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What goes around comes around - Hairsprings
Une montre mécanique ne peut pas fonctionner sans un spiral. Mais pourquoi y a-t-il si peu de fournisseurs et quels secrets se cachent-ils derrière sa production ? Une visite chez Precision Engineering, société sœur de H. Moser & Cie, a donné à WorldTempus une occasion exceptionnelle de l’apprendre.

Il est assez ironique de constater que la production quasi monopolistique de spiraux en Suisse partage les mêmes origines que l’un de ses rares concurrents. Car le Nivarox de Nivarox-FAR (le monopole en question, propriété du Swatch Group) fait à la fois référence à un alliage breveté et à la société elle-même. Cet alliage a été patenté par Reinhard Straumann, créateur de l’entreprise éponyme en 1934. Il a lancé son propre institut de recherche en 1954, institut qui a travaillé sur les alliages destinés à l’industrie horlogère jusqu’en 1970, avant que la société ne se diversifie dans le secteur des implants dentaires, dont Straumann AG est aujourd’hui un leader mondial.

Le petit-fils de Reinhard a fondé Precision Engineering AG en 2001 pour développer et fabriquer de nouveaux alliages utilisés dans la manufacture de spiraux. Le spiral Straumann est une marque déposée. En 2012 la société a été intégrée au sein de la nouvelle Moser Watch Holding, elle-même reprise par MELB Holding en 2012 également. En conséquence, MELB (Hautlence et H. Moser & Cie) est aujourd’hui l’une des très rares entreprises possédant le savoir-faire pour produire des spiraux. Mais ce qui différencie Precision Engineering de ses quelques rivaux c’est son niveau de transparence et de flexibilité concernant sa production de spiraux et d’échappements.

Au commencement fut l’alliage

L’élément clé pour produire un spiral est un alliage stable, fiable et compensé en température. Precision Engineering utilise sa propre combinaison secrète, du nom de PE 4000. Selon le directeur de la compagnie, Dominique Lauper (qui a travaillé pendant 12 ans chez Rolex dans la recherche et le développement), l’alliage est « similaire à celui de Rolex, mais amélioré. » D’une tonne d’alliage, Precision Engineering AG extrait 300 kilos convenant à la production de spiraux. Pour préserver le secret de la recette, les 700 kilos restants sont refondus et mélangés à d’autres métaux. C’est suffisant pour produire des millions de spiraux, puisque chaque pièce ne pèse qu’un milligramme.

La première étape du processus de fabrication consiste à faire passer le fil de lancement, d’un diamètre de 0,6mm, à travers différentes filières jusqu’à ce qu’il atteigne l’épaisseur voulue. Le fil est ensuite aplati par des rouleaux lors d’une étape de la production des plus sensibles. Comme la tolérance admise n’est que de 0,1 micron (0,0001 m, autrement dit 0,0005 dans chaque direction ; par comparaison, un cheveu humain mesure entre 17 et 181 microns), elle ne peut même pas être mesurée. C’est pourquoi la stabilité thermique est cruciale à ce stade, donc seul un opérateur est autorisé dans la salle des machines durant le processus d’aplatissement. Une fois aplati, le fil est coupé en « rubans » de 25 cm de long et enroulé à la main par lots de quatre. Pour la première fois, les rubans torsadés ressemblent à des spiraux et ils sont ensuite séparés de la façon la plus rudimentaire : en tapant simplement le boîtier qui les contient contre un genou ou en les secouant dans une boîte fermée.

Vient ensuite une autre étape critique, le traitement thermique, dans une machine plutôt quelconque qui ressemble un peu à un missile. Il s’agit en fait d’un container qui maintient les spiraux sous vide et autour duquel un fourneau mobile est enroulé. Le fourneau chauffe les spiraux à une température comprise entre 610 et 620 degrés Celsius. Comme pour la cuisson de l’émail, la bonne température est importante, mais également le niveau auquel les spiraux sont chauffés et refroidis.

Une fois la courbe terminale créée (Precision Engineering offre un choix de courbes plates ou Breguet obtenues avec des outils mais corrigées à la main), les spiraux doivent simplement être appariés avec le balancier correspondant  (ici aussi, Precision Engineering propose un choix de différents balanciers à deux ou trois rayons) et c’est prêt pour l’envoi. 50'000 pièces proviennent des machines de Precision Engineering chaque année et se retrouvent dans des montres haut de gamme comme celles de MB&F et Kari Voutilainen, ainsi que bien évidemment dans tous les modèles H. Moser & Cie.

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