Le maillon fort

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The strongest link - Watch bands
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Ces trois derniers mois ont vu d’importants développements apportés au bracelet. Il ne faut pas les confondre avec de simples évolutions de modèles existants : c’est une véritable nouvelle génération qui émerge.

Le bracelet est-il partie intégrante de la montre...ou un accessoire ? Posez la question à dix personnes, il y aura cinq réponses dans un camp, cinq dans l’autre. Les premiers soutiendront qu’une montre peut parfaitement fonctionner sans son bracelet, lequel n’est donc qu’un accessoire. Les autres répondront qu’il est partie intégrante de la montre et parfois extrêmement technique : ce n’est nullement un « simple » accessoire, il en est indissociable. Pour preuve, une montre de poignet, sans bracelet, ne pourrait même plus s’y attacher !

Vaine querelle sémantique ? Pas tant que cela. Lorsque l’on voit les récents investissements consentis aux bracelets du XXIe siècle, on comprend l’importance qu’il revêt aux yeux des clients – et donc des marques. Cette tendance de fond s’inscrit dans une généalogie sur trois générations.

Génération I et II : les Pionniers

La tendance première, après que le cuir et l’acier aient affirmé leur suprématie, fut de simplement prolonger la matière utilisée à titre principal sur la boîte. Ainsi sont nés les bracelets en titane ou en céramique. Rado, Chanel, ou plus récemment Ralph Lauren sont quelques-uns des nombreux représentants de cette céramique appliquée au bracelet.

Chanel - J12

Les maisons joaillières avaient toutefois anticipé depuis longtemps cette démarche visant à prolonger la matière de la boîte sur le bracelet.  Les garde-temps féminins richement sertis sont depuis toujours déclinés dans des modèles rivière dont les bracelets sont également sertis. Le cas le plus fréquent : une boîte habillée de diamants suivie d’un bracelet serti de la même pierre. Dernièrement, le joaillier Graff a dévoilé sa justement nommée « Fascination », une pièce à la boîte en forme de poire et au bracelet intégré tous deux intégralement sertis. La maison Chopard est également très en pointe sur le sujet avec sa collection « Heure du diamant ».

Ces maisons forment la deuxième génération des artisans du bracelet moderne. Elles sont celles qui ont quitté le traditionnel cuir, acier ou or pour offrir d’autres matériaux. Mais c’est bel et bien une troisième génération qui est en train d’éclore.

Génération III : les Conquérants

Plus libre, plus créative, elle utilise les techniques de pointe pour donner vie à des combinaisons de matériaux inédites. Lors du dernier SIHH, c’est par exemple Roger Dubuis qui s’est illustrée avec la première lunette de caoutchouc serti. C’est une combinaison unique dont on pourrait attendre qu’elle s’étende prochainement au bracelet. Cela donnerait un souffle nouveau aux bracelets « sport chic » que l’on a vu naître dans les années 70. A Baselworld, la manufacture Ulysse Nardin a elle aussi dévoilé son modèle Marine Perpetual équipé d’une lunette similaire. Le caoutchouc serti pourrait ainsi devenir l’une des prochaines tendances du bracelet.

Roger Dubuis - Excalibur Spider Tourbillon Volant Squelette

Hysek vient également d’ouvrir une voie intéressante. La manufacture a développé  l’insertion, dans les bracelets caoutchouc, d’inserts décoratifs en acier, titane ou or,  reprenant la lettre H d’Hysek. Un axe de rotation est également ajouté, en plus des cornes pivotantes, à l’extrémité de ce décor H, afin de permettre un ajustement optimal sur le poignet. Ce bracelet se trouve dans la collection Abyss, et notamment sur les nouvelles Abyss 44mm Chronographe.

Hysek - Abyss 44mm Chronographe

Dans la même fibre, Bell & Ross a développé sur son modèle BR- X1 Tourbillon un bracelet dont la base est en FKM (caoutchouc high-tech haute résistance) avec trous d’ardillon inclinés et renfort sur le dessus, ainsi que des appliques en alligator collées et cousues sur le caoutchouc. Un procédé proche a été développé par Montblanc sur le bracelet de sa Timewalker Extreme DLC. Sa base en caoutchouc noir « vulcarboné » lui confère une solidité et une souplesse extrêmes. Le cuir cousu sur la surface supérieure du caoutchouc est soumis à un traitement par imprégnation qui recouvre le cuir et s'y lie de manière indissociable pour accroître sa résistance naturelle. Ce procédé de traitement du cuir permet de créer un matériau extrêmement performant, qui protège efficacement le cuir contre l'abrasion, l'eau et le feu.

Montblanc - Timewalker Extreme DLC

De la gourmette au bracelet deux-en-un

Il n’est toutefois nécessaire d’être à l’avant-garde de techniques de pointe pour développer de nouvelles combinaisons de matériaux...ou de forme. C’est un domaine où Richard Mille s’est par exemple illustré au dernier SIHH avec un imposant bracelet 100% or sculpté tel une gourmette. Massif, imposant, terriblement années 80 – et donc actuel – il sera destiné à deux modèles féminins exclusivement, les RM 07-01 et RM 037.

Richard Mille - RM 07-01

Enfin, il y a eu l’initiative très heureuse – et ingénieuse – de Jeanrichard. La dernière collection de sa Terrascope, qui vient d’être dévoilée à Baselworld, met à l’honneur un bracelet réversible en caoutchouc vulcanisé. D’un côté, une impression alligator noir, de l’autre un motif rayé à l’esprit sportif. L’idée du « deux bracelets en un » est séduisante et convaincante. Seule réserve : il manque un système de retournement rapide par lequel le propriétaire pourrait choisir, seul et en un clin d’œil, quelle face porter à la vue. A l’heure actuelle, un passage chez l’horloger s’impose, ce qui limite fortement la possibilité de jouer à l’envie avec cette néanmoins très astucieuse réversibilité.

Jeanrichard - braclet réversible