C'est peu dire que l’histoire de Jaquet Droz est intimement liée aux automates. C'est par la création de ses extraordinaires machines simulant le vivant, voire anthropoïdes, que Pierre Jaquet Droz avait conquis une place de choix dans les cours européennes il y a 250 ans. Quand la marque s'est relancée, elle avait pris appui sur cet héritage, dont on retrouve encore de nombreuses pièces. Elle avait ainsi fait restaurer quelques-unes de ces merveilles de la technologie d’antan. Puis, la marque a créé plusieurs objets de mesure du temps relevant de l'automate. De régulières répétitions minutes. Une machine à signer. Un oiseau siffleur intégré dans une montre de poignet, puis dans un format ressemblant à une pendulette de bureau. Certains mouvements qui les animaient (au sens du latin animus, âme, comme mécanique) avaient été réalisés à l'aide de fournisseurs extérieurs. En 2019, Jaquet Droz lance son premier automate exclusif à l'occasion de son événement de présentation de nouveautés Time To Move. La Magic Lotus Automaton a été pensée puis assemblée en interne, développée et fabriquée avec l'aide de son fournisseur de mouvements dédié au sein du Swatch Group, la manufacture Blancpain.
Ainsi, Jaquet Droz a imaginé les quatre phases de la vie d'une fleur de lotus. Du bourgeon à la fleur, qui enfin se fane et tombe dans l'eau pour y repousser, il s'épanouit dans une mare ondoyante où une libellule vient se poser et où nage une carpe koï. Le scénario étant posé, restait à le mettre en mouvement. Les quatre phases de la fleur cohabitent en miniature sculptée et peinte, ou réalisée en or. La libellule monte et descend pour indiquer la réserve de marche de l'animation. Quand elle est épuisée, elle se pose sur une feuille de lotus. Quant à la carpe, elle circule sur un anneau qui est la partie extérieure du cadran, tout en montant et descendant et en remuant sa nageoire caudale. Quatre animations simultanées, gérées toutes ensemble par un mouvement dont les dimensions n'ont rien d'importable. Quatre sujets vivants qui sont tous réalisés dans les ateliers de la manufacture de La Chaux-de-Fonds, où s'activent les graveurs, émailleurs, sculpteurs et peintres qui donnent vie à ces petits sujets.
Par ailleurs, la Magic Lotus Automaton donne l'heure. Elle le fait dans un cadran excentré vers midi selon le principe qui régit le modèle Petite Heure Minute de Jaquet Droz. Il se prête à l'exercice puisqu'il dégage naturellement un espace aux animations. Mais ce qui frappe, c'est leur fluidité et en particulier celle de la carpe, qui semble vraiment dans son élément. L'autre aspect étonnant est la variété des couleurs, des décors, des volumes qui poussent par-dessus le cadran et ses surfaces plates, même si elle sont également décorées. La scène ne relève pas du dessin, mais du théâtre de marionnettes, du livre pop-up, et dispose de sa propre petite vie.
Il s'agit en toute vraisemblance du premier épisode d'une longue série. Difficile d'imaginer que la marque va en rester là, elle qui dispose de la légitimité et de l'envie d'une part, désormais de moyens à sa mesure de l'autre. Car à bien y regarder, la conception très complexe du mouvement (616 composants, 4 brevets, 4 barillets, 4 minutes d'animation) de cet automate repose largement sur la possibilité de varier les trajectoires. En plus de changer de sujet et de thème esthétique, il devrait être capable de changer les animations elles-mêmes.