventurines fines.
L’inventeur de la forme la plus folle est…
Et si les formes les plus audacieuses s’inspiraient des lignes d’objets, interprétées de façon horlogère ? Parmi tant d’autres, un « hublot » se retrouve ainsi chez Patek Philippe, avec la Nautilus. Urwerk choisit elle d’orner le poignet de formes futuristes rappelant des navettes spatiales. La Bugatti de Parmigiani s’inspire des courbes racées de la voiture éponyme et MB&F s’est amusée à créer des Frogs très batraciennes. Du côté de Ralph Lauren, la Stirrup, en forme d’étrier, donne envie de s’élancer au triple galop.
Alors, dans cette horlogerie multiforme, quelle est la géométrie de vos rêves ?