Quelles leçons tirer pour l’horlogerie ?

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What are the lessons for the watch industry? - The strong Swiss franc, one year on...
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Elle avait résisté à toutes les crises, et en 2015, elle a reculé. En ordre de marche pour le SIHH, l’industrie horlogère devra démontrer sa capacité à s’adapter à un contexte mondial de plus en plus incertain.

15 janvier 2015 : à la surprise générale, la BNS annonce l’abolition du taux plancher de 1,20 franc pour 1 euro. L’espace d’un battement de cils face à un écran d’ordinateur et la devise européenne s’effondre par rapport au franc. Très vite, une déferlante d’incertitude s’installe chez les exportateurs suisses, l’industrie horlogère est en première ligne. Après avoir atteint des sommets en 2014, après avoir exporté pour 22,2 milliards de francs sur cette même année, le fleuron de l’économie Suisse a tiré la sonnette d’alarme. Gel des recrutements pour les uns, chômage partiel pour les autres ou carrément plan social dans certains cas, les horlogers ont été contraints à la prudence dans un contexte où la demande mondiale ne semblait plus pouvoir offrir des perspectives de croissance comme par le passé.

Mais l’affolement de janvier s’est, en premier lieu, inscrit dans la continuité du premier recul des exportations enregistré au quatrième trimestre 2014. Si on peut s’attendre à ce qu’une devise forte grève le niveau des exportations, l’appréciation du franc suisse a surtout agi comme révélateur d’un contexte économique et politique mondial éminemment plus complexe et qui concerne l’industrie horlogère au premier chef.

Turbulences
Crises politiques, économiques, monétaires, l’horlogerie suisse a du pain sur la planche. Ses principaux clients ont traversé des vents contraires en 2015. Les chiffres de la Fédération de l’industrie horlogère sont formels, sur le marché asiatique, on enregistre une baisse des exportations, en valeur sur la période janvier-novembre, de 10,2% par rapport à l’année précédente. Le ralentissement de la croissance chinoise a lourdement pesé sur le bilan de l’industrie. Le conflit syrien et la baisse du cours du pétrole ont impacté l’économie des pays du Golf et le Moyen-Orient est en retrait de 3,8% sur la même période. La Russie, toujours empêtrée dans son bras de fer larvé avec l’Occident,  enregistre un retrait digne de la stratégie de la terre brulée. L’effondrement du rouble de la fin 2014, conjugué à l’envol du franc suisse, a eu pour conséquence de faire reculer la valeur des exportations de 33,8% vers ce pays, toujours sur la période janvier-novembre 2015.

Quelles leçons tirer pour l’horlogerie ?

Stabilité
Au niveau mondial, la valeur des exportations entre janvier et novembre 2015, par rapport à l’année précédente, recule de 3,8%. Même si l’horlogerie ne nous avait pas habitué à des chiffres négatifs, les volumes et les montants enregistrés flirtent toujours avec les niveaux records enregistrés depuis 2011. Pendant ce temps, un rayon de soleil brille tout de même au-dessus du continent européen qui progresse de 6,7%. Un très bon score pour ce marché qui pèse pour près d’un tiers dans les exportations du secteur.

Les résultats de 2016 dépendront donc en premier lieu de l’amélioration de la situation politique et économique du côté des plus gros clients de l’horlogerie suisse. La stabilisation du franc aux alentours de 1,10 CHF pour 1 euro devrait permettre aux entreprises d’adapter leurs structures de coûts. Car si l’envolée du franc est loin d’être l’unique facteur expliquant la baisse des exportations de garde-temps, sa stabilité est essentielle pour contrebalancer l’incertitude politique et économique qui règnera en 2016. Pour l’heure, le risque d’une nouvelle appréciation n’est pas d’actualité au vu de l’amélioration des indicateurs économiques en Europe et aux États-Unis, mais ce scénario ne peut toutefois être complètement écarté. Le franc suisse est une valeur refuge et son cours pourrait repartir à la hausse à la première défaillance de ces marchés. D’après le FMI, la croissance chinoise devrait, de son côté, poursuivre sa baisse pour atteindre 6,30% cette année. Les maisons horlogères qui se sont concentrées sur la diversification de leur clientèle seront donc les plus à l’abri en cas de coup dur. Comme le veut l’adage bien connu dans le monde des affaires : « Il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier » !