Reverso, retour en grâce (et aux sources)

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Reverso, back on track (and back to basics) - Jaeger-LeCoultre
La Reverso est de retour à ses sources, non sans avoir connu quelques soubresauts. Entre 1931 et 2019, la pièce n’a pas changé : elle a évolué. Un jeu de nuances pour amateurs avertis...

Le risque d’une icône horlogère, c’est d’en être prisonnier. Prisonnier de son histoire, de la part qu’elle prend dans les ventes. Prisonnier également de son design : le marché horloger est excessivement conservateur. On apprécie une Royal Oak, une Monaco ou une Reverso uniquement parce qu’elles ne ressemblent à rien d’autre...qu’à une Royal Oak, une Monaco ou une Reverso. 

En cela, la Reverso de Jaeger-LeCoultre est semblable à toutes les icônes horlogères : quasi immuable. Dilemme aporétique : comment faire évoluer une pièce que tous les collectionneurs veulent garder inchangée...tout en offrant de nouveaux modèles tous les ans ? 

Retour aux fondamentaux

Si le diable est réputé être dans les détails, il s’y trouve aussi parfois dans la solution. Tout l’art est de préserver l’essence sans jamais céder aux sirènes de la mode. C’est encore plus aisé pour la Reverso : elle n’a jamais été « à la mode ». Elle est née en tant que pièce de sport, pour le polo. Elle est aujourd’hui une pièce de standing. La Reverso épouse naturellement les contours de son temps. C’est une lame de fond lente mais irréversible. On ne peut d’ailleurs pas la remonter sans dégât : lorsque Jaeger-LeCoultre a tenté de faire machine arrière et de créer une « Reverso sportive du XXIe siècle », la Squadra, ce fut une embardée sanctionnée par les collectionneurs. La pièce n’est plus au catalogue. 

Reverso, retour en grâce (et aux sources)

En réalité, plus de 80 ans après sa naissance, la Reverso semble revenue à son fondamentaux. Après un dernier sursaut de modèles surabondants entre 2000 et 2010, favorisé à l’époque par un marché porteur, le modèle s’est repositionné vers ses origines. C’est la fin des Squadra, des Grande Date, des Grand Sport, des QP et autres Répétition Minute. L’immense majorité des modèles signe un retour au classicisme, avec deux aiguilles centrales. Les compléments sont rares et sobres : petite seconde, phase de lune, éventuellement un quantième. Côté fond, le plus souvent, le même fuseau se montre sous un jour différent, voire se complète d’un second fuseau présenté avec la même sobriété. 

Mêmes proportions

Cette ligne directrice se rapproche du modèle original de 1931. Celui-ci fait 38 mm de long. Actuellement, une Reverso « Small » fait 36 mm, une Reverso « Medium » fait 40 mm. L’épaisseur n’a pas véritablement varié non plus : en moyenne 7,5 mm pour les modèles actuels, contre 8 mm pour le modèle original. Même constat pour la largeur : entre 21 et 24 mm actuellement, 23 mm à l’époque. La conclusion est simple : la Reverso a pu varier de quelques millimètres mais ses proportions, elles, ont toujours été préservées. 

Reverso, retour en grâce (et aux sources)

Trois différences significatives

Côté cadran, trois changements sont perceptibles. D’abord, au fil des années, Jaeger-LeCoultre a privilégié une minuterie au centre du cadran, alignée sur la pointe de l’aiguille des heures. Dans les années 30, cette minuterie suivait le rehaut, en extérieur du cadran. 

Ensuite, le modèle des années 30 présentait un cadran type laqué, uni. Aujourd’hui, la quasi totalité des modèles actuels de Reverso présentent une finition soleillée ou satinée. Enfin, les modèles contemporains à index verticaux (dont le double index à midi) n’existent plus sauf dans la collection justement nommée « Tribute ». 

Pour le reste, le dessin est quasiment inchangé : même minuterie type « chemin de fer », même aiguilles glaive et, évidemment, même triple godrons. 

Reverso, retour en grâce (et aux sources)

Un mouvement simple et fiable

Côté mouvement, les calibres des premiers modèles étaient des Tavannes cal. 64 à remontage manuel (15 rubis) et cadencés à 18'000 alt./ h. De nos jours, Jaeger-LeCoutre est devenue une manufacture totalement intégrée. Le mouvement de base de la Reverso, le cal. 822A/2, est toujours à remontage manuel, avec 19 rubis. Sa fréquence a été légèrement augmentée (21'600 alt./h), comme ç’en est aujourd’hui presque devenu la norme. 

Des prix étonnamment accessibles

La cote de la Reverso reste un mystère. Un modèle actuel, très proche de celui de 1931, en acier et sans complication, sera dans l’immense majorité des cas entre 5’000 et 9'000 euros. Un modèle original des cinq premières années (1931–1935) se négociera au double, entre 10'000 et 20'000 euros. Le delta peut sembler significatif mais il ne l’est pas réellement. Certains modèles d’origine ont vu leur cote s’envoler (Royal Oak, pourtant née quatre décennies plus tard), d’autres sont restés étonnamment stables (Heuer Monaco, 1969, ou Patek Philippe Calatrava). Cela ne durera peut-être pas éternellement, il y a encore de très belles pièces d’époque à se procurer à cote raisonnable...sous réserve que l’on puisse les trouver ! 

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