Lorsque Romain Gauthier était enfant, il avait une conscience aiguë des montres. Après tout il a grandi au Sentier, pas très loin de grandes maisons comme Jaeger-LeCoultre, Audemars Piguet, Vacheron Constantin et d’autres.
On attendait de lui, et de beaucoup de ses amis, qu’ils travailleraient dans ces entreprises, perpétuant ainsi la tradition familiale. Romain Gauthier a effectivement suivi cette voie, obtenant son diplôme à l’école technique d’horlogerie au Sentier. Mais après avoir travaillé quelque temps dans une entreprise de fabrication de mouvements, il a décidé qu’il voulait aller plus loin.
Parallèlement à son travail, il a repris ses études pour obtenir un MBA et a consacré une partie de sa thèse à l’élaboration théorique de sa propre société. Après avoir obtenu son diplôme avec mention, il a commencé à plancher sur son premier mouvement. De 2002 à 2005, Romain Gauthier travaille à plein temps tout en élaborant son premier calibre pendant la nuit et les week-ends. Grand amateur de cinéma, il a mis en pratique ce qu’il avait appris en regardant des films hollywoodiens pendant des années : « Si vous avez un rêve, vous devez essayer de le réaliser. Si vous ne le faites pas, vous le regretterez toute votre vie », affirme-t-il.
L’esquisse sur ordinateur de son mouvement terminée, il la montre à son patron de la société de fabrication de mouvements. « Il m’a proposé de me laisser utiliser les machines de l’entreprise pendant les week-ends et la nuit, alors j’ai fabriqué les éléments du premier mouvement tout seul », se souvient-il, reconnaissant de l’opportunité qui lui a été offerte. « Cela a été déterminant pour me permettre d’arriver là où j’en suis aujourd’hui ». Cela fait dix ans cette année que Romain Gauthier a lancé sa propre marque. « Cela a pris dix ans de construire et réussir une manufacture au plus pur sens du terme, indépendante au niveau de la création, de la production, de la finition et de l’assemblage », explique-t-il. « Nous disposons maintenant de 700 mètres carrés et de 16 collaborateurs. Il est temps désormais de communiquer sur nous, car seul un petit nombre de collectionneurs nous connaissent ou ont vu nos montres ».
« Je ne suis pas inquiet du tout de l’impact que pourraient avoir la montre d’Apple et autres montres connectées. »
« Je suis très fier de mon équipe, des compétences que nous avons pour fabriquer de merveilleuses montres, d’être une manufacture et de perpétuer l’authentique signification du Swiss Made, d’être novateurs et de contribuer au patrimoine de l’horlogerie suisse », poursuit-il.
Cette année à Baselworld, Romain Gauthier a présenté la Logical One Black Titanium, une montre étonnante dont l’allure est nettement plus sportive que ses précédentes créations. « Lorsque je commence à dessiner une nouvelle montre, je pense avant tout à la perfection, c’est mon objectif, réaliser la plus belle montre du monde », dit-il. « Ensuite, la combinaison du dessin et de la technique sont nécessaires pour créer des pièces exceptionnelles. Comme nous avons la capacité de tout faire par nous-mêmes, nous sommes libres de choisir le design et la technique. Le défi du design, c’est que nous ne pouvons pas en créer un universel, qui plaise à tout le monde. Et c’est bien ainsi, un monde de clients libres d’esprit. Nous devons créer des designs qui continuent à procurer de l’émotion et du rêve. »
« Je ne suis pas inquiet du tout de l’impact que pourraient avoir la montre d’Apple et autres montres connectées. Ce sont des gadgets, et nos clients recherchent des montres mécaniques, exclusives et exceptionnelles qui peuvent virtuellement durer éternellement, et non pas un cycle d’existence de deux à cinq ans en raison des évolutions électroniques. Les objets mécaniques seront de plus en plus appréciés à l’avenir, j’en suis persuadé. »
