Interview de Laurent Ballesta

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Interview with Laurent Ballesta - Blancpain
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WorldTempus s’est entretenu avec Laurent Ballesta, biologiste marin, photographe sous-marin et ambassadeur de Blancpain, sur son partenariat avec la marque et son dernier documentaire.

Lors du vernissage d’une exposition à l'Airside Centre dans l’aéroport de Zurich consacrée au « Blancpain Ocean Commitment », ouvert jusqu'au 12 février 2017, j’ai eu la chance d’assister à une avant-première de l’extraordinaire nouveau documentaire de Laurent Ballesta, Antarctica, sur les traces du manchot Empereur. Le tournage a eu lieu en Terre Adélie où les plongeurs, qui peuvent se targuer de plusieurs exploits novateurs en matière de plongée, ont eu accès pour la première fois à cette zone de l'Antarctique. Le documentaire sera diffusé pour la première fois sur la chaîne européenne Arte demain soir à 20h50 en français et en allemand. Le soutien de Blancpain aux expéditions de Laurent Ballesta n’est qu’un aspect du programme « Ocean Commitment » de la marque, dans lequel elle a investi plusieurs millions de francs suisses durant les sept dernières années.

Laurent, comment vous préparez-vous pour une expédition de ce type ?

La préparation a duré deux ans. Nous pensions pouvoir le faire en une année mais six semaines avant le départ nous avons eu un problème de papiers et nous avons dû attendre la saison suivante. Mais cela nous a permis d’envoyer un peu de matériel en avance, car la logistique nécessaire est lourde. Nous avons par exemple envoyé une chenille que nous avions achetée. Nous avons également acquis une chambre de décompression portable. Au total environ cinq tonnes de matériel ont été envoyées. Sur place nous avions un spécialiste de la sécurité hyperbare ainsi qu’un médecin.
Pour les plongées elles-mêmes, nous avions des systèmes de recycleur en circuit fermé, ce qui nous permettait de rester dans l’eau jusqu’à six heures d’affilée. Nous disposions également d’un chauffage électrique qui maintenait nos mains plus au moins au chaud. Même si nous avions la sensation qu’elles étaient glacées, nous pouvions encore bouger nos doigts donc nous n’avions aucune excuse pour sortir de l’eau. Alors avec une certaine dose de responsabilité et de fierté, nous repoussions nos limites pour ne jamais être la première personne à refaire surface. C’est ainsi que nous avons réussi à établir quelques premières mondiales en matière de plongée polaire.

Interview de Laurent Ballesta

Mais le côté performance n’était sans doute pas l’objectif premier de cette expédition ?

En fait, d’une certaine façon, si. Car en Antarctique, plus vous plongez profondément plus c’est intéressant. Dans les régions tropicales, c’est exactement l’inverse.

Quelle est pour vous l’importance du soutien de Blancpain?

Ce genre d’expédition requiert évidemment une énorme mise de fonds, le soutien de Blancpain est donc essentiel ne serait-ce que pour cette raison. Ni la télévision française ni moi ne pourrions financer seuls ce genre d’expédition. Mais au-delà de cela la marque jouit d’une grande réputation de sérieux. Si j’étais sponsorisé par une autre marque, les choses seraient différentes. Je n’aurais pas la même crédibilité vis-à-vis des chercheurs, par exemple, ou de chaînes de télévision intellectuelles comme Arte, qui va diffuser le documentaire. C’est flatteur pour moi car c’est une marque très prestigieuse. Le partenariat fonctionne aussi très bien parce que les montres Blancpain présentent des éléments de technologie, mais aussi d’art et d’artisanat. C’est exactement le même mélange que je trouve dans mon propre travail. Cela nous rapproche.

Alain Delamuraz, le directeur du marketing de Blancpain, a déclaré que le plus important dans l’implication de la marque pour la préservation des océans c’est que les résultats sont concrets, rappelant les trois millions de mètres carrés d’océan qui ont été protégés. Quels résultats votre expédition vous a-t-elle apporté personnellement ?

