Vous imaginez-vous porter sur vous un garde-temps de près de 10 cm de diamètre et de 5 cm d’épaisseur pesant presque un kilo ? Probablement pas. Comme vous n’avez probablement pas non plus sur votre compte bancaire les 7 à 10 millions de dollars nécessaires pour l’acheter.
La Référence 57260 (57 pour le nombre de complications, et 260 pour l’âge de la maison Vacheron Constantin) a été lancée dans un cercle très sélect à Genève, et sous très haute surveillance (voir la vidéo). Il s’agit en effet d’une commande exceptionnelle de l’un des plus grands collectionneurs de montres de poche au monde. Il est parfois délicat d’écrire sur une montre que l’on n’a pas vue, de surcroît lorsqu’il s’agit de la montre la plus compliquée jamais fabriquée. Le dossier de presse de la Référence 57260 compte huit pages et évoque « un degré de connaissances mathématiques et de savoir-faire qui dépassent l’entendement ». Et pourtant, une équipe de trois maîtres-horlogers est parvenue à relever le défi. Mais huit années leur ont été nécessaires pour y parvenir.
Vu qu’il s’agit d’une pièce unique et d’une commande privée, le mot « utilisateur », employé par la Manufacture dans la documentation qui tente d’expliquer les 57 complications que recèle cette énorme montre de poche, paraît peu approprié. Après tout, c’est une pièce très personnelle, dont la plupart des complications résultent sans doute d’un choix personnel. L’exemple le plus frappant en est probablement le calendrier perpétuel hébraïque, à l’instar de la carte stellaire du lieu de domicile du commanditaire, et du calendrier ISO 8601 utilisé dans les affaires et la finance internationales.
Le chronographe à rattrapante à double affichage rétrograde est intéressant d’un point de vue purement horloger puisque c’est la première fois qu’une montre offre cette complication. Ici, les secondes sont réellement « détachées » puisque les deux aiguilles rétrogrades du chronographe ne se rencontrent jamais. L’indicateur du second fuseau horaire sur 12 heures, avec indicateur séparé jour/nuit est une autre innovation. Les 57 complications comprennent aussi un affichage de l’équation du temps, plus familier, un quantième perpétuel standard, des grande et petite sonneries, ainsi qu’une fonction « silence de nuit » bien pratique, qui permet de désactiver la sonnerie entre 20h et 8h.
Pour assurer une précision optimale, le mouvement à remontage manuel Calibre 3750 est équipé d’un tourbillon tri-axial à spiral sphérique, qui, lors de sa rotation, révèle toutes les 15 secondes la traditionnelle Croix de Malte dans une ouverture à 6h. Parmi les 2800 composants de ce géant mécanique de 72mm en diamètre, on ne compte pas moins de 242 rubis. Mais, aboutissement logique, les palettes d’ancre ne sont pas des rubis, mais des diamants. Avec 19 aiguilles au verso et 12 au dos de la montre, la lisibilité s’avère un problème, même sur une pièce de 98 mm de diamètre. Pour cette raison, la montre la plus compliquée du monde est livrée avec une loupe.
Avec son poids effarant de 960 grammes, la Référence 57260 équivaut à avoir en poche plus de 5 iPhone 6 plus ou 3 iPad Minis (pardon pour cette comparaison très 21e siècle !). Encore faut-il que cette poche soit assez grande pour y faire entrer une montre de la taille d’une tasse. Et pourtant cette montre n’est pas la plus lourde qui existe, puisque la Calibre 89 de Patek Philippe, qui revendiquait jusqu’à présent le titre de montre la plus compliquée du monde, accuse 1,1 kilo!
