C’était l’un des secrets les mieux gardés de la galaxie horlogère. Ou joaillière. Ou les deux. En réalité, on ne savait plus vraiment. Chanel avait brouillé les pistes. Comme à son habitude, il était impossible de savoir ce que cachaient les récents développements du couturier, également l’un des plus imprévisibles créateurs français de montres suisses ! Pour couronner le tout, l’opération arborait un mystérieux nom : Code Coco, certainement le nom du projet destiné à en masquer le véritable patronyme jusqu’à sa sortie officielle.
Là encore, il n’en fut rien : Code Coco est bel et bien demeuré le nom définitif de...de quoi, au fait ? Une montre ? Un bracelet ? Un bijou ? Code Coco est tout cela à la fois. C’est une création Chanel, elle ne se refuse donc aucun horizon, empruntant à son propre style, brisant les barrières, cassant les codes. Reste à la décrire. Pour cela, rien de tel que de repartir de l’essentiel : la sémantique.
Un peu d’histoire
Aujourd’hui, l’usage évoque le plus souvent soit une « montre », soit un « bracelet ». Des logiques commerciales plus ou moins obscures ont classé la première dans la catégorie de l’horlogerie, le second dans celle de la joaillerie. Le travail d’un marketing en silos a fait le reste : l’on est soit horloger, soit joaillier, rarement les deux.
Ce serait oublier un peu vite que la montre est, historiquement, une « montre bracelet », née en opposition à la « montre de poche ». Le travail effectué par Chanel est donc de revenir à ces fondamentaux de la montre, un exercice dont elle s’affranchit avec d’autant plus d’aisance que la maison n’est, de première nature, ni horlogère ni joaillière mais couturière.
Une association, pas une synthèse
Code Coco est son manifeste pour ce retour à l’authentique montre-bracelet, non pas une synthèse des deux mais leur association. Dans Code Coco, la montre ne prend pas l’ascendant sur le bracelet, l’inverse non plus. Code Coco les fait coexister simultanément dans une rare harmonie autant visuelle que technique.
La création se dévoile sous la forme d’un bijou féminin, un bracelet acier présentant un motif tapisserie lui offrant une grande souplesse. Première marque du style Chanel : Code Coco n’offre ni boucle déployante ni ardillon. Le bracelet est lisse d’un bout à l’autre, avec une rare perfection géométrique. Pour fermer la pièce, on comprend rapidement qu’il faut l’enrouler sur elle-même et que la fenêtre ouverte en bas du bracelet vient s’appliquer par-dessus le cadran. En somme, Code Coco se ferme...sur elle-même.
Quitte à parler de fermeture, l’élément central de Code Coco est justement son fermoir. Qui est-il ? Que fait-il sur le cadran ? Pour répondre à la première question, il faut se replonger dans les archives de la marque. Ce fermoir est celui du sac matelassé 2.55, créé par Mademoiselle Chanel en février 1955. Le motif tapisserie du bracelet en reprend le matelassé, le cadran lui subtilise son fermoir. Qu’y fait-il ? Un quart de tour ! En le faisant pivoter sur son axe central, le fameux fermoir fait fi des conventions et permet de masquer l’heure (lorsqu’il est vertical) ou d’équilibrer à parts égales le cadran entre un diamant et les aiguilles des heures et minutes (lorsqu’il est horizontal). Code Coco s’offre aujourd’hui en deux variations, lunette simple ou sertie, toujours sur bracelet acier et cadran noir.
100% Chanel !
Au final, Code Coco ouvre une voie créative inédite. Elle explore simultanément les voies de la montre, du bracelet, du bijou, lorgne vers la joaillerie, emprunte aux montres à secret et s’amuse de son fermoir comme d’un Charms. Belle, disruptive, impertinente ? A chacun d’en juger. Elle n’en reste pas moins une pure création Chanel, de celles qui portent la marque toujours un peu plus loin sur son chemin créatif grâce à l’usage le plus pertinent de son propre patrimoine. Code Coco est donc une création juste, pertinente, cohérente et parfaitement maitrisée. Dans le mille !
