Classer, catégoriser, organiser est toujours, au fond, un acte politique. Difficile de tracer une frontière nette entre ce qu’est (ou devrait être) une montre de sport et le reste du monde. Nous voici donc au point de rencontre des tourbillons, chronographes et autres exceptions mécaniques. La montre de sport peut à la fois être chacune et aucune d’entre elles, mais à condition de remplir certains critères, à savoir : une robustesse démontrée, un bracelet et une boucle adaptée à la pratique sportive, et bien souvent un chronographe à la précision irréprochable.
S’il est vrai que dans certains cas l’évidence est frappante, dans d’autres la frontière est plus ténue et la tâche du Jury est énorme. Il lui faut à la fois proposer une sélection consensuelle, sans pour autant sombrer dans un tout uniforme qui nous ferait assurément mourir d’ennui lors de la remise des prix le 8 novembre prochain.
Alors, le Jury présidé par Aurel Bacs ne s’est pas reposé sur ses lauriers et nous propose cette année une sélection audacieuse, car très hétérogène. Difficile des mettre nos six garde-temps sur un pied d’égalité, mais c’est évidemment ça… « la dure loi du sport ». Alors, qui des deux sous-marines, de la « voileuse », des deux inclassables ou de la vintage saura le mieux défendre ses atouts ?
Sous le niveau de la mer
Incontournables de la catégorie sport, les montres de plongée facilement reconnaissables à leur lunette rotative se partageront la vedette entre la Grand Seiko Montre de plongée Hi-Beat 36000 Professional 600 m et la Tudor Pelagos LHD. Alors que la Tudor est empreinte de sobriété et d’harmonie grâce aux rappels de beige sur son cadran, sa lunette, son calendrier et ses aiguilles, elle possède aussi un marqueur fort : elle s’adresse à 15 % de la population… aux gauchers ! La tige de remontoir est placée sur la gauche de la carrure, pour un port de la montre au poignet droit. De quoi ravir ceux qui s’estiment lésés, même si beaucoup de gauchers ont déjà pris l’habitude de porter leur garde-temps… à gauche !
Le Jury aura également à se pencher sur le cas de la Grand Seiko, une grande première ! C’est effectivement la première fois que la marque propose à ses passionnés une montre de plongée mécanique. Le résultat est d’ores et déjà excellent avec sa réserve de marche de 55 h, sa précision de – 3 à + 5 secondes par jour, l’usage du titane à haute intensité pour le boîtier et le bracelet, et pour finir, des rainures particulièrement marquées sur la lunette qui confèrent du style à cette fonction indissociable de l’esprit plongée.
Hisse et ho !
Le jury prendra-t-il le large avec Ulysse Nardin ? L’horloger du Locle entre en compétition avec une montre de régate issue de son partenariat avec Artémis Racing, l’équipe suédoise engagée dans la précédente America’s Cup. Le résultat est à la hauteur du défi technologique que représente cette compétition, par ailleurs plus vieux trophée sportif de l’époque moderne. Son originalité réside sans aucun doute dans son compte à rebours muni d’un inverseur. Grâce à son système breveté, la trotteuse égrène les secondes dans une période comprise entre une et dix minutes, avant de repartir en chronométrage standard une fois le décompte terminé. Côté cadran, le bleu océan associé aux indexes jaunes permet de remettre au centre la genèse de la montre : le partenariat avec l’équipe de voile suédoise.
Mi-classique, mi-moderne
Une vintage qui n’en est pas une. La Montblanc Timewalker Chronograph Rally Timer Counter Limited Edition 100 reprend tous les codes des vieux chronographes et l’on croirait presque tenir entre ses mains une montre de poche tout droit sortie des années 30. Eh bien non ! Il s’agit bien d’une nouveauté et en plus cette Montblanc se métamorphose tour à tour en montre à bracelet, en montre de poche et pour finir… en horloge de bord ! Son monopoussoir à 12 h et l’aiguille rouge des secondes du chronographe qui court le long du tachymètre nous propulsent instantanément dans l’univers de la belle course automobile. Pour finir, son boîtier de 50 mm en titane grade 2 satisfait aux exigences de résistance d’une montre sportive, d’ailleurs largement testée par les services internes de la marque, en simulant une utilisation réelle et intense sur plus de 500 h afin de s’assurer de son étanchéité parfaite.
Les inclassables
« L’art de la fusion » comme dirait l’autre. Fidèle à sa maxime, Hublot récidive et propose un ingénieux garde-temps dessiné par Ferrari. La Hublot Techframe Ferrari Tourbillon Chronograph est en effet le fruit d’une superbe collaboration avec la marque au cheval cabré qui fête son 70e anniversaire cette année et qui a mis un point d’honneur à nous dévoiler son moteur. L’observateur, ou l’heureux propriétaire, peut ainsi se plonger dans son tourbillon chronographe mû par un mouvement de manufacture conçu et développé chez Hublot et affichant 5 jours de réserve de marche. Détail de taille pour les sportifs, le chronographe s’actionne grâce à un unique poussoir pour les fonctions start-stop et reset.
Le plus étrange et surprenant pour la fin. MB&F entre en compétition avec une montre symbolisant une méduse, et pouvant rappeler – pourquoi pas – un compas magnétique de bateau. L’Horological Machine N°7 Aquapod a atterri en catégorie sport bien qu’elle ne réponde pas aux canons traditionnels de la catégorie. Pourtant, son look atypique avec sa construction sphérique tridimensionnelle et son tourbillon volant au centre ne manqueront pas de provoquer les débats le 8 novembre prochain !
Alors, qu’il s’agisse d’une pure sportive, d’une allure sportive, ou d’une prétendue sportive, l’idée d’une telle classification est de continuer à soulever de nouvelles questions, sans nécessairement devoir apporter les réponses qui vont avec. C’est la beauté de l’art horloger.