Dans certains cas, il est trop tôt pour le dire parce que la recherche scientifique prend du temps à être publiée. Il y a l’examen des pairs et il y a des protocoles à respecter. Mais dès le début nous savions que nous allions apporter notre contribution à la science, parce que l’Institut Français pour la recherche polaire nous a offert onze postes d’amarrage. Il ne faut pas oublier que ces onze postes d’amarrage étaient effectivement retirés à d’autres chercheurs. Tous les chercheurs français, et même les chercheurs d’autres pays, peuvent soumettre leurs projets de recherche à l’Institut. S’ils sont acceptés, l’Institut paie tous leurs frais. C’est la première fois que des gens comme nous sont accueillis sur la base, donc il est clair qu’il y avait un intérêt scientifique dès le départ. Evidemment il y aussi une dimension de relations publiques, mais nous avions pris l’engagement que toutes les images, après leur utilisation commerciale dans le film, seraient données à la communauté scientifique libres de droits. Donc le mois dernier, une fois le film terminé, nous avons envoyé un ensemble de 800 photos et des descriptions complètes de nos plongées. De nombreuses espèces étaient connues, mais seulement à partir d’animaux morts. Dans la plupart des cas, c’était la première fois qu’on les voyait dans leur environnement naturel. Par exemple le crabe qui vit à l’intérieur de la méduse que l’on voit dans le film. Il s’agissait de deux espèces connues, mais personne ne savait que le crabe vivait en fait dans la méduse.

Comment communiquez-vous avec votre équipe sous l’eau ?

Tout d’abord, nous savons tous ce que nous faisons et une fois que nous sommes sous l’eau nous réussissons à communiquer et même à nous parler. Comme nous utilisons des recycleurs il n’y a pas de bulles, donc même si nous avons quelque chose dans la bouche nous pouvons quand même parler, tant que nous nous en tenons à des choses simples. Nos voix portent en fait assez loin.

Interview de Laurent Ballesta
De nombreux plongeurs se fient à une montre de plongée mécanique comme mesure de protection, puisque sa technologie traditionnelle ne nécessite pas d’électricité ou d’électronique. Mais votre vêtement étanche fait 5mm d’épaisseur et votre combinaison de plongée 12mm. Parvenez-vous à mettre une montre Blancpain par-dessus tout ça ?

Malheureusement non, mais j’ai toujours ma X-Fathoms dans ma poche ! Lorsque j’étais enfant, les gens me disaient toujours que les ordinateurs de plongée ne perceraient jamais puisqu’on ne peut pas prendre d’électronique sous l’eau. La X-Fathoms me sert toujours d’assistance. L’ordinateur de plongée me fournit une énorme quantité d’informations. Pas seulement l’heure et la profondeur, il analyse aussi en temps réel le mélange de gaz que je respire, il ajuste continuellement le mélange en fonction de la profondeur et programme mes paliers de décompression. Tout cela est d’une vitale nécessité, bien sûr, mais si un gros problème surgit je n’ai besoin que de deux choses pour sauver ma vie : l’heure et la profondeur. Si l’électronique ne fonctionne pas, la X-Fathoms me donne ces deux informations et je sais que cela me tirera d’une situation délicate.

Interview de Laurent Ballesta

Etes-vous déjà en train de planifier votre prochaine expédition ?

Oui, les préparatifs ont déjà commencé. Une des équipes est en train de chercher les bateaux nécessaires et nous allons retourner sur les lieux de la deuxième expédition en 2014 pour filmer la suite. Je veux filmer des requins chassant en groupe la nuit pour savoir s’il y a un modus operandi ou une tactique. Les gens parlent de la chasse frénétique des requins et du fait qu’ils deviennent fous si on verse ne serait-ce qu’une goutte de sang dans l’océan. Mais je ne crois pas que cela corresponde à la réalité et je pense qu’en fait ils sont beaucoup mieux organisés.

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