Une montre Breguet mobilise une trentaine de métiers artisanaux. Parmi eux, il en est un qui s’impose de lui-même, au premier regard : le guillochage. C’est l’un des codes fondamentaux de la manufacture, sa signature esthétique. Seulement esthétique ?
Les raisons d’être du guillochage
Le guillochage répond également à des objectifs pratiques. Déjà, parce qu’une surface gravée n’est par définition plus lisse. Le guillochage permet donc d’éviter son ternissement prématuré et remédie à la fragilité des surfaces nettes ou polies facilement sujettes aux rayures, égratignures et agressions de toutes sortes.
Ensuite, le guillochage, comme la décoration d’un mouvement, permet de mieux capter la lumière qui s’y propage en surface. Pour un cadran, c’est essentiel : c’est un facteur de meilleure lisibilité. Enfin, le guillochage permet de capturer les éventuelles poussières et impuretés. L’enjeu était critique il y a deux siècles, il l’est moins aujourd’hui en raison des progrès considérables de l’horlogerie en matière d’hermétisme des boîtes. C’est l’une des raisons pour lesquelles le guillochage est devenu, aujourd’hui, une forme d’art presque exclusivement ornemental.
Un art préservé par Breguet
Il est très difficile de dater son apparition horlogère (à partir du XVe siècle en ébénisterie) mais Abraham-Louis Breguet fut, à partir de 1786 (première montre guillochée connue), celui qui l’éleva au rang d’art horloger. La reprise de la manufacture Breguet par la famille Hayek en 1999 sanctuarisa ce savoir-faire. Aujourd’hui, le guillochage chez Breguet occupe un département entier : 25 outils, 20 guillocheurs. Avec, au sommet des préoccupations, la volonté de préserver ce savoir-faire, la possibilité de se former en interne – tout simplement parce qu’il n’existe plus de formation académique de guillocheur, depuis les derniers efforts de feu Pierre Rosenberg pour transmettre son savoir.
Des motifs en constante évolution
Ce que le public perçoit moins, c’est la diversité des motifs de la manufacture. Il existe un corpus d’une dizaine de motifs qui sont incontournables, pérennes et que l’œil averti reconnaît, même sans toujours pouvoir les nommer : Clou de Paris, grain d’orge, liseré, filet, etc. Les plus fins connaisseurs pousseront la reconnaissance jusqu’au panier circulaire, cube art déco et damier croisé.
En parallèle, ces motifs plus modernes créés par Breguet sont régulièrement complétés de créations nouvelles. Par exemple, dans la dernière « Hora Mundi », la manufacture a développé un nouveau motif de vagues, que l’on retrouve sur cadran bombé dans la nouvelle collection « Marine », ainsi qu’un guilloché diamanté sur les ponts du mouvement de certaines pièces en titane. Il en allait de même pour la Musicale dont les sept motifs principaux reflètent un habile mariage de tradition et d’innovation. Tous ces motifs voient leur présence inscrite côté cadran par l’immuable mention « Swiss Guilloché Main », révélant un art où seul l’œil apprécie ces motifs dont la profondeur n’excède pas 5/10e de millimètre...
Les sept motifs guillochés sur le cadran du Réveil du Tsar :
1. Clou de Paris sur le cadran principal
2. Satiné circulaire sur le tour d’heures
3. Sauté piqué (ou liseré) sur la minuterie
4. Pointes de diamant (ou Pavé de Paris) sur le sous-cadran
5. Vieux panier sur la partie supérieure du sous-cadran
6. Décor flammé sur la partie inférieure du sous-cadran
7. Grain d’orge circulaire sur le sous-cadran des petites secondes (et sur le rotor)