Baselworld 2019, la guerre des mots

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Baselworld 2019 – a war of words - Editorial
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Baselworld en pleine tourmente après les mots durs d'un CEO et la démission d'un autre.

Les déclarations de Nick Hayek à la NZZ am Sonntag du 29 juillet ont fait fureur dans l'industrie horlogère. En ce dimanche matin léthargique, le monde horloger apprenait que le plus grand groupe horloger du monde ne participerait pas à la plus grande foire horlogère mondiale l’année prochaine, à la plus grande surprise des dirigeants de Baselworld.

C'était le baptême du feu pour le nouveau directeur général de l'exposition, Michel Loris-Melikoff, en poste depuis moins d'un mois. La réponse est venue le lendemain dans un communiqué de presse qui, en soi, accentuait encore les maux de Baselworld. Premièrement, il a été envoyé après 18 heures, après la clôture de la journée de travail. Deuxièmement, et plus inquiétant encore, malgré cette heure tardive, il semble avoir été préparé à la hâte et ne comportait aucune des réponses qui auraient pu rassurer les autres exposants et l'horlogerie dans son ensemble. Il promettait, par exemple, «de nombreux nouveaux formats et idées», sans préciser quels formats ni quelles idées.

En revanche, il ressort clairement de ce communiqué de presse que l'espace d'exposition sera encore une fois très différent l'année prochaine. Après avoir déménagé de la Halle 1.2 à la Halle 1.1 en 2018, "Les Ateliers" arrivent maintenant au rez-de-chaussée où ils seront logés dans la section sud de la Halle 1.0, restée vacante cette année. La Halle 1.1 abritera "The Loop", une exposition sur l'horlogerie, mais on ne sait pas si elle y sera seule, ou dans le grand espace libéré l'année dernière par un certain nombre de marques absentes. La Halle 1.2 sera rouverte pour accueillir un espace d’exposition pour les fabricants de bijoux ainsi qu’"une journée de presse entièrement revue et un premier sommet des détaillants." Apparemment, il y aura aussi "un large éventail de services de traiteur". Mais j'imagine que les exposants ont des préoccupations plus importantes que la restauration pendant la foire.

Entretemps, M. Hayek avait été encore plus dur dans une interview téléphonique avec CNBC le matin même. Il n'y était plus seulement question de ne pas avoir besoin de l'exposition, mais aussi d’une réaction à une direction "arrogante" qui traite ses exposants comme des "gens qui n’ont qu’à payer et se taire." M. Hayek a également déclaré que le Swatch Group chercherait des alternatives "plus créatives" à Baselworld, et reprendrait à son compte le travail qu'il attendait des organisateurs de l'exposition. Il a confirmé que le groupe ne sera pas à Baselworld l’année prochaine. Seul le temps dira s’il s’agit d’un stratagème de négociation aux fins obtenir de meilleures conditions ou s'il est vraiment sérieux.

M. Loris-Melikoff a tenu à réfuter les allégations de M. Hayek selon lesquelles les exposants n’avaient pas été consultés sur les changements prévus, et a énuméré les différentes étapes des présentations (début mai pour le comité consultatif, fin juin pour les exposants suisses et le 4 juillet pour les exposants internationaux). Il a également évoqué la présence d'un "haut responsable du Swatch Group" lors de ces discussions, faisant sans aucun doute référence au CEO de Tissot, François Thiébaud, président du Comité des exposants suisses (une fonction à laquelle il pourrait bien devoir renoncer si sa marque n’expose plus à Baselworld).

De toute évidence, et alors que toute l’attention de l’industrie horlogère était rivée sur elle, il semble que la direction de Baselworld 2019 ait manqué une bonne occasion de faire une déclaration d’intention claire et de présenter des faits, aussi froids et durs soient-ils. Ce dont l'industrie horlogère a besoin plus que tout - sans parler des actionnaires de la maison mère de Baselworld, MCH - c'est de clarté. Après l’annonce vendredi passé de la démission de son CEO, René Kamm, on espère que son successeur a reçu le message.