Un voyage astronomique

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An Astronomical Journey - Jacob & Co.
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Jacob & Co est peut-être mieux connu dans certains pays pour ses créations joaillières extravagantes que pour ses montres haut de gamme, mais plus pour longtemps. Le nouveau CEO, Bertrand Savary, partage sa vision pour faire durer l'entreprise sur le long terme.

Récemment, il semble que Jacob & Co. ait vraiment commencé à faire connaître ses garde-temps à un public plus large, même si l'Astronomia Tourbillon a été lancé en 2014. N'était-ce qu'une question de temps ou y a-t-il eu un changement d'orientation marketing qui a catalysé cette vague de sensibilisation ?
Sur le plan communicationnel, nous commençons à nous concentrer de plus en plus sur le digital avec Instagram, entre autres, et cela a contribué à accroître notre visibilité. Auparavant, nous étions une marque de niche – en fait, nous sommes toujours une marque de niche actuellement ; nous ne produisons pas des milliers et des milliers de montres. Nous devons encore améliorer la communication autour de nos montres et de la marque, mais cela nous aide beaucoup, en termes d'exposition, d’avoir Jacob [Arabo, fondateur de Jacob & Co.] et ses connaissances. La popularité de la marque dans certains pays, basée sur notre expertise en joaillerie, y contribue également.

Qui est le client des montres Jacob & Co. ?
En ce moment, je dirais que le marché américain est très important pour nous. Nous ouvrons une boutique à Pékin, dans le centre commercial haut de gamme SKP Beijing, car nous sommes en train de développer le marché chinois. En Thaïlande également nous allons ouvrir une boutique la première semaine de novembre et nous prévoyons d'aller dans des pays comme le Koweït et l'Arabie Saoudite avec des boutiques monomarques gérées par des tiers (boutiques externes). En Amérique latine, le Mexique est actuellement le marché qui fonctionne le mieux pour nous, en raison de son énorme clientèle très sophistiquée qui aime notre style de montres.

Je dirais que Jacob & Co. s'adresse principalement aux marchés matures. Si vous achetez une montre Jacob & Co., ce n'est certainement pas votre première montre. Les personnes qui achètent nos montres connaissent bien la haute horlogerie.

Un voyage astronomique

Y a-t-il une grande différence dans la façon dont les clients masculins et féminins abordent Jacob & Co. ? Et quelle est la stratégie de Jacob & Co. vis-à-vis de cette clientèle ? 
Aujourd'hui, je dirais que 70 % de nos montres sont achetées par des hommes, alors que la joaillerie est bien sûr un marché féminin. Bien qu'il s'agisse de publics distincts et que nous ayons des personnes différentes au sein de l'entreprise en charge de la communication horlogère et joaillière, je crois fermement que nous devons rapprocher ces deux secteurs.

Pour l'instant, nous sommes déjà dans une position très forte. Il y a cette séparation dans l’esprit de nos clients - nos clients horlogers nous voient comme une marque masculine et nos clientes joaillières nous considèrent comme une marque féminine. Cela fonctionne très bien pour nous parce que, si vous faites ne serait-ce qu'une simple comparaison avec d'autres marques aujourd'hui, il y a des entreprises qui n'ont jamais été en mesure de vendre des montres aux hommes parce qu’on la considère principalement comme une marque de bijoux qui s'adresse aux femmes. Nous n'avons pas ce problème.

De plus, nous sommes une marque jeune : Jacob a fondé son entreprise il y a 34 ans et nous avons commencé avec les montres il y a 18 ans. La jeune génération prête moins d’importance au genre de la collection (homme-femme) que les précédentes, mais nous sommes jeunes et assez agiles pour ne pas risquer de stagner et de perdre des clients.

Vous avez acquis votre expérience professionnelle auprès de grands groupes horlogers et de sociétés indépendantes, dans des segments de prix différents et sur des marchés variés. Qu'apportez-vous de particulier et de nouveau au poste de CEO de Jacob & Co. ?
Jacob & Co. se trouve actuellement à un tournant très important, c'est pourquoi il est crucial d'organiser nos structures internes, de mettre en place des opérations internationales de développement commercial et de marketing. J'ai travaillé auparavant au sein de grands groupes où l'organisation interne est très forte mais aussi chez de petites marques qui s'appuient davantage sur une stratégie et des partenaires innovants. J'ai vécu et travaillé à Hong Kong et aux Etats-Unis, et je pense que cela me donne une perspective très internationale et la vision nécessaire pour structurer l'entreprise selon nos besoins. 

Par exemple, la flexibilité dont nous disposons aujourd'hui en tant que marque relativement petite et indépendante est étonnante. Le délai de mise sur le marché d'un produit est très court par rapport à ce qu'il serait dans une société plus corporatisée. Il nous faut deux minutes pour parler directement à Jacob et obtenir une réponse du sommet de la hiérarchie, alors qu'une décision similaire au sein d'un conglomérat prendrait des mois, après de nombreuses présentations et séances de comités. Le timing ne pourrait donc pas être meilleur pour nous en ce moment ; et si tout se passe bien, nous pourrons passer au niveau supérieur.

