L’heure de vérité

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Truth Tellers - WorldTempus Rant #11
Internet a bouleversé le rapport des marques à leurs clients. Petits ou gros mensonges sont immédiatement démasqués et se paient comptant. Une révolution au service de la qualité, pour le meilleur.

Préparez-vous à affronter la dure réalité !
Il fut un temps où certaines sociétés horlogères mentaient à tour de bras à leurs clients. C’est choquant, je sais, mais véridique. Dans la période qui a précédé l’avènement d’Internet, certaines sociétés horlogères s’estimaient suffisamment loin de leurs marchés pour pouvoir leur raconter ce que bon leur semblait.

J’ai su alors qu’on ne m’avait pas tout dit...
“Vous fabriquez tout vous-mêmes?”, leur demandait-on.
“Bien sûr”, répondaient ces sociétés la bouche en coeur, sûres de ne pas être prises sur le fait. Je me souviens de l’un de mes premiers périples au pays de l’horlogerie suisse il y a de ça vingt ans. J’ai visité une manufacture après l’autre, et toutes m’ont affirmé fabriquer leurs montres elles-mêmes et à 100 %.
Puis, à la fin de mon voyage, lorsque je me suis rendu dans les ateliers de Christophe Claret,  j’ai constaté qu’il fabriquait la plupart des mouvements que j’avais vus auparavant. J’ai su alors qu’on ne m’avait pas tout dit. J’imagine que j’étais plutôt naïf à l’époque, et que les années passant, je suis probablement devenu un peu plus blasé, mais je ne comprends toujours pas pourquoi ces compagnies ont eu recours à de telles affirmations. Il n’est en rien préjudiciable d’utiliser des mouvements Claret – il réalisait des mouvements complexes mieux que tout autre et c’est toujours le cas – mais les sociétés en questions préféraient s’en attribuer tout le mérite.

Heureusement, les choses ont changé. Les sociétés sont plus transparentes sur ce qu’elles font et qui le fait, et les horlogers et les artisans sont désormais reconnus pour le travail phénoménal qu’ils accomplissent. Je pense que certaines sociétés étaient inquiètes à l’idée de donner à leurs clients des informations qui auraient pu porter à confusion, d’où la posture: ce que les acheteurs ne savaient pas, ne pouvait pas non plus leur faire de mal.

Avec Internet et le flux continu d’information aujourd’hui, il est difficile de garder un secret, et encore plus ardu de continuer à omettre des informations ou d’énoncer des demi-vérités. Il y a peu, une société horlogère a présenté un tout nouveau mouvement comme le sien, en propre, à 100%, lors d’une conférence de presse grandiloquente. Nous, journalistes horlogers, nous avons applaudi, bu notre coupe de champagne ou notre jus de fruit avant de rentrer à la maison lire le communiqué de presse et nous préparer à écrire nos articles.
En un jour, le mouvement en question a été démasqué, non pas par la presse horlogère, mais par des collectionneurs sur les forums, révélant ce dont il s’agissait réellement : un mouvement déjà existant et dont la société avait acheté les droits.

À l’évidence, la société ayant acheté le mouvement, techniquement parlant, il devenait « leur » propriété, mais cette tentative de jouer sur les mots à déclenché les foudres de l’opinion. De fait, le président de la société a été obligé de reconnaître l’erreur commise et de rétablir les faits.

Bien heureusement qu’Internet existe, de même que les passionnés de montres obsédés par le plus minuscule des détails, parce qu’ils contraignent les sociétés horlogères à l’honnêteté. Aujourd’hui, si une société horlogère se contente d’une vérité en demi-teinte, quelqu’un, quelque part se fera fort de mettre le doigt dessus.
Et il faudra bien ensuite payer les pots cassés.
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