Breguet, l’homme, ses secrets

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Breguet, the man and his secrets - Abraham-Louis Breguet
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Connaître une maison, c’est connaître son souffle fondateur. Qui était réellement Abraham-Louis Breguet, l’homme derrière le patronyme ?

D’Abraham-Louis Breguet, on ne sait pas tout...mais presque. Emmanuel Breguet, son descendant, historien, aujourd’hui Vice-Président en charge du Patrimoine et du Marketing au sein de la manufacture éponyme, a énormément documenté la vie de son aïeul.

Une histoire de filet de pêche

Les faits les plus saillants – horlogers pour la plupart – sont connus de longue date. Pare-chute, tourbillon, finitions, montres de souscription : l’histoire est largement documentée. Il reste toutefois certains recoins de l’histoire personnelle du grand horloger qui demeurent sous le radar de la mémoire. De grandes choses ou de petites anecdotes – par exemple, que le patronyme « Breguet » trouve son origine dans l’activité de la pêche, le vieux nom « brègue » ou « breguin » désignant soit un filet pour la pêche soit en poisson du lac de Neuchâtel, où est né Abraham-Louis en 1747.

 

Quand Breguet rencontre Berthoud

Son accès à l’horlogerie ne se fait pas au premier cercle familial : le père Breguet s’éteint alors qu’Abraham-Louis n’a que 11 ans. C’est lorsque sa mère se remarie avec un homme qui exerce la profession d’horloger qu’Abraham-Louis y goûte pour la première fois, avec ce beau-père nommé Jacques Tattet.

Breguet, l’homme, ses secrets

Il enverra le jeune homme à Paris pour ses études horlogères, où il rencontrera deux autres noms déterminants de son histoire : Ferdinand Berthoud et Jean-Antoine Lépine. Breguet travaillera pour le premier, de 20 ans son aîné. Autre détail amusant : Breguet, Berthoud et Lépine travaillaient tous trois au même endroit, île de la Cité, à Paris !

 

Inventeur de la montre perpétuelle ?

Encore aujourd’hui, il est difficile d’affirmer avec certitude quel horloger a inventé la montre à remontage automatique, dite à l’époque « perpétuelle ». Louis Perrelet semble être dépositaire du principe du rotor mais Breguet d’un autre dispositif de masse « à secousses » qui alimentait deux barillets – pour une « réserve de marche » (le nom n’existait pas encore) de 60 heures. Breguet a longtemps travaillé avec deux barillets, voire quatre à la fin de sa carrière.

Breguet, l’homme, ses secrets

Le principe de masse oscillante a fini par s’imposer mais Breguet, lui, eut une autre invention géniale : pour les montres à répétition, dont il s’était fait une spécialité, l’homme passa d’un timbre traditionnellement rectiligne et en travers de la platine arrière, à des timbres enroulés autour du mouvement. C’est toujours le cas de nos jours.

 

Un meneur d’hommes

Le mythe de l’horloger solitaire n’est certainement pas celui d’Abraham-Louis Breguet. Dès 1786, il pense le système de la division du travail, où chaque artisan spécialisé concourt à la production de « montres ordinaires, simples mais parfaites » (circa 1786). Un comble que celui qui a posé les bases de la production de masse n’a jamais réalisé deux fois la même montre !

 

L’inventeur de la montre-bracelet ?

Inventeur, défricheur, Breguet touche à beaucoup d’arts mécaniques. Il inventa notamment l’ancêtre du métronome, qu’il baptisa « chronomètre musical », et réalisa un « Essai sur la force animale » en 1811 !

Breguet, l’homme, ses secrets

Il est pourtant cocasse de noter que certaines de ses inventions sont à l’époque passées presque inaperçues, notamment la montre bracelet. On sait pourtant de manière certaine que sur une commande de la Reine de Naples du 8 juin 1810, Abraham-Louis Breguet a conçu la première montre bracelet connue au monde, numéro 2639. Elle lui demandera deux ans et demi de travail.

 

Des problèmes d’hier...et d’aujourd’hui

Le bon fonctionnement des montres de poche d’hier se heurtaient sensiblement aux mêmes problèmes que nos montres d’aujourd’hui, et Breguet y consacrait déjà toute son attention. Il en va ainsi de la lubrification – Breguet avait constaté la qualité imparfaite des huiles végétales et avait rapidement opté pour un échappement naturel, dispensé de lubrification.

Breguet, l’homme, ses secrets

Il en va également du pare-chute, petite coupelle montée sur une lame ressort et qui protège les pivots en cas de choc – ce que l’on appelle aujourd’hui les « Incabloc ». Ou enfin la pendule sympathique qui, dès 1797, permet à une montre de poche d’être synchronisée avec une pendule – un exploit technique, à défaut d’une invention réellement utile.

 

Une vie chahutée par l’histoire

Malgré la qualité de ses inventions, Breguet n’a pas été épargné par l’histoire. A titre personnel, il perdit deux de ses trois enfants ainsi que son épouse, âgée alors de seulement 28 ans. Il ne se remariera jamais.

Au cœur de la Révolution française, en 1789, Breguet est expulsé de son atelier historique – il le retrouvera quelques années plus tard. Entre Révolution et Terreur, son commerce s’est littéralement effondré – Breguet ayant dû par ailleurs choisir l’exil en Suisse, d’où il poursuivit malgré tout son entreprise, à distance.

 

Trésorerie et contrefaçon

Très implanté en Angleterre, l’horloger dut également affronter des retards de paiements récurrents de la part de ses clients britanniques, qui compromirent plus d’une fois la pérennité de son art. C’est notamment en généralisant le principe de la montre à souscription (pré payée au tiers ou quart de sa valeur à la commande) que Breguet sauva son entreprise – non sans l’avoir également prémunie des contrefaçons en appliquant à ses cadrans un procédé de signature secrète issu de la frappe des monnaies et médailles. Cette signature secrète existe d’ailleurs toujours.

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