Interview de Christoph Grainger-Herr

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Interview with Christoph Grainger-Herr - IWC
Alors qu'IWC fête ses 150 ans, son CEO dévoile au SIHH une nouvelle collection, évoque l’essor de la marque et le principal défi de la haute horlogerie en 2018.

IWC célèbre cette année son 150e anniversaire, de quelle manière?
De plusieurs manières, à commencer par la Collection du Jubilée, dont l’essence pioche dans les designs iconiques d’IWC à travers les générations, passées et contemporaines. Il s’agit d’une nouvelle collection inspirée par l’esprit entrepreneurial industriel du fondateur d’IWC, l’horloger Florentine Ariosto Jones. Les adeptes des couleurs classiques d’IWC, le bleu et le blanc, vont adorer cette collection, qui comporte bien sûr un calendrier perpétuel parmi ses 27 références. En second lieu, nous ouvrons notre nouvelle manufacture qui va marquer un temps fort de l’histoire d’IWC. Elle témoignera de notre savoir-faire en termes d’ingénierie et de design, et permettra d’assoir encore plus l’aura de la marque en procurant aux visiteurs une expérience fabuleuse et unique, tout en affirmant sa confiance et sa solidité dans l’avenir pour les prochains 150 ans. Enfin, nous organisons une exposition commémorative itinérante en six étapes de deux semaines, avec une vingtaine de pièces historiques et la collection actuelle, qui commencera en mai aux USA pour s’achever sans doute au Moyen-Orient en fin d’année.

Interview de Christoph Grainger-Herr

A propos de la collection du Jubilée, depuis combien de temps travaillez-vous dessus ?
Nous avons commencé il y a deux ans et demi et nous y consacrons vraiment de manière intensive depuis un an et demi. Elle comporte deux mouvements complètements nouveaux et un calibre modifié de manière significative. Il s’agit ainsi de la première apparition du calibre 94 dans le modèle Tribute to Pallweber à heures sautantes, qui rend hommage à l’horloger ayant équipé nos montres de poche dans les années 1880. Cet affichage digital donne un cadran très pur à la simplicité inversement proportionnelle à la complexité de son mouvement, du fait de l’indication des heures sautantes à midi et des minutes sautantes au centre, avec une petite seconde traditionnelle à six heures. L’autre création de mouvement concerne le calibre automatique 82 qui va équiper les montres Da Vinci de la Collection du Jubilée.

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En quoi les clients finaux bénéficieront de la nouvelle manufacture ?
Le changement est radical, car aujourd’hui nous sommes encore dans les mêmes bâtiments dont Jones a érigé les murs dans les années 1870 ! Du fait de son espace restreint dans la vieille ville de Schaffhouse, ses extensions successives se sont effectuées de façon pas toujours optimale, rendant les visites parfois difficilement compréhensibles lorsqu’il s’agit de saisir les différentes étapes de la production. Avec la nouvelle manufacture, tout devient logique et beaucoup plus rationnel, depuis la création de mouvements jusqu’à l’emboitage. D’un point de vue pédagogique, l’expérience s’avère nettement enrichie. Par ailleurs, nous serons en mesure d’accueillir un tiers de visiteurs en plus.

D’un point de vue stratégique, quelles sont les trois nouveautés les plus importantes ?
Tout d’abord, je distingue deux focus majeurs pour IWC au SIHH. Nous dévoilons de nouvelles complications, et notamment un tourbillon à calendrier perpétuel, un tourbillon à force constante et naturellement la Tribute to Pallweber, qui mettent en scène le savoir-faire manufacturier d’IWC. Ensuite, je mettrais en avant des nouveautés stratégiques telles que la Portugieser Chronographe 3716, avec notre calibre chronographe 69, la Portugieser Chronographe qui dévoile son mouvement au dos du boîtier, ou encore la nouvelle Da Vinci automatique. La Collection du Jubilée représente la réalité d’IWC aujourd’hui, une offre complète avec des produits d’appel et de la très haute horlogerie.

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Vous travaillez pour IWC depuis 2006, quels ont été les changements les plus significatifs ?
La croissance de la marque a été phénoménale. Quand j’ai commencé nous formions une toute petite équipe, ne disposions pas de notre propre distribution, organisions de petits événements. Suivre son essor fut fantastique. Maintenant les clients peuvent se rendre dans des boutiques IWC sur les plus grandes avenues du monde entier. International Watch Company est véritablement devenue internationale, du Japon jusqu’en Amérique du Sud. Notre maîtrise industrielle et notre savoir-faire horloger se sont métamorphosés ces trois dernières années, tandis que notre design ne se base plus uniquement sur trois lignes iconiques mais sur un portefeuille complet de familles.

IWC a remis l’accent sur les modèles pour femmes depuis deux ans, avec quel succès ?
Très important. D’une manière générale, le marché des montres féminines augmente, notamment par le biais de grands marchés comme la Chine et le Moyen-Orient. Il faut savoir aussi que les femmes ont toujours acheté des montres IWC, même pour hommes, et qu’IWC a créé des montres pour dames depuis le début de son histoire et s’était seulement arrêté d’en créer pendant quelques années après la crise de 2008. Nous n’en vendons pas uniquement en Asie, mais également en Europe et en Suisse, de manière croissante. En outre, les plateformes comme Mr Porter et Net-à-Porter, dont plus de 40% de la clientèle est féminine, nous ouvrent les portes d’un segment qui ne viendrait pas forcément nous rendre visite chez un détaillant et qui nous découvre sur ces sites alors qu’elles s’intéressaient à une robe ou un sac. Ce potentiel n’est pas négligeable. Nous présentons d’ailleurs cette année encore de nouvelles montres pour dames.

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D’après vous, quel est le principal défi auquel doit faire face la haute horlogerie en 2018 ?
Notre industrie doit prendre conscience du fait qu’elle vend des produits qui ne sont pas essentiels et dont la valeur est très émotionnelle. Nos concurrents ne sont plus des marques horlogères mais notre secteur se confronte à d’autres types d’expérience du luxe. Quand ils se rendent dans des hôtels cinq étoiles, achètent une belle voiture ou consomment d’autres biens haut de gamme, nos clients s’habituent à une qualité de service et de fonctionnalité qu’ils peuvent très bien comparer à celle à laquelle ils s’attendent en achetant une montre. L’horlogerie n’a jamais été la branche la plus innovante dans le domaine du service, nous aurions tort de croire que notre appartenance au secteur du luxe nous permet de ne pas tenir compte des attentes de nos clients en matière d’expérience et d’interactivité avec la marque.

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