Etant donné que la réputation de Jacob & Co. grandit dans le domaine de l'horlogerie innovante et haut de gamme, envisagez-vous de vous engager sur la voie de la « manufacture » ?
Je pense qu'il est possible d'intégrer certaines parties de la chaîne d'approvisionnement, mais pour nous, le fait de travailler avec les meilleurs en Suisse depuis plus de 15 ans nous donne une énorme flexibilité que nous ne voulons pas perdre. La plupart du temps, nous sommes les principaux clients de nos fournisseurs ; nous avons donc déjà cet avantage en termes de coûts et de livraison. Mais si nous prenions l'initiative d'intégrer nos fournisseurs et leurs compétences, ce serait très difficile, à mon avis. Le coût du produit exploserait, d'une part. Il y aurait beaucoup de redondance interne qui n’existe pas avec un fournisseur externe ayant de nombreux clients. Dans le passé, tout le monde, même les meilleures marques, faisait appel à des fournisseurs externes. Beaucoup le font encore. Et dans certains cas, ceux qui ont tenté la verticalisation se sont vite rendu compte qu’elle ne fonctionnait pas. Certaines entreprises ne sont tout simplement pas conçues pour faire partie d'un système plus vaste et nous avons constaté dans le passé que des fournisseurs prospères ne l’étaient plus après avoir été intégrés à un groupe. De plus, il y a beaucoup de jeunes talents créatifs qui souhaitent travailler dans une petite équipe chez des fournisseurs externes, où ils peuvent s’impliquer dans de nombreux projets au lieu de faire partie d'une grande armée. 

C'est très important pour moi parce que je pense qu'une grande partie de la créativité et des nouvelles idées que nous voyons actuellement viennent de ces fournisseurs. La raison est simple :  ils ont besoin d'être inventifs - c'est ainsi qu’ils existent. Nous avons nos propres ingénieurs en interne, qui conçoivent ce que nous voulons en interne. Il est préférable de faire appel à du personnel interne pour cela, car il peut directement mettre les idées de Jacob sur papier. Ensuite, nous nous adressons aux meilleures personnes externes pour concrétiser ces idées.

Quelle est la première chose que vous souhaitez faire en tant que CEO de Jacob & Co. ?
Mon premier travail consiste à revoir notre organisation et à voir quelles structures doivent être mises en place. Dans un même temps, nous devons développer nos ventes et notre marketing à l'international. Nous avons réalisé d'excellentes ventes à ce jour, grâce à l'incroyable réseau de Jacob, mais ce qui est important pour l'entreprise est d'avoir un réseau de distribution international. Il est de ma responsabilité de nous amener sur certains marchés clés qui nous manquaient dans le passé, comme la Chine et la Thaïlande. En termes de ventes, beaucoup sont conclues lors de grands événements ponctuels avec Jacob, mais la base de données clients des détaillants génèrent des ventes régulières 

C’est pour cette raison que nous nous orientons davantage vers des boutiques externes, qui peuvent proposer à la fois des montres et des bijoux, que vers les détaillants, qui vendent principalement des montres. Et nous n'avons pas besoin d'être partout - nos produits sont de toute façon très haut de gamme et de niche - mais nous devrions être présents dans chaque grande capitale.

Cela reflète bien sûr la démographie de votre clientèle ?
Nous étions présents à l'événement de notre partenaire, Bugatti, et nous avions des clients venus du monde entier. Nous avons vraiment la chance de ne pas être focalisés sur un marché unique et donc d’avoir un bon équilibre mondial. Nous ne courons pas le même risque que d’autres marques, trop focalisées sur un seul marché. Et parce que nos produits sont si spécifiques et haut de gamme, nos clients recherchent des montres similaires, peu importe d'où ils viennent. Nous n'avons pas un certain type de client dans les Amériques et un type de client complètement différent en Asie. De plus, ils n’ont pas peur de porter ce qu'ils veulent. Certains diront que nos montres sont trop grandes ou trop brillantes, mais nos clients s'en fichent. Ils sont fidèles à eux-mêmes.

Un voyage astronomique

 

Qu'aimeriez-vous changer dans la façon dont les gens voient Jacob & Co. ?
Une ou deux choses. L’autre jour, j'ai montré à un ami des montres Jacob & Co., notamment les Palatial, au design très classique. Il a dit : « Je ne savais pas que vous faisiez ce genre de montres. » De plus, nous communiquons surtout sur des pièces très haut de gamme et parfois les gens regardent d'abord les diamants et ne réalisent pas qu’il y a un mouvement triple tourbillon à l'intérieur de la montre. Combien de marques ont un tel niveau de technique horlogère ?

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