Les montres américaines relèvent le défi

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En avant-première, le Sablier du Temps - Badollet
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Où en est l'industrie horlogère américaine, quasiment moribonde voici quelques années?
Les montres américaines relèvent le défi
 
Depuis quelques saisons, on peut remarquer le regain d'énergie affiché par les horlogers américains. Même si l'industrie locale n'a pas exporté plus que 6,5 millions de montres made in USA en 2007, contre 10,7 millions en 2005 (le reste est désormais délocalisé en Asie), les indices d'une renaissance se multiplient. Les leaders locaux ont relevé la tête. Le groupe Timex est désormais très actif dans les montres de mode (licences Versace, Ferragamo, Valentino, etc.). Mais aussi dans les nouveaux concepts horlogers (TX, Nautica) ou même la haute horlogerie (le rachat de la maison Vincent Bérard annonce de nouveaux investissements en Suisse). Le concurrent texan, Fossil Group, travaille lui aussi l'univers de la mode (Burberry, Armani, Diesel, Marc Jacob). Quant au groupe Movado, il a choisi de se battre sur le terrain de la haute horlogerie Swiss Made (Ebel, Concord) sans négliger les griffes fashion (Hugo Boss, Lacoste, Tommy Hilfiger).
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«Code Breaker» de Hamilton, maisoaux racines américaines jamais reniées malgré son intégration dans le
Swatch Group. Boîte titane, mouvement
chronographe automatique avec tachymètre.

Ce réarmement marketing des grands groupes locaux est cependant moins spectaculaire que l'éclosion de marques purement américaines (même si elles donnent dans le Swiss Made) capables de s'imposer au monde entier en quelques années. Du bling bling à la haute horlogerie
L'exemple le plus connu est sans doute celui de Jacob & Co, histoire très américaine d'un petit immigrant russe, Jacob Arabo, connu comme «Jacob the Jeweler» et devenu en moins de cinq ans référence contemporaine pour les montres de haute joaillerie, puis coqueluche de toutes les stars de la planète. Son secret: le sertissage bling bling pour se faire connaître, puis celui «à la genevoise» pour se faire respecter et enfin, la surenchère mécanique dans la haute horlogerie, avec quelques «premières mondiales» inattendues pour une marque tout d'abord abonnée aux montres à quartz. Tourbillons à 31 jours de réserve de marche ou montres à cinq fuseaux horaires sur un même mouvement témoignent de cette évolution vers les hautes sphères de l'art horloger…
«Je suis fasciné par la haute horlogerie et par l'art mécanique, annonce clairement Jacob Arabo. Je ne suis qu'un designer, mais, avec mes équipes de motoristes suisses, j'ai bien l'intention de présenter, chaque année, des complications innovantes et des ‘‘premières mondiales''. Jacob & Co est une marque de haute horlogerie suisse. Nous devons nous montrer dignes de cette tradition d'exigence. Tradition que mes clients semblent eux aussi adorer: je ne fabrique pas assez de ces montres à complications pour répondre à toutes leurs demandes!» L'Amérique vouée au Swiss Made
L'exemple de Jacob & Co a stimulé les énergies des nouveaux acteurs. Avec deux clivages très nets: les marques locales à tropisme asiatique (fabrication et mouvement chinois pour rester à des prix «américains», c'est-à-dire très accessibles, en misant tout sur le design et les facilités du commerce en ligne) et les marques américaines à vocation horlogère, vouées au Swiss Made le plus scrupuleux.
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«World Is Yours», collection «Five Time Zone» de Jacob &
Co, une marque fondée aux Etats-Unis par un Russe. Sur le
cadran en nacre bleue sertie de diamants s'affichent
cinq fuseaux horaires

Deux maisons se détachent nettement de ce dernier lot: Ball Watch Company, dont les racines «ferroviaires » remontent à 1891 (c'était la montre officielle des réseaux de chemins de fer américains), et Bathys Hawaii, née sur l'île du même nom, dont le sérieux a été remarqué, avec une invitation à Baselworld dès sa seconde année d'existence pour y présenter d'impeccables montres nautiques Autres marques de référence pour la nouvelle horlogerie américaine: les Californiens d'Icelink, avec leur montre à six fuseaux horaires (Swiss Made, tout de même) ou Boseman, dont les collections d'excellente facture rendent un hommage horloger à l'esprit des cow-boys du Montana.
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«Engineer Master II Diver GMT» de Ball Watch, la marque autrefois
officielle des chemins de fer américains. Boîte acier, étanche à 300 m,
mouvement automatique avec second fuseau horaire, jour, date et lunette interne tournante.
Une vraie manufacture
Il ne manquait à cette panoplie qu'une «vraie» manufacture. C'est chose faite, avec RGM, entreprise née en Pennsylvanie, berceau traditionnel de l'horlogerie américaine, qui «manufacture» aujourd'hui son propre mouvement de 16 lignes, le calibre 801, premier calibre mécanique haut de gamme fabriqué aux Etats- Unis depuis près de quarante ans (Hamilton avait arrêté sa production en 1969). On se gardera d'oublier, dans ce tour d'horizon, les «pionenniers» de maisons comme Hamilton, que son intégration dans le Swatch Group n'a pas coupée de ses racines américaines, ou même une manufacture comme IWC, fondée à Schaffhouse en 1868 par des Américains qui voulaient profiter d'une main-d'oeuvre suisse moins coûteuse qu'aux Etats-Unis. La roue tourne…
La dynamique est lancée et les Etats-Unis sont redevenus un grand pays de création horlogère. Leur dévotion appuyée pour le Swiss Made n'en est que plus flatteuse.
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«6Time Zone Snow» du Californien IceLink. Boîte en or rose sertie de diamants, avec six cadrans correspondant à six fuseaux horaires moins un, lequel est remplacé par des diamants libres.

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Dans cette montre signée RGM, entreprise née en Pennsylvanie, se cache le calibre 801, premier mouvement mécanique haut de gamme fabriqué aux Etats-Unis depuis près de quarante ans.

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